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Administration communale après la Révolution à La Romagne


La structure de la commune se met en place avec la loi du 22 décembre 1789. Elle établit une municipalité par ville (bourg, paroisse ou communauté de campagne), qui prend le relais des assemblées d’habitants.

A partir de cette date, le système électoral proposé est un suffrage à deux degrés. Il y a tout d’abord les électeurs primaires, qui votent pour les élections municipales, et qui choisissent des grands électeurs, seuls habilités à désigner les députés.


Selon les époques, on assiste à la mise en place d’un certain nombre de contraintes, ou d’assouplissements, pour être électeur ou éligible :

  • des conditions d’âge : vingt-cinq ans en 1791, vingt et un ans (sous le Consulat avec la constitution de l’an VIII, pendant le Premier Empire, ou lors des Cent-Jours), et même trente ans (sous la Restauration et la monarchie de Juillet), vingt et un ans à partir de la IIIe République, dix-huit ans depuis 1974 sous la Ve république ;
  • des conditions d’habitation : être dans le canton depuis six mois à un an, voire trois ans au moment du Second Empire ;
  • payer des contributions directes en 1789 (allant de la valeur de trois journées de travail en 1789, à 200 et 300 francs sous la Restauration ou la monarchie de Juillet). Ces conditions écartent du vote un certain nombre d’habitants du village.

Depuis la loi de 2010, il est nécessaire d’avoir dix-huit ans pour être éligible comme conseiller municipal.  En outre, il faut avoir une attache dans la commune, soit en y étant électeur, soit en étant inscrit au rôle des contributions directes. Dans certains cas, il existe des clauses d’inégibilité, liées aux fonctions exercées.

Ces lois sont à maintes reprises modifiées, et le suffrage universel masculin sans condition n’apparaît qu’à partir de la Seconde République, et ce pour une courte durée. Puis il est repris par la loi du 5 avril 1884, qui promulgue l’élection des conseils municipaux au suffrage universel, et l’élection du maire par les conseillers municipaux. Pendant le Second Empire, les nominations par le préfet prévalaient.


Fiche d'électrice de madame Adrienne Euphrasie Modeste née Marandel, boulangère, qui exerce pour la première fois son droit de vote à La Romagne (Ardennes). Archives départementales des Ardennes, 1010W 125 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire postérieures au 10 juillet 1940 (hors état civil, officiers publics et ministériels).]
Fiche d’électrice de madame Adrienne Euphrasie Modeste née Marandel, boulangère, qui exerce pour la première fois son droit de vote à La Romagne (Ardennes). Archives départementales des Ardennes, 1010W 125 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire postérieures au 10 juillet 1940 (hors état civil, officiers publics et ministériels).]

Quant au droit de vote des femmes, il faut attendre une ordonnance du 21 avril 1944 pour qu’il soit accordé. Et c’est le 29 avril 1945, lors des élections municipales, qu’il devient effectif.

De nos jours, le code électoral en vigueur distingue, pour les élections municipales, les communes de moins de trois mille cinq cents habitants, ce qui est le cas de La Romagne, et celles qui en ont davantage. Dans tous les cas, les conseillers municipaux sont élus pour six ans. Le conseil municipal détermine librement le nombre des adjoints.

Ainsi, à La Romagne, n’y en a-t-il qu’un seul jusqu’en 1993, et deux depuis. Ces derniers peuvent remplacer le maire dans ses prérogatives. L’élection du maire et de ses adjoints a lieu lors de la première réunion du nouveau conseil municipal élu. On constate que la première femme conseillère municipale a été élue en 1971 et que, depuis cette date, deux ou trois femmes y siègent, sans que l’on atteigne la parité.


La dénomination de maire est ancienne, et remonte au Moyen Âge. A partir de1792, la commune est administrée, tout d’abord par un officier public puis, à partir de l’année suivante, par trois membres, dont l’un est dénommé désormais agent municipal. De 1795 à 1799, les communes se regroupent en municipalités cantonales.

Chacune élit un agent municipal, qui devient membre de la municipalité cantonale. L’an IV[1], Pierre Langlet est nommé trésorier conservateur des biens communaux de La Romagne. En l’an V[2], Jean-Baptiste Devie est désigné agent municipal pour la Romagne. Tandis qu’en l’an VI[3], Pierre Gérard Merlin en devient adjoint.


[1] Du 23 septembre 1795 au 21 septembre 1796.

[2] Du 22 septembre 1796 au 21 septembre 1797.

[3] Du 22 septembre 1797 au 21 septembre 1798.


Ce n’est qu’à partir de 1800 que le terme de maire est employé à nouveau, pour désigner le premier magistrat d’une commune. A cette époque, et contrairement à la nôtre, cette fonction n’est pas rémunérée. Ce qui fait que ceux qui sont désignés par le préfet, sur une liste établie par les électeurs, doivent être assez aisés.


La vie administrative de la commune change avec le décret du 20 septembre 1792, puisqu’il impose désormais aux officiers publics de chaque municipalité de tenir en double exemplaire les registres d’état civil, qui jusque-là l’étaient par les curés (depuis l’ordonnance de Villers-Cotterêts).


Les premiers registres d’état civil[1] non religieux à La Romagne apparaissent en 1793. Parallèlement, les tables annuelles et décennales sont créées. Le point le plus important de ce décret est la prééminence du mariage civil sur le mariage religieux[2], et la reconnaissance du divorce. Le premier mariage dissous à La Romagne l’est par le maire de l’époque, Jean-Baptiste Devie.

Ce divorce[3] est prononcé le 5 vendémiaire an IX[4]. Il met fin à l’union célébrée le 27 novembre 1785 entre Thomas Tavernier et Marie-Catherine Dupont : la différence d’âge des époux est importante, la femme ayant quelque quinze ans de plus que son mari.


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/E 8 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série E = registres paroissiaux et d’état civil, sous-série E 8 = naissances 1793-an X, pages non paginées, vue 1/53 et suivantes, consultables en ligne. Voir aussi Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/E 9 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série E = registres paroissiaux et d’état civil, sous-série E 9 = mariages 1793-an X, pages non paginées, vue 1/42 et suivantes, consultables en ligne. Voir aussi Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/E 10 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série E = registres paroissiaux et d’état civil, sous-série E 10 = décès 1793-an X, pages non paginées, vue 1/35 et suivantes, consultables en ligne.

[2] L’enregistrement des décès et des mariages datait de l’ordonnance de Blois (1579), et de celle de Saint-Germain-en-Laye (1667).

[3] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/E 9 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série E = registres paroissiaux et d’état civil, sous-série E 9 = mariages 1793-an X, pages non paginées, vue 33/42 et suivantes, consultables en ligne.]

[4] 27 septembre 1800.


Alors que le choix des prénoms était, jusqu’à la Révolution, lié au martyrologe de l’Eglise, on assiste dans quelques familles de La Romagne (Hamel, Devie, Boudier, etc.) à l’octroi en deuxième ou troisième position des prénoms de Liberté, Egalité ou Victoire, sous l’influence des évènements révolutionnaires, et peut être par attachement aux valeurs nouvelles, entre l’an III[1] et l’an VI.

On retrouve ce même principe juste après la proclamation du Second Empire, avec l’exemple unique d’un enfant prénommé Louis-Napoléon.


[1] Du 22 septembre 1794 au 22 septembre 1795.


Rapidement, la loi du 11 germinal An XI[1] fixe l’immuabilité du prénom donné à la naissance, et choisi dans les différents calendriers, ou parmi les personnages de l’histoire ancienne. Néanmoins, on accorde à ceux qui avaient reçu un prénom révolutionnaire le pouvoir d’en changer.


[1] 1er avril 1803.


Depuis la loi du 28 pluviôse an VIII[1], chaque municipalité a un maire[2], un adjoint et un conseil municipal (le nombre de ses membres varie en fonction de l’importance de la population de la commune). En 2024, pour La Romagne, les conseillers municipaux sont au nombre de onze.

Les maires ont des fonctions administratives en lien avec la police et l’état civil. Quant au conseil municipal, il est concerné par les finances de la commune (contributions en centimes additionnels), les travaux nécessaires pour les biens communaux, en particulier l’entretien des chemins.


[1] 17 février 1800.

[2] Ce terme est employé dans les registres de la commune à partir de l’an IX (du 23 septembre 1800 au 22 septembre 1801).


Durant une courte période, la loi du 13 fructidor an VI[1] décrète que le mariage civil ne peut être célébré que par le président de l’administration municipale du chef-lieu de canton (Joseph Lacroix), juste après les cérémonies et discours officiels, et parfois avec un accompagnement de chants patriotiques. Le mariage d’Elisabeth Lepinois, originaire de La Romagne, se déroule ainsi à Rocquigny le 10 vendémiaire an VII[2].


[1] 30 août 1798.

[2] 1er octobre 1798. Voir Archives départementales des Ardennes, L 1337 [série L = administration générale, articles L 1276-1357 = hôpitaux, prisons, affaires cantonales et municipales, cotes L 1336-1337 : canton de Rocquigny. Délibérations. An IV-1819.]



Carte d'électeur de monsieur François Merlin, maire de La Romagne (Ardennes) de 1817 à 1837. Archives départementales des Ardennes, 7 J 43 [série J = archives d’origine privée (entrées par voie d’achat, don, legs ou dépôt), sous-série 7J = collection du docteur Octave Guelliot, érudit local, cote 7J 43 = ex-libris ardennais].
Carte d’électeur de monsieur François Merlin, maire de La Romagne (Ardennes) de 1817 à 1837. Archives départementales des Ardennes, 7 J 43 [série J = archives d’origine privée (entrées par voie d’achat, don, legs ou dépôt), sous-série 7J = collection du docteur Octave Guelliot, érudit local, cote 7J 43 = ex-libris ardennais].

