Bonhomme, Pierre, Georges, charpentier puis militaire de carrière, sous-officier du génie, décoré de la médaille militaire[1], né le 6 janvier 1910 à La Romagne, fils de Désiré Vital Bonhomme et de Blanche Georges, n° de matricule 891. Il est fait prisonnier à Goviller (Meurthe-et-Moselle) le 21 juin 1940[2].
[1] Attribuée par un décret paru au Journal officiel de la République française n° 239 du 9 octobre 1949, page 10146, qui mentionne dix-huit ans de service et six campagnes.
[2] Liste du Frontstalag 162.
Il est dirigé vers un camp provisoire[1]. D’après une liste officielle des prisonniers français n° 28 du 9 octobre 1940, il est au Frontstalag 162 à Dommartin-lès-Toul (Meurthe-et-Moselle). Il porte le numéro de prisonnier 6987 et se trouve dans le quartier n° 4. Une liste nominative du camp d’Ecrouves (Meurthe-et-Moselle) datée du 13 juillet 1940 indique qu’il s’y trouve à ce moment-là.
[1] Fiche bristol [Karteikarte] du Frontstalag 162 en date du 9 octobre 1940.
A partir du 4 octobre 1940, il est au Stalag XVII B Krems-Gneixendorf[1]. C’est dans ce camp qu’il reçoit son immatriculation de prisonnier de guerre[2] n° 53026. Il se retrouve ensuite au Stalag III B Fürstenberg (arrondissement de l’Oder-Spree), d’après sa fiche bristol[3] du 9 octobre 1940.
[1] Gneixendorf est un village près de Krems-sur-le-Danube (Krems an der Donau) situé dans le Land de la Basse-Autriche.
[2] Kriegsgefangener.
[3] Karteikarte.
Cette ville correspond à l’actuelle Eisenhüttenstadt (Land du Brandebourg), en Allemagne. Cette ville nouvelle est issue de la fusion en 1961 de Fürstenberg, Staline-Ville[1], et Schönfließ. Cet immense camp se situe dans la vallée de l’Oder est situé à cent vingt kilomètres au sud-est de Berlin et à environ soixante kilomètres de la frontière polonaise[2]. C’est pour les autorités allemandes un camp modèle[3].
[1] Stalinstadt.
[2] La voie ferrée conduisant à Berlin et le canal de l’Oder forment en quelque sorte les limites naturelles du camp.
[3] Modelllager.
Selon une liste allemande datée du 20 novembre 1940, il est transféré au Stalag III A Luckenwalde[1] sous le n° 53021 le 13 novembre 1940 depuis le Stalag XVII B Krems-Gneixendorf. Il est présent dans le Stalag III D Berlin[2] le 24 novembre 1940, selon une carte de capture dont le tampon très effacé semblerait être du 18 décembre 1940.
[1] Land du Brandebourg, en Allemagne.
[2] Berlin-Lichterfelde est un quartier de Berlin dans l’arrondissement de Steglitz-Zehlendorf.
D’après une liste n° 111 reçue le 24 mars 1941 et une fiche de capture du CICR[1] du 1e décembre1944, il est probable qu’il est encore dans ce camp pendant cette période. Il semble qu’il y reste jusqu’à la libération de ce camp en avril 1945. D’après sa fiche nominative du Frontstalag 162 à Dommartin-lès-Toul (Meurthe-et-Moselle), Pierre Bonhomme est rapatrié le 27 mai 1945 au centre de Maubeuge (Nord)[2].
[1] Comité international de la Croix-Rouge.
[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 410 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Fouquet, Henri Albert, n° de matricule du recrutement 411, né le 20 octobre 1907 à La Romagne, fils de Gustave Fouquet et de Marie Carbonneaux, rappelé à l’activité le 2 octobre 1939, affecté au dépôt du génie n° 15. Il est fait prisonnier le 21 juin 1940 à Rambervillers (Vosges). Henri Fouquet[1] est interné au camp de transit de Baccarat (Meurthe-et-Moselle) avant d’être démobilisé par le comité départemental le 28 août 1941.
[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 392 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Lelong, Marceau Alfred, domestique de culture, classe de mobilisation 1927, n° de matricule de recrutement 1308, né le 11 novembre 1912 à La Romagne, fils de Jules Alcide Lelong et de Marie Claire Faveaux, rappelé le 26 août 1939 au 29e régiment régional.
Il passe au 22e régiment régional le 16 janvier 1940. Il est fait prisonnier à Etampes (Essonne) le 15 juin 1940. Interné au Stalag IV B Mühlberg[1], à une cinquantaine de kilomètres de Dresde. Il a le matricule n° 72021. Rapatrié le 30 mai 1945, Marceau Lelong est démobilisé le 1er juin 1945 par le comité départemental de Charleville[2].
[1] Ville allemande située dans l’arrondissement d’Elbe-Elster (Land du Brandebourg).
[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 423 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Lequeux, Armand Adonis, ferronnier, n° de matricule du recrutement 111, né le 19 mars 1915 à La Romagne, fils de Victor Eugène Lequeux et de Marie Georgette David, convoqué le 29 mars 1939 au 91e régiment d’infanterie, il passe au 295e régiment d’infanterie le 2 septembre 1939.
Fait prisonnier à La Salle[1] (Saône-et-Loire) le 28 juin 1940. Interné au Stalag II A Neubrandenbourg[2]. Il porte le numéro de prisonnier 66459. Malade, il est rapatrié le 4 juin 1941 et est démobilisé le 9 juillet 1941. Armand Lequeux se retire alors à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine)[3].
[1] Près de Mâcon (Saône-et-Loire).
[2] Ville d’Allemagne située dans le Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale, au nord de Berlin.
[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 442 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Macquin, Paul Adolphe, classe de mobilisation 1925, n° de matricule du recrutement 119, né le 7 janvier 1905 à La Romagne, fils de Paul Eugène Macquin et de Marie-Angèle Lantenois, rappelé à l’activité par mesure de mobilisation générale, il est affecté au dépôt ALVF[1] n° 209.
Parti aux armées le 11 février 1940 et affecté au 374e RALVF[2] 13e bataillon le 1er avril 1940. Il est fait prisonnier à « Archambeau[3] » le 20 juin 1940. Interné au Stalag II C Greifswald[4] sous le n° de prisonnier 3355. Paul Macquin est rapatrié le 28 mai 1945[5].
[1] Artillerie lourde sur voie ferrée.
[2] Régiment d’artillerie lourde sur voie ferrée.
[3] Sic, id est Bourg-Archambault (Vienne).
[4] Ville du nord de l’Allemagne (Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale).
[5] Archives départementales des Ardennes, 1R 378 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Macquin, Rémi Jean, commis de perception, né le 5 mars 1911 à La Romagne, fils de Paul Eugène Macquin et de Marie Angèle Lantenois, n° de matricule du recrutement 110.
Rappelé à l’activité le 2 septembre 1939, il est fait prisonnier à Saint-Dié (Vosges) le 22 juin 1940. Interné au Stalag XIII D Nuremberg-Langwasser[1] sous le n° de prisonnier 88022. Libéré le 5 mai 1945 et rapatrié le même jour, Rémi Macquin est démobilisé le 16 mai 1945 par le comité départemental de Charleville[2].
[1] Land de Bavière.
[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 415 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Malherbe, Eugène Jean, employé de commerce, n° de matricule du recrutement 230, né le 20 février 1913 à La Romagne, fils de Georges Malherbe et de Lucie Bonpart, rappelé à l’activité à la 2e section de COMA[1] le 25 août 1939 et affecté au groupe d’exploitation de la 52e division d’infanterie.