Sous le Consulat, des listes de notables éligibles sont établies. Elles représentent un vivier pour le choix des maires par les préfets. Cette situation change peu jusqu’à la fin de la Restauration, car le pouvoir souhaite exercer un contrôle sur la gestion des communes.

La loi de 1831 sous la monarchie de Juillet permet aux Français d’élire leurs conseillers municipaux, et de prévoir un renouvellement du conseil municipal tous les trois ans. Le maire, lui, est chargé, à partir de 1837, de la nomination des agents communaux et de la réunion du conseil municipal quatre fois par an.


Après le coup d’Etat du 2 décembre 1851, qui fait du premier président de la Deuxième République Louis-Napoléon Bonaparte un empereur, le maire et chacun des conseillers se doivent chaque année désormais, lors d’une séance, de prêter serment d’obéissance à la constitution et fidélité à l’homme d’Etat.

C’est le cas par exemple lors de la séance du 2 mai 1852[1], qui s’adresse au président de la République. Puis, le 27 février 1853, le maire et l’adjoint prêtent cette fois serment à l’empereur. Il est à noter que, pour les chefs-lieux de canton, ce dernier garde des prérogatives pour la nomination du maire et des adjoints.

Afin de disposer dans toute la France de municipalités dociles, la loi du 5 mai 1855 ordonne le renouvellement total des conseils municipaux, par des élections qui ont lieu en juillet. Ce nouveau conseil, où l’on retrouve comme membres la moitié de ceux élus précédemment (dont Séraphin Guillaume, Pierre Devie-Laroche, Jean Charles Boudié, Joseph Raulin), est installé en août de cette même année.


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 1 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 1 = 24 juin 1849-6 août 1893.]


Les changements de régime entraînent toujours des bouleversements, si bien qu’après la guerre de 1870, et la débâcle qui s’ensuit, une nouvelle loi (du 14 avril 1871) impose un nouveau renouvellement des conseils municipaux, tout en rétablissant le principe de l’élection du maire par le conseil municipal.

Celui de La Romagne n’en est pas profondément transformé, puisque l’on y retrouve, comme auparavant, une bonne proportion de conseillers de la précédente municipalité : Pierre Gustave Devie-Collet, Séraphin Guillaume, Nicolas Laroche, Jean Charles Bonpart, et Philogone Legros.  Ils se retrouvent siéger avec Florentin Bocquet, Jean-Baptiste Devie (dit Devie-Devie), Noizet[1], et Hezette (maréchal-ferrant)[2].


[1] Le prénom est manquant.

[2] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 1 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 1 = 24 juin 1849-6 août 1893.] Les pages arrachées à ce registre des comptes rendus des conseils municipaux, entre le 12 septembre 1872 et le début de l’année 1875, soustraient des informations pour cette période.


Signatures des conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) après la séance du 23 septembre 1900. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 2 = 5 octobre 1893-13 mai 1922.]
Signatures des conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) après la séance du 23 septembre 1900. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 2 = 5 octobre 1893-13 mai 1922.]

Sous la Troisième République, le scrutin municipal se déroule tous les quatre ans puis, après la Seconde Guerre mondiale, tous les six ans, avec un scrutin à deux tours.

Par une ordonnance du 21 avril 1944 du Gouvernement provisoire de la République, et jusqu’au jour où des élections régulières sont organisées, les maires, adjoints et conseillers élus avant le 1er septembre 1939 sont maintenus ou rétablis dans leurs droits et fonctions, sauf en cas d’indignité pour délit de droit commun, ou d’attitude trop passive durant la guerre.

Contrairement à Chappes, Wasigny, La Romagne n’est pas dépourvue d’un maire. En effet, depuis octobre 1941, la municipalité élue avant la guerre est rentrée, à l’exception de Maurice Druart et de Léon Briard (qui a quitté la commune).


Les conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) sont élus en 1945 selon un scrutin plurinominal, à deux tours, à la majorité absolue. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Les conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) sont élus en 1945 selon un scrutin plurinominal, à deux tours, à la majorité absolue. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Des élections municipales sont organisées dans toute la France le 29 avril 1945[1]. Pour celles-ci, La Romagne compte cent trente-trois inscrits et quatre-vingt-dix-sept votants. Quatre-vingt-seize suffrages sont exprimés (un bulletin étant jugé nul). La liste comportait quarante et une candidatures, dont sept féminines.


[1] Archives départementales des Ardennes, 3M9 45 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 3M = élections et plébiscites, sous-sous série 3M9 = élections municipales, résultats pour le canton de Chaumont-Porcien en 1945, cote 3M9 45 = procès-verbaux des élections municipales ; procès-verbal de l’installation du conseil municipal.]


La majorité absolue étant fixée à quarante-neuf voix sur quatre-vingt-seize, les dix conseillers municipaux sont élus au premier tour. Alcide Cugnart devient maire avec neuf voix sur dix. Son adjoint Ernest Bauquet le suit de près, avec huit voix sur dix. Le succès de ces dix candidats creuse l’écart avec les trente et un autres, qui n’ont recueilli que d’une à dix-huit voix.

Les voix obtenues par les candidats non élus aux élections municipales de La Romagne (Ardennes) du 29 avril 1945 montrent une large dispersion de ces dernières. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Les voix obtenues par les candidats non élus aux élections municipales de La Romagne (Ardennes) du 29 avril 1945 montrent une large dispersion de ces dernières. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le conseil municipal, ainsi constitué après un unique tour, est dominé par la présence de sept cultivateurs, un artisan, un employé de commerce et un commerçant.

Les conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) élus le 29 avril 1945 sont majoritairement dans le domaine de l'agriculture, ce qui témoigne d'une société encore fort rurale. Graphique de type « secteur ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Les conseillers municipaux de La Romagne (Ardennes) élus le 29 avril 1945 sont majoritairement dans le domaine de l’agriculture, ce qui témoigne d’une société encore fort rurale. Graphique de type « secteur ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La France ayant retrouvé ses institutions politiques, avec la disparition de l’Etat Français[1], et la naissance de la IVe République, de nouvelles élections municipales sont organisées le 19 octobre 1947[2]. Au premier tour, huit conseillers sont élus. L’un d’entre eux refuse cette fonction (Monsieur Jonnart), arguant qu’il est désigné, mais qu’il n’était pas candidat.

Lors du scrutin précédent de 1945, une des trois femmes candidates avait obtenu trois voix, et les autres une seule. Dans le premier tour du scrutin de 1947, Thérèse Mouton Marquigny (seule femme à se présenter) obtient trente et une voix. Le second tour[3] permet l’élection des trois derniers conseillers, sur les six qui s’étaient maintenus. La composition change peu par rapport à celle de 1945. Il y a toujours 70 % de cultivateurs, mais un ouvrier fait son entrée. Le reste est représenté par un commerçant et un artisan.


[1] Nom du gouvernement de la France durant l’occupation allemande, de 1940 à 1944, désigné comme régime de Vichy, gouvernement de Vichy, ou simplement Vichy.

[2] Archives départementales des Ardennes, 3M9 45 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 3M = élections et plébiscites ; sous-sous série 3M9 = élections municipales, résultats pour le canton de Chaumont-Porcien en 1945, cote 3M9 45 = procès-verbaux des élections municipales ; procès-verbal de l’installation du conseil municipal.]

[3] Archives départementales des Ardennes, 3M9 172 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 3M = élections et plébiscites, sous-sous série 3M9 = élections municipales, résultats pour le canton de Chaumont-Porcien en 1945, cote 3M9 172 = tableau des conseillers municipaux en date du 27 octobre 1947.]


Les élections donnent parfois matière à querelle, et suscitent rumeurs ou diffamations, ce qui provoque des répliques parfois sibyllines de certains habitants, qui se sentent atteints dans leur honneur. Bien souvent, ce sont des électeurs de tendance cléricale ou républicaine qui s’affrontent.

Au cours des élections municipales de mars 1892, c’est ce que l’on peut voir de la part d’un correspondant anonyme, au soutien sans faille apporté au maire (certainement Paul Merlin) et à l’instituteur public, après son arrivée en novembre de l’année précédente. A cet article, un autre correspondant, tout aussi anonyme, répond par le biais d’une fable à la manière de La Fontaine, dépeignant le premier sous les traits d’un vil crapaud.

Il n’est pas possible de dire si ces attaques étaient monnaie courante, ou si elles correspondaient à des moments d’agitation politique particuliers, comme a pu en connaître la France.


Papillon anonyme, encre bleue sur papier, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Fleury.
Papillon anonyme, encre bleue sur papier, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Fleury.

Toujours est-il que, dans les années 1960 et 1970, les élections municipales provoquent la distribution de billets anonymes, parfois illustrés et souvent énigmatiques, tels que celui-ci : « Prépare les caboulets, l’heure va sonner. Les jeunes vont rentrer ». Le dessin d’une marmite évoque la caboulée[1], ou nourriture bouillie destinée aux porcs, mais aussi une soupe grossière.

La table compte douze places, mais le conseil municipal ne compte que 11 membres. Pierre Fleury se souvient que ces billets étaient mis dans les boîtes aux lettres, glissés sous les portes, ou jetés dans la cour de l’école.


[1] Régionalisme pour soupe, selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales.


Discours de monsieur Michel Mauroy, candidat pour le second tour aux élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 1983, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Fleury.
Discours de monsieur Michel Mauroy, candidat pour le second tour aux élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 1983, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Fleury.

En 1983, Michel Mauroy, candidat aux municipales, adresse aux électeurs du second tour une missive, dans laquelle il expose ce que doit être un bon conseiller municipal. Il y soutient que de jeunes conseillers sont un atout, et que la gestion d’une commune est loin d’un assemblage d’affaires personnelles. Cette lettre a probablement aidé ses électeurs à se décider, puisqu’il a été élu. Ce sera le seul mandat qu’il exercera.