Nommé sergent le 21 juin 1940. Fait prisonnier à La Bourgonce (Vosges) le 22 juin 1940. Interné au Stalag XIII D Nuremberg-Langwasser. Eugène Jean Malherbe est rapatrié le 23 avril 1945 et démobilisé par le centre des Ardennes le 1er juin 1945.
[1] Commis et ouvriers militaires d’administration.
Marandel, Léon André, cultivateur, maréchal-ferrant, classe de mobilisation 1922, soldat au 140e régiment d’artillerie, n° de matricule du recrutement 244, né le 27 janvier 1902 à La Romagne, fils de Alfred Célestin Marandel et d’Eugénie Chéry.Rappelé à l’activité le 23 août 1939, il est fait prisonnier à Epinal (Vosges) et interné au Stalag XII D Trier[1]/Petrisberg sous le n° de prisonnier 1564. Rapatrié, Léon Marandel est démobilisé le 5 novembre 1945 par le comité départemental d’Amiens[2].
[1] Trèves est une ville du sud-ouest de l’Allemagne (Land de Rhénanie-Palatinat).
[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 356 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Marquigny, Henri Emile, ouvrier de culture, classe de mobilisation 1922, né le 20 mars 1906 à La Romagne, mort pour la France[1], n° matricule du recrutement 408, fils de Joseph Louis Emile Marquigny et de Marie Ida Boitte. Rappelé à l’activité le 20 septembre 1939 et affecté au 301e RALP[2].
Après un séjour à l’hôpital de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret) du 20 octobre 1939 au 24 février 1940 et sa convalescence, il rejoint le dépôt d’artillerie n° 302 le 17 mars 1940. Il est affecté le 29 mars 1940 au parc de munitions d’armée et passe à la 662e compagnie du parc de munitions d’armée.
Fait prisonnier le 12 juin 1940 au fort de La Chaume[3]. Henri Marquigny est rapatrié le 30 mai 1945 et décède quelques mois plus tard à l’hôpital militaire de Mézières le 5 octobre de la même année[4].
[1] Il figure à ce titre sur le monument aux morts de La Romagne.
[2] Régiment d’artillerie légère portée.
[3] Thierville-sur-Meuse, près de Verdun (Meuse).
[4] Archives départementales des Ardennes, 1R 385 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Mauroy[1], Gaston Auguste, n° de matricule du recrutement 269, né le 2 juillet 1902 à La Romagne, fils de Charles Emile Mauroy et de Juliette Léonie Bailly. Il est fait prisonnier à Maubert-Fontaine. Il est interné au Stalag XII A Limburg an der Lahn[2] sous le n° de prisonnier 21506. Gaston Mauroy est démobilisé le 31 mai 1945 par le comité départemental de Charleville.
[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 356 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
[2] Limbourg-sur-la-Lahn (Land de la Hesse).
Mauroy, Marcel Charles, n° de matricule du recrutement 59, né le 6 mai 1904 à La Romagne, fils de Charles Emile Mauroy et de Marie Juliette Léonie Bailly. Rappelé à l’activité le 24 août 1939, affecté au 17e RAD[1].
Fait prisonnier le 22 juin 1940 à La Bourgonce (Vosges). Il est interné au Stalag XIII B Weiden/Oberpfalz[2]. Il est rapatrié le 25 mai 1945 sous le matricule 83774. Marcel Mauroy est démobilisé par le comité départemental de Charleville le 30 mai 1945[3].
[1] Régiment d’artillerie divisionnaire.
[2] Weiden in der Oberpfalz (Land de la Bavière).
[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 371 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Miclet, Henri Léon, domestique, n° de matricule du recrutement 60, né le 16 février 1916 à La Romagne, fils de Paul Georges Miclet et de Célestine Constance Destrez. Rappelé à l’activité le 20 août 1939, affecté à la CM[1]. Capturé le 12 juin 1940 à Saint-Valéry-en-Caux (Seine-Maritime), il est au Stalag IX C Bad Sulza[2] sous le n° de prisonnier 3940. Rapatrié le 9 juin 1941 comme aîné de cinq enfants. Démobilisé par le comité départemental de Guéret (Creuse) le 25 juin 1941[3], Henri Miclet se retire à Lérat (Creuse).