Résultats du premier tour des élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Résultats du premier tour des élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Actuellement, pour la commune de La Romagne, qui compte plus de cent habitants, et moins de quatre cent quatre-vingt-dix-neuf, le nombre des conseillers à élire est de onze. En 2008, sur les cent quatorze inscrits, cent ont voté. Au premier tour, ils avaient à choisir parmi une liste de trente-deux personnes, dont cinq candidates et vingt-sept candidats. A l’issue du second tour (où il ne reste que dix candidats), le conseil municipal se compose de neuf hommes, et de deux femmes (Andrée Lequeux et Isabelle Marandel).


Résultats du second tour des élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Résultats du second tour des élections municipales de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « histogramme ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Après l’élection du maire, dont la fonction requiert de nombreuses aptitudes, le conseil municipal peut créer des commissions dans le cadre de délibérations, sur des sujets tels que la voirie, les travaux à entreprendre, le budget, etc.


En 1984, pour récompenser leur fidélité à leur engagement municipal, Roger Bocquet, André Druart et Henri Claise sont proposés pour être décorés de la médaille d’argent départementale et communale, car ils ont été conseillers municipaux durant vingt-quatre ans au moins. L’année suivante marque le tour de Victor Devie.

Puis, en 1987, est créée, par décret, une nouvelle décoration civile destinée à récompenser des services de longue durée accomplis au service de la région, du département ou de la commune : la médaille d’honneur régionale, départementale et communale. Elle est aussi bien attribuée aux conseillers qu’aux secrétaires de mairie. Elle se décline en trois échelons, correspondant aux années de service :

  • argent (vingt ans) ;
  • vermeil (trente ans) ;
  • or (trente-cinq ans).

En 1989, l’instituteur Pierre Fleury reçoit la médaille d’argent pour vingt-deux ans de secrétariat de mairie. En 1994, c’est le tour d’Yves Petipas (médaille d’argent) et de Victor Devie (médaille vermeil). Leur dévouement à la commune est à nouveau distingué en 2006 : Victor Devie est récipiendaire de la médaille d’or, tandis qu’Yves Petipas l’est de celle de vermeil, pour sa présence au conseil depuis 1971, et ses six années comme adjoint.


Pour pallier certains désordres apparus à la Révolution, en particulier l’abolition du droit exclusif de chasse, on instaure une police rurale, avec la création d’un agent chargé de la protection du domaine communal.

L’institution du garde-champêtre date de la loi du 20 messidor an III[1]. Il est proposé par le maire, mais est nommé par le préfet. C’est un homme digne de confiance, chargé d’annoncer les nouvelles officielles, et de veiller à la tranquillité du village.


[1] 8 juillet 1795.


Le premier dont on trouve une trace dans les archives est Mathieu Arbonville, en l’an II[1], puis Jean-Baptiste Grenet, originaire de Draize. Présenté par le citoyen Devie, ce dernier est agréé et jure, au cours de la séance du 24 pluviôse an IV[2], qui se tient à Rocquigny, de bien remplir les fonctions qui lui sont déférées[3].

Il est chargé de veiller à la stricte exécution des décisions prises par l’administration communale. Il est chargé, en plus, de verbaliser tous ceux qui enfreindraient l’observation des décadis.


[1] Du 6 octobre 1793 au 21 septembre 1794.

[2] 13 février 1796.

[3] Archives départementales des Ardennes, L 1337 [série L = administration générale, articles L 1276-1357 = hôpitaux, prisons, affaires cantonales et municipales, cotes L 1336-1337 : canton de Rocquigny. Délibérations. An IV-1819.]


Vote d'une indemnité au garde-champêtre de La Romagne (Ardennes). Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 2 = 5 octobre 1893-13 mai 1922.]
Vote d’une indemnité au garde-champêtre de La Romagne (Ardennes). Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]D 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série D = conseil municipal : registre des délibérations, sous-série D 2 = 5 octobre 1893-13 mai 1922.]

Plus tard, on le découvre dans ce même rôle. Il dresse des procès-verbaux à tous ceux qui ne respectent pas les règlements communaux concernant :

  • la pâture (que ce soit pour la garde des troupeaux de moutons, d’oies et de dindons) ;
  • la protection contre l’incendie (d’aucuns ont été condamnés à payer une amende, pour s’être promenés avec une bougie dans des lieux remplis de paille) ;
  • la circulation (comme passer avec des charrois trop lourds pour certains chemins).

Le Second Empire cadre strictement son recrutement, puisqu’il doit être âgé d’au moins vingt-cinq ans, prêter serment, et s’engager à ne jamais s’attabler à l’auberge pour boire, sous peine de révocation. Son traitement fait partie des dépenses obligatoires de la commune.


L’évolution du village, à la suite des deux guerres mondiales et des changements sociétaux, amène La Romagne à créer divers postes, qui répondent à des besoins spécifiques temporaires ou durables. Ils traduisent aussi la situation de l’emploi pour une période donnée.


Durée des mandats des maires de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « entonnoir ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Durée des mandats des maires de La Romagne (Ardennes) en 2008. Graphique de type « entonnoir ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

De la IIe République à nos jours, quinze maires soutenus par leurs adjoints se sont succédé pour gérer, améliorer, développer, et faire vivre le village et ses habitants, en temps de paix ou de guerre, montrant ainsi leur dévouement et leur attachement au bien-être de leurs concitoyens.

Archives départementales des Ardennes, DEP/ARDENNAIS 101, « La Romagne. — Obsèques » [chronique locale et régionale], in Le Petit Ardennais : journal politique [« puis » journal républicain] quotidien. Charleville : [s. n.], 1880-1944, quarante-neuvième année, n° 15166, lundi 23 et mardi 24 décembre 1929, p. 3, deuxième et troisième colonnes [presse locale ancienne, vue 3/6, consultable en ligne].
Archives départementales des Ardennes, DEP/ARDENNAIS 101, « La Romagne. — Obsèques » [chronique locale et régionale], in Le Petit Ardennais : journal politique [« puis » journal républicainquotidien. Charleville : [s. n.], 1880-1944, quarante-neuvième année, n° 15166, lundi 23 et mardi 24 décembre 1929, p. 3, deuxième et troisième colonnes [presse locale ancienne, vue 3/6, consultable en ligne].

L’administration communale de La Romagne a vu une diversification socioprofessionnelle des élus municipaux, et une lente progression de la participation féminine. La police rurale, incarnée par les gardes-champêtres, a adapté ses missions pour répondre aux besoins de sécurité et d’ordre public, tout en se professionnalisant. La Romagne illustre ainsi un équilibre entre tradition et innovation dans sa gestion locale, en s’adaptant aux mutations de la société.

Catégories
Administration communale Agriculteurs Agriculture Artisanat Artisans Fêtes Guerre mondiale (1914-1918) Métiers Professions Travailleurs Victimes de guerre

La Romagne de la guerre à la paix : une analyse comparative des recensements de 1918 et de 1921


Selon l’INSEE[1], « Le recensement de la population a pour vocation principale de mesurer le nombre d’habitants sur un territoire et d’en connaître les caractéristiques socio-démographiques[2]. »


[1] Institut national de la statistique et des études économiques.

[2] Bibliothèque nationale de France, document numérique, LNUM-33964, Chevalier, Pascale ; Seguin, Sébastien, « Retour sur deux siècles de recensements de la population », in Faits et chiffres (INSEE Pays de la Loire), n° 424, octobre 2011, page non paginée, vue 1/1, consultable en ligne sur le site de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et sur Gallica.


De tels dénombrements remontent à l’Antiquité. L’un des plus connus est celui de l’empereur Auguste[1], lors duquel Joseph et Marie doivent être répertoriés à Bethléem.


[1] Contrairement aux affirmations de l’évangéliste dans Luc, II,1-5, le recensement de Quirinius en Judée et en Syrie ne serait pas la version régionale d’un dénombrement global. Si l’activité censoriale augustéenne est attestée, son homogénéité est contestée.


En ce qui concerne la France, le comptage des habitants est confié avant la Révolution aux curés, qui informent l’intendant de la province du nombre de feux et de communiants dans leur paroisse. Ils se fondent alors sur le calcul suivant : un feu comprend en moyenne quatre personnes, et un communiant représente généralement trois habitants.


Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1918, pages non paginées, vues 1/15 et suivantes, consultables en ligne.
Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1918, pages non paginées, vues 1/15 et suivantes, consultables en ligne.

Le premier recensement postrévolutionnaire date du 20 floréal an VIII[1]. Ensuite, ils sont très réguliers et, à partir de 1876, ils se déroulent en théorie tous les cinq ans. C’est en cela que le recensement de 1918 à La Romagne peut susciter des interrogations, le précédent ayant eu lieu en 1911. Il y aurait dû en effet en avoir un en 1916, ce qui n’est pas le cas. La période de guerre explique ce décalage[2].


[1] Soit le 10 mai 1800.

[2] Une annulation s’observe pour la Seconde Guerre mondiale, le recensement passant directement de 1936 à 1946.


Celui qui est prévu en mars 1906 intègre un nouvel élément, en dehors de ceux précédemment relevés (nom, prénom, âge, lieu de naissance, adresse, profession, personnes vivant à la même adresse). Ce sont les caractéristiques des habitations. Jusqu’en 1918, aucune liste nominative ne peut être consultée pour La Romagne. Ces documents semblent avoir disparu, à l’exception de quatre feuillets concernant le recensement de 1911, à l’état de conservation très lacunaire[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1911, pages non paginées, [vues 1/4 et suivantes, non consultables en ligne à la date du 11 novembre 2024, en cours de numérisation.]


L’existence d’un recensement à la date du 1er février 1918 est très curieuse, puisque la guerre n’est pas terminée[1]. Comme le village est encore sous le joug allemand, ce document est certainement unique, sans que l’on sache parfaitement pourquoi. Aux archives départementales des Ardennes, il n’en a été trouvé aucun autre, concernant les villages du canton de Chaumont-Porcien, répertorié à cette date.


[1] Outre le traité de Versailles, le 28 juin 1919, quinze autres traités ont été signés entre 1918 et 1923 pour mettre fin à la guerre entre les différentes parties.


Il contient des renseignements sur les familles romanaises, sur des réfugiés, sur les activités imposées à la population par les Allemands. Il pallie l’absence d’autres sources, telles que des comptes rendus des réunions d’habitants (si le conseil municipal est dans l’impossibilité de tenir séance).


Quant aux archives des villages occupés par l’administration allemande, elles ont disparu dans les bombardements de mai 1940, alors que l’on tentait de les mettre à l’abri.


Le dénombrement de 1918[1] fait état de deux cent soixante-dix-neuf habitants, dont dix-sept sont absents : ce sont essentiellement les mobilisés. Il en reste donc deux cent soixante-deux, auxquels une note en ajoute deux, sans précision d’aucune sorte.

Sur la liste établie de la page 2 à 10, il est fait état de deux cent quatre-vingt-sept personnes présentes dans le village. Elles sont numérotées de 1 à 279, l’ordre alphabétique est respecté, tandis que, du numéro 280 à 287, il s’agit soit d’un ajout, soit d’un rectificatif, dont le but est d’être au plus près de la réalité.


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1918, pages non paginées, vues 1/15 et suivantes, consultables en ligne.


Un certain nombre de noms est biffé. Il s’agit de personnes faisant partie des colonnes civiles, étrangères à la population romanaise. Il est possible de distinguer les autochtones des réfugiés, ou des personnes déplacées au gré des besoins allemands.


Le 30 janvier 1918, vingt-deux personnes sont ainsi rayées des listes nominatives. Au 1er décembre1917, elles se trouvaient à Herbigny[1]. Elles doivent se rendre à Mesmont[2].  


[1] Actuellement, localité de Justine-Herbigny, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[2] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.


Trois enfants, âgés de cinq à sept ans, sont contraints de suivre leur mère vers cette nouvelle destination, alors qu’ils ne vivaient à La Romagne que depuis deux mois. Outre les difficultés liées à la guerre, leurs conditions de vie sont encore plus difficiles et déstabilisantes, à cause des changements imposés.

Et ce, d’autant plus que la famille est originaire du département du Pas-de-Calais[1], alors que le reste du groupe provient de plusieurs villes et villages des Ardennes (Revin, Rocroi, Haybes, Novion-Porcien, Anchamps[2]).


[1] Actuellement, région Hauts-de-France.

[2] Actuellement, communes du département des Ardennes, région Grand Est.


Une seconde vague de trente-cinq personnes arrive de manière échelonnée pour le battage[1]. Ce sont principalement des femmes (vingt-cinq), dont dix-huit sont sans profession, quatre appartiennent à la catégorie des ouvrières (une giletière, une écorceuse[2], deux couturières), deux travaillent dans le service (une ménagère[3] et une servante), et la dernière est employée de commerce.

Les hommes sont principalement des journaliers. Les Allemands choisissent les catégories les plus pauvres, et s’assurent ainsi d’une plus grande docilité. Les départs se font au plus tôt le 13 août, pour se terminer le 1er octobre.


[1] « Action de battre les céréales pour séparer la graine de l’épi. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[2] « Personne chargée d’écorcer. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[3] « Servante qui prend soin du ménage de quelqu’un (vieilli). », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


Panneau de sortie d’agglomération de Merlet vers Aguilcourt (Aisne), photographie en couleurs, prise de vue effectuée le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Panneau de sortie d’agglomération de Merlet vers Aguilcourt (Aisne), photographie en couleurs, prise de vue effectuée le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

En dehors de ces habitants temporaires, La Romagne compte plusieurs familles de réfugiés. Deux d’entre elles ont reçu l’ordre de quitter leurs villages respectifs, Merlet (hameau d’Aguilcourt[1]) et Courcy[2], en raison des opérations militaires sur le front de l’Aisne.

Leur arrivée date du même jour à La Romagne, le 26 novembre 1914. La troisième a vu son village, Liry[3] (à proximité de Vouziers[4]), occupé par les Allemands. Son arrivée est plus tardive, le 2 octobre 1915.


[1] Actuellement, commune du département de l’Aisne, région Hauts-de-France.

[2] Actuellement, commune du département de la Marne, région Grand Est.

[3] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[4] Idem.


La première famille se compose du couple Victor et Louise Millart[1], de leurs douze enfants et des grands-parents maternels, Emile Gentilhomme et sa femme Eglantine Lemaire. Tous ont évacué avec un tombereau attelé à un cheval, et ont marché le plus souvent tout au long de leur parcours.

Ce dernier, qui dépasse les cinquante kilomètres, passe de Bertricourt[2] à Asfeld[3], puis à Condé-lès-Herpy, Chaumont-Porcien, Givron, les Fondys[4] et enfin La Romagne[5]. On ignore le nombre de jours parcourus sur la route.


[1] Najman, Nadine, Un seul ciel pour tout le monde : histoire d’une famille de 1914 à 1918, Vanves : Édition du bout de la rue, « Témoignages », 2024, 285 p. [Trois chapitres sont consacrés à l’évacuation vers La Romagne (Ardennes), pages 103-109 ; 170-173 et 233-239. Des éléments sont repris sous une forme synthétique dans ce passage, avec l’accord de l’auteure de l’ouvrage.]

[2] Actuellement, commune du département de l’Aisne, région Hauts-de-France.

[3] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[4] Lieu-dit à Givron.

[5] Actuellement, communes du département des Ardennes, région Grand Est.


Portrait de Raymond Millart enfant, photographie ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en sépia), légendée à l’encre bleue au verso « Raymond Millart né le 28 mars 1912 vers 1916 à La Romagne Ardennes évacué de Merlet où se trouvait le front pendant la guerre 1914-1918 », collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Nadine Najman).
Portrait de Raymond Millart enfant, photographie ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en sépia), légendée à l’encre bleue au verso « Raymond Millart né le 28 mars 1912 vers 1916 à La Romagne Ardennes évacué de Merlet où se trouvait le front pendant la guerre 1914-1918 », collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Nadine Najman).

Les premiers temps, les Millart sont répartis entre plusieurs lieux de la commune. Mais la mère, qui souhaite voir sa famille réunie, demande un logement aux autorités allemandes. Elle obtient une maison au n° 18 de la rue Haute[1], avec pour voisin Alfred Mauroy, tandis que les grands-parents logent rue Basse (au n° 73), dans le voisinage d’Ernest Marandel.

Par deux fois, le séjour de cette famille à La Romagne est endeuillé : deux enfants naissent, un garçon en novembre 1915, et une petite fille en juillet 1917. Le premier décède le 14 mars 1916, et la seconde le 31 juillet 1917[2].


[1] Tous les numéros indiqués correspondent aux recensements de 1918 et de 1921.

[2] Archives départementales des Ardennes, 2E 369 10 [sous-série 2E = archives communales déposées, articles 2E 369 1-10 = registres paroissiaux et d’état civil de La Romagne, cote 2E 369 10 = années 1913-1945, registre 1913-1939 : naissances, mariages, décès.] Exemplaire de la mairie de La Romagne, consulté avec l’aimable autorisation de René Malherbe, maire de la commune.



Sauf Louise, la mère, et les enfants les plus jeunes, qui en sont dispensés, le père, les fils aînés, et les adolescentes, sont réquisitionnés pour les colonnes civiles et le travail agricole. Deux des jeunes filles sont employées à la scierie de Montmeillant[1].

L’une d’elles, Emilienne, échappe par la suite à ce travail ingrat, en gardant Jean et René, les deux premiers enfants du couple Georges Malherbe et Lucie Bonpart.


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.




Cette famille regagne Merlet au début de 1919. Mais, comme sa ferme est totalement détruite, elle doit vivre dans des baraquements spécialement construits pour accueillir les populations de retour.

Baraquement construit pendant la Première Guerre mondiale pour les civils, photographie en couleurs, prise de vue effectuée à Merlet, hameau d’Aguilcourt (Aisne) le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Baraquement construit pendant la Première Guerre mondiale pour les civils, photographie en couleurs, prise de vue effectuée à Merlet, hameau d’Aguilcourt (Aisne) le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Tombe de la famille Millart Gentilhomme au cimetière d’Aguilcourt (Aisne), photographie en noir et blanc, prise de vue effectuée le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Tombe de la famille Millart Gentilhomme au cimetière d’Aguilcourt (Aisne), photographie en noir et blanc, prise de vue effectuée le dimanche 1er septembre 2024. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Archives départementales des Ardennes, 2E 369 10 [sous-série 2E = archives communales déposées, articles 2E 369 1-10 = registres paroissiaux et d’état civil de La Romagne, cote 2E 369 10 = années 1913-1945, registre 1913-1939 : naissances, mariages, décès.] Exemplaire de la mairie de La Romagne (Ardennes), consulté avec l’aimable autorisation de René Malherbe, maire de la commune. Acte de décès de Jules Maximilien Gentilhomme, né le 9 mars 1845 à Aguilcourt (Aisne) et mort le 16 avril 1919 à La Romagne (Ardennes).
Archives départementales des Ardennes, 2E 369 10 [sous-série 2E = archives communales déposées, articles 2E 369 1-10 = registres paroissiaux et d’état civil de La Romagne, cote 2E 369 10 = années 1913-1945, registre 1913-1939 : naissances, mariages, décès.] Exemplaire de la mairie de La Romagne (Ardennes), consulté avec l’aimable autorisation de René Malherbe, maire de la commune. Acte de décès de Jules Maximilien Gentilhomme, né le 9 mars 1845 à Aguilcourt (Aisne) et mort le 16 avril 1919 à La Romagne (Ardennes).