[1] Cavalerie montée.
[2] Land de Thuringe.
[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 448 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Miclet, Joseph Emile, charron,classe de mobilisation 1926, n° de matricule du recrutement 434, né le 12 octobre 1906 à La Romagne, fils de Georges Miclet et de Célestine Destrez. Rappelé à l’activité le 25 août 1939 au dépôt d’artillerie n° 2.
Il est fait prisonnier à Redon (Ille-et-Vilaine) le 23 juin 1940, et est interné dans un Frontstalag sous le n° de prisonnier 11303 avant d’être mis en congé de captivité le 18 juillet 1941. Joseph Miclet est démobilisé le 1er août 1941[1].
[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 385 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Quentin, Gaston Fernand, militaire, n° de matricule du recrutement 490,décoré de la médaille militaire par décret du 21 décembre1954[1], né le 1er février 1920 à La Romagne, fils de Louis Albert Quentin et de Marie-Juliette Bosserelle.
Engagé en 1938 à l’intendance militaire de Versailles (Yvelines), il est affecté au 2e régiment du génie à Metz (Moselle) et est nommé caporal le 28 juillet 1938 puis sergent le 1er avril 1939. Il est fait prisonnier le 4 juillet 1940 et est interné au Stalag VII A Moosburg[2] avec le n° de prisonnier 30746.
Il est rapatrié le 23 mai 1945 et, après une permission d’un mois, il est dirigé en septembre 1945 à Bad-Salzig[3] en Allemagne. Gaston Quentin poursuit sa carrière militaire et devient officier[4].
[1] Journal officiel de la République française n° 5 du 5 janvier 1954.
[2] Land du Bade-Wurtemberg.
[3] Land de la Rhénanie-Palatinat.
[4] Archives départementales des Ardennes, 1R 468 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Quentin, Robert Léon, cultivateur puis militaire de carrière, n° de matricule du recrutement 63, né le 13 mai 1914 à La Romagne, fils de Louis Albert Quentin et de Marie Juliette Bosserelle. Après son engagement en 1932 et diverses affectations, il est nommé sergent au 105e régiment d’infanterie en juillet 1939.
Le 18 septembre 1939, il est affecté à la CHR[1] du dépôt d’infanterie 64. Il est muté le 1e janvier 1940 à une compagnie de passage[2]. Son contrat est maintenu tacitement. Muté à la CBI[3] le 24 mai 1940, il rejoint le DI 83[4] le 15 juin 1940 par ses propres moyens. Fait prisonnier[5] le 24 juin 1940, Robert Quentin est rapatrié le 15 juin 1945[6].
[1] Compagnie hors rang.
[2] Les documents consultés n’ont pas permis d’identifier laquelle.
[3] Compagnie de base et d’instruction.
[5] Aucun renseignement n’est donné sur le lieu de son emprisonnement.
[6] Archives départementales des Ardennes, 1R 434 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
Roncin[1], Henri Albert, ouvrier agricole, classe de mobilisation 1928, n° de matricule de recrutement 1093, né le 17 juin 1908 à La Romagne, fils de Calixte Sulpice Roncin et de Valentine Angèle Depurrieux. Rappelé à l’activité le 24 août 1939 et affecté au 348e régiment d’infanterie.
Il est fait prisonnier le 28 juin 1940 à Fontenay-le-Comte (Vendée) et interné au Stalag VIII C Żagań[2] sous le n° de prisonnier 11136. Henri Roncin est rapatrié et démobilisé le 26 septembre 1942 par le comité départemental de Charleville.
[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 400 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].
[2] Ville de Pologne connue aussi sous son nom allemand de Sagan.