Elle subit cette situation dans l’attente de la reconstruction de son habitation, ce qui demandera quelques années. Les aïeuls sont restés à la Romagne, pour des raisons de santé. Jules Maximilien Gentilhomme y décède le 16 avril 1919[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 2E 369 10 [sous-série 2E = archives communales déposées, articles 2E 369 1-10 = registres paroissiaux et d’état civil de La Romagne, cote 2E 369 10 = années 1913-1945, registre 1913-1939 : naissances, mariages, décès.] Exemplaire de la mairie de La Romagne, consulté avec l’aimable autorisation de René Malherbe, maire de la commune.


Carte postale française ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en sépia), légendée « Merlet-Aguilcourt (Aisne). Rue menant à Aguilcourt », éditée par Lessire-Millot, café-tabac, collection privée (avec l’aimable autorisation de monsieur Guy et madame Monique Millart).


Vue aérienne de Merlet, hameau d’Aguilcourt (Aisne), photographie en couleurs, collection privée (avec l’aimable autorisation de monsieur Guy et madame Monique Millart).


Portrait d’Anastasie Zénaïde Loutsch née Warnet, photographie ancienne en noir et blanc, tirage monochrome en sépia, collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Magalie Petit, son arrière-arrière-petite-nièce).
Portrait d’Anastasie Zénaïde Loutsch née Warnet, photographie ancienne en noir et blanc, tirage monochrome en sépia, collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Magalie Petit, son arrière-arrière-petite-nièce).

La deuxième famille se compose de Courcéens[1] : Dominique et Zénaïde Loutsch. Ils n’arrivent pas ensemble. Alors que la femme, Zénaïde, se retrouve à La Romagne le même jour que la famille Millart, son mari ne la rejoint que le 2 août 1915, en provenance de Tavaux[2].


[1] Gentilé des habitants de Courcy.

[2] Actuellement, Tavaux-et-Pontséricourt, commune du département de l’Aisne, région Hauts-de-France.


Archives départementales de la Marne, 35 Fi 1 [Série Fi = documents figurés et assimilés entrés par voie extraordinaire (photographies, cartes postales, dessins, gravures ou estampes, cartes et plans, affiches) ; sous-série 35 Fi = guerre 1914-1918], cliché positif représentant un paysage de guerre en 1914-1918, auteur anonyme, légendé et daté sur le montage « V. 322. Vue prise en première ligne dans la région des cavaliers de Courcy (Marne), 15 janvier 1916. », tirage argentique d'époque en noir et blanc monté sur carton, 1916, notice descriptive consultable en ligne.
Archives départementales de la Marne, 35 Fi 1 [Série Fi = documents figurés et assimilés entrés par voie extraordinaire (photographies, cartes postales, dessins, gravures ou estampes, cartes et plans, affiches) ; sous-série 35 Fi = guerre 1914-1918], cliché positif représentant un paysage de guerre en 1914-1918, auteur anonyme, légendé et daté sur le montage « V. 322. Vue prise en première ligne dans la région des cavaliers de Courcy (Marne), 15 janvier 1916. », tirage argentique d’époque en noir et blanc monté sur carton, 1916, notice descriptive consultable en ligne.

Eux aussi ont dû fuir la ligne de front, où Allemands et Français se disputent le secteur des Cavaliers de Courcy. Ce sont deux levées de terre, de part et d’autre du canal de l’Aisne à La Marne, où les belligérants ont creusé des tranchées. Dominique et Zénaïde vivent au n° 43 de la rue Haute.



La troisième famille réfugiée est une famille de cultivateurs de Liry, à une soixantaine de kilomètres. Elle est constituée du couple formé par Elisée et Thérèse Camuzet, auxquels s’ajoutent Esther Camuzet Cartelet, et deux fillettes, Marie, née en 1909, et Berthe, en 1913. Ils habitent tous ensemble au n° 55 de la rue Haute. Ils sont arrivés le 8 novembre 1915. Lorsqu’ils regagnent leur village, ils le découvrent presqu’entièrement détruit.


Reproduction moderne d’une photographie allemande ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en rouge), représentant un incendie à Liry (Ardennes) pendant la Première Guerre mondiale, collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Odette Corneille).

Reproduction moderne d’une photographie allemande ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en rouge), représentant un incendie à Liry (Ardennes) pendant la Première Guerre mondiale, collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Odette Corneille).


Reproduction moderne d’une photographie ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en sépia), légendée « Liry [Ardennes] 1919. La cloche a été enlevée par les Allemands en 1916. », collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Odette Corneille).
Reproduction moderne d’une photographie ancienne en noir et blanc (tirage monochrome en sépia), légendée « Liry [Ardennes] 1919. La cloche a été enlevée par les Allemands en 1916. », collection privée (avec l’aimable autorisation de madame Odette Corneille).

La vie laborieuse des Romanais se poursuit, malgré toutes les difficultés engendrées par les bouleversements de la vie quotidienne, et l’arrivée de réfugiés. Les archives de 1918 font apparaître que cinquante-quatre personnes travaillent, dont sept femmes (quatre couturières, une servante, une cultivatrice et une institutrice), et quarante-sept hommes (le curé étant exclu de ce comptage, puisque son activité relève d’une vocation, et non d’un métier au sens strict).


Parmi ces derniers, trente-huit sont en lien avec l’agriculture (vingt cultivateurs et dix-huit journaliers), et les neuf autres exercent diverses professions (instituteur, négociant, appariteur), ou sont artisans (deux maréchaux-ferrants, deux vanniers, un couvreur, un cordonnier). La mobilisation a restreint cette dernière catégorie. Et l’absence d’un boulanger dans ce recensement est notable.


Se pose, d’autre part, le problème du repérage des maisons, à une époque où la poste n’a pas encore fixé leur numérotage[1] dans les villages, et ce, pour faciliter la distribution du courrier.

En s’appuyant sur les recensements de 1918 et de 1921, l’on constate qu’en 1918, la ferme Marandel (n° 64 de la rue Haute) devient le n° 1 de cette même voie en 1921, et que l’identification du bâti pourrait se faire éventuellement en zigzag en 1918 : on compte d’un côté les maisons contiguës puis, s‘il y a une place vide, on compte celle du trottoir opposé.


[1] « Action de numéroter. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


Dans l’état actuel de la recherche, il semblerait très hypothétique de déterminer quelle logique a été suivie. Tout au plus pourrait-on supputer, sous toutes réserves, qu’elle aurait été inspirée par l’occupant allemand[1].


[1] Parallèlement à la Straßenweise Hufeisennummerierung (numérotation en fer à cheval rue par rue), fixée par un arrêté du roi de Prusse Frédéric-Guillaume III le 28 septembre 1799, il existe bien d’autres systèmes, de diverses époques, encore utilisés, de façon partielle, cumulative, et parfois sous des formes hybrides, dans certaines villes d’Allemagne, tels qu’une ortschaftsweise Durchnummerierung (numérotation continue par localité), une viertelweise Durchnummerierung (numérotation continue par quartier), une blockweise Nummerierung (numérotation par blocs), une wechselseitige oder Zick-Zack Nummerierung (numérotation alternée ou en zigzag), un block decimal system ou Philadelphia system (système décimal par blocs, ou système de Philadelphie), un metrisches System (système métrique), et enfin un dekametrisches System (système décamétrique). Sans compter que, depuis la mise en place de la loi du Grand Berlin (Gross-Berlin-Gesetz) le 1er octobre 1920, il n’est pas question dans cette ville de numérotation des maisons (Hausnummerierung) mais des terrains (Grundstücksnummerierung).


Sans certitude sur le mode de numérotation, il est difficile d’identifier précisément où se trouvaient les domiciles des trois familles évoquées précédemment. Cependant, en 1921, un certain nombre de maisons vides apparaît, tant rue Haute que rue Basse.

Il se pourrait qu’elles correspondissent aux habitations occupées par les troupes allemandes, et les réfugiés, pendant le conflit. Il est d’autre part impossible de formuler cette hypothèse pour les hameaux et les écarts, les maisons ayant disparu de nos jours, à quelques exceptions près.


Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1921, pages non paginées, vues 1/14 et suivantes, consultables en ligne.
Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1921, pages non paginées, vues 1/14 et suivantes, consultables en ligne.

En 1921, tous les réfugiés, et les populations déplacées, ont quitté le village depuis un peu plus de dix-huit mois. La population s’est stabilisée, et compte désormais deux cent cinquante-neuf habitants[1], répartis dans quatre-vingt-quinze maisons sur l’ensemble du terroir de La Romagne.

Deux cent quatorze (82,6 %) habitent dans les soixante-douze maisons du village proprement dit, et quarante-cinq (17,37 %) vivent dans les vingt-trois maisons des hameaux et des écarts. La rue Langlet n’accueille plus que quatre foyers en 1921, contre cinq en 1918. La rue Canon, un seul au lieu de deux.


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/F 1, [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série F = population – économie – statistiques, sous-série F1 = population : mouvement, recensement (liste nominative, récapitulatif), 1911-1931], dénombrement de 1921, pages non paginées, vues 1/14 et suivantes, consultables en ligne.


En 1921, la pyramide des âges des habitants de La Romagne (Ardennes) montre des variations plus importantes chez les hommes que chez les femmes. Graphique de type « barres empilées ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, la pyramide des âges des habitants de La Romagne (Ardennes) montre des variations plus importantes chez les hommes que chez les femmes. Graphique de type « barres empilées ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Alors que le taux de natalité est au plus bas durant la Première Guerre mondiale, il reprend au retour de la paix : dix naissances sont à noter depuis la fin des hostilités jusqu’au 25 mars 1921.


En 1921, la population active de La Romagne (Ardennes) est aux trois quarts composées d’agriculteurs et d’artisans. Graphique de type « histogramme groupé ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, la population active de La Romagne (Ardennes) est aux trois quarts composées d’agriculteurs et d’artisans. Graphique de type « histogramme groupé ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La population active est de quatre-vingt-sept personnes, qui se répartissent en soixante-dix-huit hommes et six femmes adultes, plus trois apprentis mineurs. Ainsi, une proportion de 33,6 % des deux cent cinquante-neuf habitants est active, tandis que les 66,4 % dits sans profession comptabilisent les personnes âgées, les enfants, et les mères au foyer.