Plusieurs hommes du rang nés à la Romagne ont donc été faits prisonniers de guerre en Allemagne dans les Stalags[1] du Troisième Reich. Si le sort des détenus des camps de concentration et d’extermination nazis est aujourd’hui mieux connu, celui des militaires emprisonnés en 1939-1945 reste encore un vaste champ d’étude. Il semble donc important d’expliciter ce que ces militaires romanais ont pu vivre…
[1] Abréviation de Kriegsgefangenen-Mannschafts-Stammlager (camp de base de prisonniers de guerre).
Entre mai et juin 1940, le soldat est le plus souvent envoyé, après sa capture, dans un Frontstalag[1]. C’est un lieu de rassemblement pour prisonniers de guerre de tous grades, doté d’une organisation très structurée, et avec un personnel important.
C’est en quelque sorte un espace de transit, avant l’acheminement vers les camps définitifs, disséminés sur tout le territoire allemand, et répartis entre les diverses circonscriptions militaires[2] du Reich : les hommes de troupe et les sous-officiers rejoignent des Stalags, et les officiers des Oflags[3].
[1] Ou Frontstammlager (camp de prisonniers dans les territoires français occupés).
[2] Wehrkreise.
[3] Offizier-Lager (camps d’officiers).
Les prisonniers subissent un long périple ferroviaire vers les camps qui leur sont assignés : entassés parfois à soixante dans des wagons de marchandises ou à bestiaux dépourvus de paille et surtout de sanitaires, ils doivent, à leur arrivée, parcourir à pied, encadrés par des gardes, le chemin séparant la gare de leur lieu de captivité.
Généralement, l’entrée du camp, symbolisée par une porte massive, est précédée d’une ou deux enceintes de barbelés avec, à intervalles réguliers, des miradors d’où des sentinelles surveillent les environs.
Le camp, pouvant accueillir plusieurs milliers d’hommes, est constitué de nombreuses baraques en bois ou en brique construites de part et d’autre d’une allée centrale. Elles permettent de concentrer dans un même lieu des prisonniers de différentes nationalités.
A l’intérieur de chaque baraquement, l’éclairage est chiche, et les châlits[1] à deux ou trois étages. Ces rectangles étroits et spartiates sont recouverts d’une très mince paillasse, et d’une seule couverture. A cet inconfort matériel, s’ajoute la promiscuité. Dans ces conditions, le sommeil du prisonnier de guerre est rarement réparateur.
[1] Cadre de lit en bois ou en métal.
C’est dans le premier camp où il est affecté que le prisonnier reçoit son immatriculation. Les initiales KG (Kriegsgefangener, c’est-à-dire prisonnier de guerre) sont peintes en blanc sur sa vareuse et sa musette. A partir de ce moment-là, il devient un numéro au sens strict. Cette anonymisation est pour lui une épreuve de plus.
D’une part, il doit surmonter la situation dans laquelle il est tombée comme soldat face à un ennemi supérieur en nombre et en matériel, mais il doit affronter d’autre part la mentalité de son époque qui le considère comme un vaincu.
Il est totalement soumis à l’autorité de ses geôliers allemands : lors de son arrivée, il subit le contrôle de son identité, une fouille intégrale lui est imposée. Ses objets personnels (livres, photographies, etc.) sont momentanément confisqués. Il ne les récupère que quelques jours plus tard, dûment tamponnés.
Il passe ensuite par l’étape de l’épouillage des vêtements et du corps. Les effets enlevés sont passés à l’étuve, avant d’être restitués à leur propriétaire. Pendant ce temps, le prisonnier est badigeonné d’insecticide. Malgré cela, tout au long de sa captivité, il est la proie de la vermine[1] et de la dysenterie.
[1] Insectes (poux, puces, punaises) parasites de l’homme et des animaux.
La nourriture est plus que frugale et constamment insuffisante. Le repas consiste en quelques louches de soupe claire, un morceau de pain et un tout petit bout de viande. Très vite, le prisonnier est tenaillé par la faim : il ressent une véritable torture physique, même si le gros cul[1] anesthésie momentanément sa souffrance.
[1] Tabac de troupe inférieur au Scaferlati Caporal (le fameux cube de gris). Le terme s’applique tout d’abord à un gros bâtiment de la marine de guerre. Par métonymie, il désigne un marin puis, par extension, un homme de troupe, un soldat.
La faim, la misère, les souvenirs d’un passé plus heureux atteignent leur moral. La dureté de leur vie est parfois atténuée par l’arrivée de colis ou de lettres, qui sont les seuls liens avec leur famille et leur vie antérieure. Le courrier met entre une dizaine et une quarantaine de jours pour parvenir à son destinataire.
Les prisonniers n’ont le droit pour correspondre avec les leurs qu’à deux lettres et deux cartes postales par mois. Ils ont la possibilité de recevoir mensuellement deux colis familiaux d’un kilo chacun et de temps en temps un paquet de cinq kilos.
En outre, ils reçoivent des cartons de la Croix-Rouge contenant entre autres du corned-beef[1], surnommé « singe » de façon argotique.
[1] Dans les pays francophones et depuis la Seconde Guerre mondiale, le corned-beef est connu une préparation culinaire de viande de bœuf habituellement salée, mise en petits morceaux, vendue dans une boîte de conserve métallique.
Pour ce qui est du réconfort spirituel, certains prisonniers éprouvent le besoin d’assister aux offices, qui sont assurés régulièrement. Dès septembre 1940, en France, l’Aumônerie générale des prisonniers de guerre, fondée par le cardinal Emmanuel Suhard, archevêque de Paris, est reconnue.
A partir de décembre, elle envoie dans les camps de prisonniers des « valises-chapelles », qui contiennent ce qui est nécessaire à la célébration de la messe. C’est ainsi qu’est distribué aux captifs un missel intitulé Prières du prisonnier : quelques simples prières pour rencontrer le Seigneur.
Au quotidien, l’organisation du travail est régie par la section III de la convention de Genève du 27 juillet 1929. Son article 27 précise : « Les sous-officiers prisonniers de guerre ne pourront être astreints qu’à des travaux de surveillance, à moins qu’ils ne fassent la demande expresse d’une occupation rémunératrice. »
Bien qu’ils soient comme eux enfermés dans les Stalags, les hommes du rang n’ont pas du tout le même traitement : la plupart du temps, ils sont contraints de travailler dans un Arbeitskommando[1] et donc de rejoindre des fermes, des usines, des carrières.
[1] Kommando concerne ici une unité de travail forcé.
Le réveil est fixé à cinq heures, les sentinelles allemandes s’adressent bruyamment aux prisonniers avec des « Raus ! Raus[1]! » ou des « Schnell ! Schnell[2] ! », les obligeant à se presser pour le rassemblement sur la place du Stalag. Matinal ou vespéral, il peut durer un long moment. Et ce, quelles que soient les conditions atmosphériques…
[1] « Dehors ! Dehors ! ».
[2] « Vite ! Vite ! ».
Les prisonniers de guerre sont ensuite dirigés sous escorte vers le lieu de leur travail. La durée du labeur peut alors atteindre treize heures. Il n’est pas exclu qu’ils soient retenus, si nécessaire, les dimanches et les jours fériés.
Lorsqu’ils sont libérés à partir d’avril 1945, ils sont en grande partie livrés à eux-mêmes et au bon vouloir des Américains ou des Russes. Ils partent sur des routes défoncées, à travers des paysages dévastés, avant que leur retour vers la France ne soit organisé.
Là, ils doivent retrouver leur travail ou réintégrer leurs unités après un mois de permission, se réadapter à leur vie d’avant et garder souvent le silence sur ce qu’ils ont subi en captivité. De nos jours, la détresse et le découragement de ces hommes se sont peu à peu effacés de la mémoire collective…