Plusieurs d’entre elles s’occupent en fait d’un élevage domestique, et notamment de la traite, sans qu’elles soient officiellement comptabilisées comme actives : elles ne reçoivent aucun salaire.

En 1921, les propriétaires exploitants, qui représentent la catégorie la plus riche des agriculteurs de La Romagne (Ardennes), sont majoritaires. Graphique de type « secteurs en 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, les propriétaires exploitants, qui représentent la catégorie la plus riche des agriculteurs de La Romagne (Ardennes), sont majoritaires. Graphique de type « secteurs en 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

En 1921, le village retrouve tous ses artisans, qui peuvent ainsi répondre aux besoins des uns et des autres.

En 1921, les artisans de La Romagne (Ardennes) appartiennent à des corps de métiers centrés sur la vie agricole. Graphique de type « barres empilées ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, les artisans de La Romagne (Ardennes) appartiennent à des corps de métiers centrés sur la vie agricole. Graphique de type « barres empilées ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La reprise administrative étatique montre un maillage jusque dans les plus petites communes. Les employés d’Etat, municipaux, et cantonaux, sont représentés par le percepteur, l’instituteur et l’institutrice, le garde-champêtre, et un employé de la voirie cantonale. Les chemins de fer étant encore constitués de compagnies privées[1], les deux employés concernés sont classés à part.


[1] Le 1er janvier 1938, les cinq grandes compagnies ferroviaires privées de France fusionnent pour créer la Société nationale des chemins de fer français (SNCF).


En 1921, la rue principale de La Romagne (Ardennes) concentre approximativement les deux tiers de la population du village. Graphique de type « aires 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, la rue principale de La Romagne (Ardennes) concentre approximativement les deux tiers de la population du village. Graphique de type « aires 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Par rapport au recensement de 1911, une diminution s’amorce : La Romagne a perdu vingt-deux habitants en dix ans, soit 7,8 % de sa population. Ce phénomène se remarque davantage dans les hameaux, où la décroissance la plus visible est celle des Houïs : ce hameau perd douze habitants sur les vingt-huit qu’il comptait avant le déclenchement du conflit.

En 1921, trois hameaux regroupent 82 % des habitants de La Romagne (Ardennes), contre 17,8 % pour les trois autres. Graphique de type « aires 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
En 1921, trois hameaux regroupent 82 % des habitants de La Romagne (Ardennes), contre 17,8 % pour les trois autres. Graphique de type « aires 3D ». Crédits iconographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

C’est à la fois une des conséquences de la Première Guerre mondiale, de la poursuite du phénomène d’exode rural amorcé au siècle précédent, du développement de l’enseignement, et de l’intérêt pour des métiers aux salaires fixes, sans aléas liés à la nature.


Le drapeau français prend une dimension particulière le 11 novembre, jour de commémoration de l'Armistice de 1918. En ce jour de mémoire, il symbolise non seulement les valeurs de la République – liberté, égalité, fraternité – mais aussi l'hommage rendu aux soldats tombés pour la France lors de la Première Guerre mondiale. Arboré lors des cérémonies, le drapeau rappelle le sacrifice et le patriotisme de ceux qui ont combattu pour protéger ces idéaux, unissant ainsi la nation dans le souvenir et le respect.
Le drapeau français prend une dimension particulière le 11 novembre, jour de commémoration de l’Armistice de 1918. En ce jour de mémoire, il symbolise non seulement les valeurs de la République – liberté, égalité, fraternité – mais aussi l’hommage rendu aux soldats tombés pour la France lors de la Première Guerre mondiale. Arboré lors des cérémonies, le drapeau rappelle le sacrifice et le patriotisme de ceux qui ont combattu pour protéger ces idéaux, unissant ainsi la nation dans le souvenir et le respect.

L’analyse comparative des recensements de 1918 et de 1921 à La Romagne met en évidence l’impact singulier de la Première Guerre mondiale sur les Ardennes françaises, une région lourdement et directement affectée par les combats.

Ce département a été en effet marqué par l’occupation allemande, les destructions massives de villages, les exils forcés et les déplacements de populations, autant d’événements qui ont profondément bouleversé la structure sociale et économique locale.

De fait, les hostilités ont laissé des séquelles durables sur la démographie de la région, et les premiers efforts de retour à la normalité se sont heurtés aux conséquences de la guerre.

La spécificité des Ardennes en fait donc un lieu emblématique pour comprendre l’après-guerre en France. Ici, la reconstruction s’est confrontée aux blessures matérielles et humaines laissées par le conflit. Ainsi, le 11 novembre, fête particulièrement commémorée, en plus d’honorer la mémoire des soldats, rappelle également les épreuves traversées par les civils ardennais.

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La Romagne et ses moulins


Lieu-dit du Moulin à Vent, avec vue sur la forêt de Signy-l'Abbaye (Ardennes). Prise de vue effectuée le jeudi 12 septembre 2024 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Lieu-dit du Moulin à Vent, avec vue sur la forêt de Signy-l’Abbaye (Ardennes). Prise de vue effectuée le jeudi 12 septembre 2024 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le premier moulin romanais pour lequel on a quelques indications date de 1246 environ. Il est un don de Roger II de Rozoy et de sa femme aux moines de Signy-l’Abbaye[1], alors qu’ils envisagent encore d’être inhumés dans l’abbaye cistercienne. Ceci ne se réalise pas, puisque tous deux choisissent finalement de reposer dans l’abbaye de Chaumont, à laquelle ils sont profondément attachés[2].


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[2] Archives départementales des Ardennes, 2Mi 34 [série Mi = reproductions d’archives sous forme de microfilms, sous-série 2Mi = microformes de sécurité], microfilm reproduit d’après l’original des archives départementales des Ardennes, H 203 [série H = clergé régulier avant 1790, fonds H1-409 = abbayes, prieurés et convents d’hommes, articles H 203-237 = abbaye royale de Notre-Dame de Signy, cisterciens, filiale d’Igny, ligne de Clairvaux, commune de Signy-l’Abbaye, cote 203 = cartulaire (XIIIe siècle), 1134-1250], pages 427, 429, 433, passim.


Lieu-dit du Moulin à Vent, avec vue sur la forêt de Signy-l'Abbaye (Ardennes) et le Mont de Vergogne. Prise de vue effectuée le jeudi 12 septembre 2024 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Lieu-dit du Moulin à Vent, avec vue sur la forêt de Signy-l’Abbaye (Ardennes) et le Mont de Vergogne. Prise de vue effectuée le jeudi 12 septembre 2024 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

En réalité, en dotant ainsi les moines de Signy de la moitié du moulin, Roger II reconnait ses torts envers cet établissement, puisqu’il l’a établi tout près du bois d’Angeniville, sur un fonds appartenant à cette communauté.

Il donne ensuite la seconde partie du moulin contre une redevance en grains, et fait obligation aux habitants de La Romagne d’aller moudre, soit à ce moulin, soit à celui de Draize[1], appelé par la suite « Pute Peine ». Tous deux dépendent de cette même abbaye.


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.


Lieu-dit du Grand Moulin à Vent. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit du Grand Moulin à Vent. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

En 1270, Clémence, comtesse de Saulmes, ratifie les dons que Roger II et sa femme ont faits à l’église de Signy de « vivier[1] de molin et des appartenances qui sieent desous la Romaingne[2] », et donne une partie des terres qu’elle possède à La Romagne avec un second moulin.


[1] « Pièce d’eau courante ou dormante, dans laquelle on nourrit, on conserve du poisson », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[2] Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 2008-20343 < Vol. 1 >, Martin, Gérard-Adolphe, Essai historique sur Rozoy-sur-Serre et les environs : comprenant une grande partie de la Thiérache et du Porcien et quelques communes du Laonnois, Paris : le Livre d’histoire, « Monographies des villes et villages de France », 2007, tome I, 642 p. p. 389.


Lieu-dit du Petit Moulin à Vent. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit du Petit Moulin à Vent. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Le terroir de la Romagne ferait-il à cette époque état de trois lieux-dits portant le nom de Petit Moulin à Vent, de Grand Moulin à Vent, et de Côte du Moulin à Vent ? Ces trois lieux sont en tout cas inscrits dans la matrice cadastrale 1836-1914[1], mais ne sont plus occupés alors que par des terres cultivables.


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.


Un autre bâtiment assez proche, le moulin du Bois Martin, est détruit très probablement au moment des guerres de Religion. Il n’est reconstruit que bien plus tard, vers 1728, car il est utile aux gens de Montmeillant[1] et de La Romagne. Sa présence est attestée[2] par son inscription sur une carte des Naudin[3], puis sur la 43e feuille publiée de la Carte générale de la France (dite « carte de Cassini »), levée entre 1755 et 1758, vérifiée en 1759, et éditée en 1759-1760[4].


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[2] Tout comme celui du Merbion ou le petit moulin de la Cour Honorée, hameau de Saint-Jean-aux-bois (Ardennes).

[3] D’après une portion de carte référencée « Naudin Ch 20 ouest » fournie à l’auteure par l’Institut national de l’information géographique et forestière.

[4] Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-53095169, Baillergeau (topographe ; cartographe) ; Luc (cartographe) ; Durocher (cartographe) ; La Villette (cartographe) ; Chalmandrier, Nicolas (graveur) ; Le Roy le jeune (graveur en lettres) ; Cassini de Thury, César-François (cartographe ; éditeur scientifique), Carte générale de la France, n° 78, feuille 43e [Charleville-Mézières – Sedan], échelle au 1 : 86400 [ou 1 ligne pour 100 toises], 1 carte en couleurs ; 60 x 95 cm, [s. l.] : Thévenart ; Aubert, 1759-1760, vue 1/1, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François Mitterrand, GE FF-18595 (78).


Les terres du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l'échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.
Les terres du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l’échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.

Auparavant, un des seigneurs du village avait fait construire un moulin, dont l’existence est certaine en 1633. C’est le moulin Garrot[1], dont on peut retrouver quelques meuniers à partir des rôles des tailles pour le XVIIIe siècle.

Pour les suivants, ce sont les actes d’état civil ou notariés qui permettent de les identifier. Ce moulin tient certainement son nom de messire Jadin Garot, qui était lieutenant en la baronnie de Chaumont, et qui résidait à la Romagne. Ce qui est attesté en 1628 dans un bail de droit de pêche de l’étang de Denizy[2].


[1] Ou Garot. Avant une réforme de l’orthographe française en 1835, les graphies sont plus aléatoires, et le nom des lieux-dits varie souvent davantage d’un document à l’autre.

[2] Archives nationales, site de Paris, T 471, liasse 12 [série T = papiers d’origine privée tombés dans le domaine public, articles T 1-982 = papiers séquestrés pendant la Révolution, provenant de particuliers émigrés ou condamnés (1e partie), cote T 471 = papiers de Louis Bruno, comte de Boisgelin de Cucé, et de Marie Stanislas Catherine de Boufflers, son épouse.]


Synthèse du dépouillement des rôles des tailles, et du sondage d’actes d’état civil ou notariés des XVIIIe et XIXe siècles des archives départementales des Ardennes et des archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne).

En l’an II[1], il est nécessaire de recenser les moulins pour avoir une idée des ressources alimentaires et fournitures aux armées[2]. Les Ardennes comptent 685 moulins à roues perpendiculaires, 44 à roue horizontale et 94 à vent[3]. En 1810, le Rethélois compte 142 moulins, dont 57 à vent, 83 à eau et 2 à vapeur[4].


[1] Du calendrier républicain. Correspond aux années 1793 et 1794 du calendrier grégorien.

[2] Archives départementales des Ardennes, PERH12 22, Illaire, Martine, « Les enquêtes sur les moulins (an II-1810, 1851) », pp. 37-71, in Revue historique ardennaise, Tome XXV, année 1990, La révolution dans les Ardennes : huit études nouvelles, 228 pages, page 37.

[3] Ibid., page 49.

[4] Ibid., page 48.


La présence d’un moulin était un atout pour un village, et ce d’autant plus que les habitants faisaient leur pain à la maison[1]. C’est ainsi qu’un moulin est présent dans de nombreux villages environnants, comme à Draize, La Hardoye[2], Saint-Jean-aux-Bois[3], Rocquigny[4], Maranwez[5], Librecy[6].

Ce dernier, construit en 1604 par Hugues de Maupinois, et resté en fonction jusqu’en 1964, avait à l’origine deux roues en bois et deux paires de meules[7].


[1] Au XIXe siècle, les boulangeries font arriver la farine des minoteries.

[2] Actuellement, commune associée de Rocquigny, du département des Ardennes, région Grand Est.

[3] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[4] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[5] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[6] Le hameau de Librecy est sur la commune de Signy-l’Abbaye.

[7] Voir la description du moulin de Librecy, consultable en ligne sur le site de la Fédération des moulins de France.


Lieu-dit du Petit Moulin à Vent (détail). Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit du Petit Moulin à Vent (détail). Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Le moulin à vent a pu être la propriété de Jean-Baptiste Boudier, puisque c’est lui qui le loue moyennant 400 francs annuels pour une durée de 9 ans à partir de 1817[1] à François Boudsocq[2]. Un acte notarié est signé auprès d’un notaire nommé Fréal. Les archives de celui-ci ont disparu, comme beaucoup d’autres documents de ce secteur, cible de nombreuses guerres.


[1] Archives départementales des Ardennes, 3Q 1299 [série Q = domaines, enregistrement, hypothèques, sous-série 3Q = enregistrement et timbre, depuis l’an VII], registre des enregistrements du canton de Chaumont-Porcien, qui signale un acte notarié signé chez Fréal, notaire, le 2 mars 1817.

[2] Né le 27 octobre 1788 à Dizy-le-Gros (actuellement, commune du département de l’Aisne, région Hauts-de-France), et marié le 24 décembre 1810 à La Romagne.


Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l'échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l’échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.

Le moulin Garrot est situé sur la parcelle 449 du cadastre de 1835[1]. Les lieux-dits du Moulin Garrot, du Pré du Moulin Garrot et de la Cour du Moulin Garrot sont attestés sur la matrice cadastrale 1836-1914[2].


[1] Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l’échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.

[2] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.


Bail du moulin Garrot signé le 5 décembre 1840. Archives départementales des Ardennes, 3E 35 122 [série E = état civil, officiers publics et ministériels, sous-série 3E = notaires, articles 3E 1-276 = archives notariales de Charleville.]
Bail du moulin Garrot signé le 5 décembre 1840. Archives départementales des Ardennes, 3E 35 122 [série E = état civil, officiers publics et ministériels, sous-série 3E = notaires, articles 3E 1-276 = archives notariales de Charleville.]

Un bail concernant le moulin Garrot[1] est signé le 5 décembre 1840, en présence de deux témoins, Joseph Decary et Jacques Flamin (habitants de Wasigny[2]), en l’étude de maître Victor Cailteaux, notaire de cette bourgade.


[1] Archives départementales des Ardennes, 3E 35 122 [série E = état civil, officiers publics et ministériels, sous-série 3E = notaires, articles 3E 1-276 = archives notariales de Charleville.]

[2] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.


Lieu-dit de la Cour du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit de la Cour du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

François Modeste Lepinois, meunier et propriétaire de ce moulin, le loue à Joseph Noël, ancien meunier résidant à Grandchamps[1], pour neuf années consécutives à dater du 25 mars 1841. Une somme annuelle de 280 francs est à payer le jour d’entrée en jouissance du bien, et, les huit années suivantes, à chaque anniversaire.


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.


Lieu-dit du Pré du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit du Pré du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Ce moulin est un moulin à eau « à une tournure[1] », et diffère en cela du moulin du Merbion (commune de Saint-Jean-aux-Bois[2]), monté « à l’anglaise[3] », qui est la propriété de Prudence Gérarde Merlin en 1811.


[1] La roue hydraulique entraîne une seule meule.

[2] Commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[3] La roue hydraulique entraîne plusieurs meules.


Lieu-dit du Pré Haut du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit du Pré Haut du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

C’est un bâtiment construit en bois, couvert en ardoise, « nature de cuisine[1] », avec une petite « ravallée[2] » au levant[3], également en bois, et couverte de paille. En outre, la location comprend trois arpents[4], qui se composent de terres et « versennes »[5], de sol à froment, de clos et de prés.


[1] Expression notariale qui signifie « avec une cuisine ».

[2] Variante orthographique de « ravalée », ici une sorte d’arrière-cuisine.

[3] « La partie de l’horizon où le soleil se lève ; l’orient, l’est », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[4] « Ancienne mesure agraire équivalant à cent perches. Selon les contrées, l’arpent valait de trente à cinquante et un ares. », d’après le Dictionnaire de l’Académie française.

[5] Variante orthographique de versaine, « terre en jachère après deux récoltes », selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales.


Ces terrains ne sont pas isolés : ils touchent au chemin et à divers propriétaires du village. L’alimentation en eau se fait par le ruisseau du Moulin Garrot, dont la naissance se compose de plusieurs petites sources se réunissant à proximité du lieu-dit La Favée.


Signatures du bail du moulin Garrot le 5 décembre 1840. Archives départementales des Ardennes, 3E 35 122 [série E = état civil, officiers publics et ministériels, sous-série 3E = notaires, articles 3E 1-276 = archives notariales de Charleville.]
Signatures du bail du moulin Garrot le 5 décembre 1840. Archives départementales des Ardennes, 3E 35 122 [série E = état civil, officiers publics et ministériels, sous-série 3E = notaires, articles 3E 1-276 = archives notariales de Charleville.]

Les clauses du bail sont assez draconiennes. Il est interdit au locataire de sous-louer le bien, en tout ou partie, à un autre meunier, ce qui semble être malgré tout parfois pratiqué[1]. En aucun cas, il ne peut être indemnisé, ou obtenir une réduction du loyer, et ce, que ce soit en cas de chômage, de sécheresse, d’inondations, ou d’eau gelée. Mais il se doit de bien cultiver les terres, de les fumer, et de respecter les roies[2].


[1] Ainsi, le meunier Modeste Claise de La Hardoye loue en 1820 le moulin à Jean-Baptiste Lefèvre pour 1 250 francs. Un an après son entrée en location dans celui-ci, ce dernier le sous-loue à Brice Poncelet. Voir archives départementales des Ardennes, 3Q 1299 [série Q = domaines, enregistrement, hypothèques, sous-série 3Q = enregistrement et timbre, depuis l’an VII.]

[2] Pratique en lien avec l’assolement : « L’ensemble des terres était partagé en trois grands blocs appelés ‘soles’ dans le Bassin parisien, ‘roies’, ‘champs’ ou ‘saisons’ ailleurs. », selon L’Encyclopædia Universalis.


Les terres du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Les terres du Moulin Garrot. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Les propriétaires, eux, s’engagent à faire construire, pour le mois de juin 1841, un bâtiment « nature de grange[1] », et couvert de chaume, là où il conviendra, dans les environs du moulin. Ce dernier a été démoli quelques années après sa construction.


[1] Avec une grange.


Moulin à vent de Théophile Boudsocq, qui se trouverait sur la parcelle 285 du cadastre de 1835 (archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l'échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne). Ce n° 285 est cité dans la matrice cadastrale 1836-1914 des archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie. Mais d'autres documents évoquent le n° 385. Voir Archives départementales des Ardennes, 3P 369 [série P = finances, cadastre, postes depuis 1800, sous-série 3P = cadastre et remembrement.]
Moulin à vent de Théophile Boudsocq, qui se trouverait sur la parcelle 285 du cadastre de 1835 (archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l’échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne).

Ce n° 285 est cité dans la matrice cadastrale 1836-1914 des archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Mais d’autres documents évoquent le n° 385. Voir Archives départementales des Ardennes, 3P 369 [série P = finances, cadastre, postes depuis 1800, sous-série 3P = cadastre et remembrement.]

En 1841, Théophile Boudsocq fait construire un moulin à vent, soit sur la parcelle 285[1] (qui se trouve au lieu-dit du Poirier de la Croix[2]), soit sur la parcelle 385[3]. En 1866, il sera détruit[4].


[1] Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

[2] Archives départementales des Ardennes, La Romagne D1 1835, cadastre ancien, plan parcellaire avec une partie développée à l’échelle 1/1250, section et numéro de feuille D1 : la Cour Avril et le Bois Diot, 1835, consultable en ligne.

[3] Archives départementales des Ardennes, 3P 369 [série P = finances, cadastre, postes depuis 1800, sous-série 3P = cadastre et remembrement.]

[4] Ibid.


Le métier de meunier se transmet dans un milieu familial. C’est le cas pour les descendants de Jean Baptiste Suan[1], originaire de Draize, meunier à La Neuville-lès-Wasigny[2], époux de Marie-Anne Merlin (née à La Romagne).

Son activité est reprise par son fils Nicolas Alexis, marié à Béatrice Liberté Legros, et lui-même meunier au moulin du Merbion. Sa femme loue ce dernier[3] avec ses dépendances, terres et prés à un certain Jullien[4], pour neuf ans et neuf mois, le 19 novembre 1845.


[1]  Né en 1747 à Draize et décédé en 1812 à La Neuville-lès-Wasigny.

[2] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.

[3] Archives départementales des Ardennes, 3Q 1300 [série Q = domaines, enregistrement, hypothèques. Sous-série 3Q = enregistrement et timbre, depuis l’an VII.]

[4] Le prénom n’est pas noté dans l’enregistrement. Ce dernier indique que l’acte a été signé auprès du notaire Pottier.


Démolition du moulin à vent de Théophile Boudsocq en 1866. Archives départementales des Ardennes, 3P 369 [série P = finances, cadastre, postes depuis 1800, sous-série 3P = cadastre et remembrement.]
Démolition du moulin à vent de Théophile Boudsocq en 1866. Archives départementales des Ardennes, 3P 369 [série P = finances, cadastre, postes depuis 1800, sous-série 3P = cadastre et remembrement.]

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les moulins traditionnels, qui assurent la fabrication de farine, disparaissent au profit de moulins à vapeur. Ceux-ci s’orientent vers d’autres productions industrielles, comme la fabrication de colorants. Le Moulin à couleurs d’Ecordal[1], fondé en 1866, est le dernier du genre dans les Ardennes.


[1] Actuellement, commune du département des Ardennes, région Grand Est.


Lieu-dit de la Cote du Petit Moulin. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Lieu-dit de la Cote du Petit Moulin. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section B dite de la Bouloie et aux Houïes hautes, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Cette transformation, liée à la révolution industrielle, est majeure. Les moulins traditionnels dépendaient des conditions météorologiques et de la disponibilité de ressources naturelles, telles l’eau. Les moulins industriels produisent quant à eux de manière continue.

Les anciens engrenages en bois sont remplacés par des systèmes en métal, plus durables et puissants. Les meuniers traditionnels, autrefois artisans, voient leur rôle diminuer, face à des ouvriers chargés de superviser des machines dans des usines.


Moulin à vent de Théophile Boudsocq sur la parcelle 285 du cadastre. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.
Moulin à vent de Théophile Boudsocq sur la parcelle 285 du cadastre. Archives départementales des Ardennes, EDEPOT/ROMAGNE[LA]/G 2 [série EDEPOT = archives communales déposées, sous-série EDEPOT/ROMAGNE[LA] = fonds concernant La Romagne ; série G = cadastre, articles G 1-3 = cadastre parcellaire unique et centralisé dit « cadastre napoléonien », cote G 2 = matrice cadastrale des propriétés foncières, 1836-1914], Administration des contributions directes, Cadastre : tableau indicatif des propriétés foncières, de leurs contenances et de leurs revenus : section D dite de la Cour Avril et du Bois Diot, Paris : imprimerie de P. Dupont et G. Daguionie.

Le passage d’une économie rurale et artisanale à une gestion industrielle et urbaine, entraîne des conséquences sur la société et l’environnement. La disparition des moulins à eau et à vent, dans les Ardennes en général, et à La Romagne en particulier, conduit à une transformation des métiers et des terres.

Catégories
Administration communale Agriculteurs Finances publiques Guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697) Guerre franco-espagnole (1635-1659) Impôt Métiers Professions Travailleurs

Les impôts directs à La Romagne avant la Révolution


La circonscription administrative fiscale est l’élection.  Elle regroupe des dizaines, voire quelques centaines de villages. Celle de Reims, dont dépend La Romagne, est créée dès 1357. Elle subit des modifications, en se voyant enlever des paroisses ardennaises lors de la création de celles de Rethel (1450) et de Sainte-Menehould (1635).

Les impôts, à l’origine, ne sont pas permanents, mais accordés pour une période donnée. A partir du XIVe siècle, certains deviennent définitifs. Ils sont fixés en Conseil du roi, et répartis entre les paroisses de la province par l’intendant.

L’impôt direct reste assez stable jusqu’en 1621, avant d’augmenter considérablement à partir de 1626. Les besoins du roi pour les guerres et le développement de l’administration monarchique sont sans cesse grandissants. Ce qu’atteste le quintuplement des dépenses de guerre contre les Habsbourg entre 1599 et 1643.


Or, les revenus du domaine royal[1] sont insuffisants pour faire face, ne serait-ce qu’aux dépenses ordinaires, ce qui aboutit à un empilement de taxes pour les contribuables au cours des siècles.


[1] « Domaine de la Couronne, partie du territoire que le roi possédait en propre, ou sur laquelle il exerçait directement son autorité (on dit aussi domaine royal). », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


Tous les moyens sont bons pour procurer de l’argent au Trésor royal[1]. Outre les divers impôts établis, comme la création en 1674 du droit de timbre sur les actes officiels, Louis XIV multiplie la vente des charges, et taxe les faux nobles. L’usurpation de noblesse est la cause d’une surcharge fiscale pour tous les roturiers.


[1] Lieu où sont versées les sommes qui proviennent des revenus royaux, et d’où sont tirées celles employées au service et aux dépenses de la royauté.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, page non paginée, vue 2/558, consultable en ligne sur Gallica, Hozier, Charles-René, Volumes reliés du Cabinet des titres : recherches de noblesse, armoriaux, preuves, histoires généalogiques. Armorial général de France, dressé, en vertu de l’édit de 1696. X Champagne, 1701-1800, manuscrit en français, 555 pages, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, département des Manuscrits, Français 32237.
Bibliothèque nationale de France, document numérique, page non paginée, vue 2/558, consultable en ligne sur Gallica, Hozier, Charles-René, Volumes reliés du Cabinet des titres : recherches de noblesse, armoriaux, preuves, histoires généalogiques. Armorial général de France, dressé, en vertu de l’édit de 1696. X Champagne, 1701-1800, manuscrit en français, 555 pages, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, département des Manuscrits, Français 32237.

Dans chaque province, à partir de 1696, est lancée la recherche des usurpateurs de titre de noblesse[1], qui bénéficient ainsi d’exemptions fiscales. Ceux qui se déclarent nobles doivent apporter les preuves de leur noblesse, afin d’échapper à cette taxe. Nombre d’entre eux sont inquiets, car tous n’ont pas les documents requis pour l’établir, et c’est une agitation de plus dans un pays troublé.


[1] Déclaration du roi pour la recherche des faux nobles du 4 septembre 1696, qui fait suite à la grande enquête sur la noblesse de 1666, et qui débouche sur la parution de l’Armorial général de France, dit « Armorial d’Hozier ». Pour les Ardennes, voir Bibliothèque nationale de France, document numérique, page non paginée, vue 1/558 et suivantes, consultable en ligne sur Gallica, Hozier, Charles-René, Volumes reliés du Cabinet des titres : recherches de noblesse, armoriaux, preuves, histoires généalogiques. Armorial général de France, dressé, en vertu de l’édit de 1696. X Champagne, 1701-1800, manuscrit en français, 555 pages, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, département des Manuscrits, Français 32237.


L’impôt de la taille, créé au XIVe siècle, ne devient pérenne qu’à partir du XVe siècle, à la suite de la permanence de l’armée sous Charles VII. Il n’est pas dû individuellement par les habitants, mais collectivement par une paroisse. C’est un impôt de répartition, pour lequel il existe deux catégories : la taille personnelle[1], pratiquée surtout dans le Sud de la France (par exemple le Languedoc), et la taille réelle[2], concernant plutôt les régions du Nord.


[1] Elle était « celle qui était levée sur chaque personne taillable. », et la taille réelle, « celle qui était levée sur les terres », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[2] Elle est fondée sur l’appréciation de la richesse en terres du chef de famille.


C’est à cette dernière qu’est soumis le village de La Romagne. La taille est levée chaque année, en tenant compte de tous les types d’activités. Elle varie considérablement, en fonction de la nécessité pour le roi de rétablir les finances. Les aménagements obtenus par Terwel[1] sont de très courte durée.


[1] Auteur de notices cadastrales sur les villages de la frontière de Champagne en 1657.


Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2181 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2181 = liasse, 12 cahiers in-4°. Voir aussi Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2182 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2182 = liasse, 11 cahiers in-4°.
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2181 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2181 = liasse, 12 cahiers in-4°. Voir aussi Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2182 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2182 = liasse, 11 cahiers in-4°.

Dès 1660, dans presque toutes les paroisses, le montant des tailles augmente, et ce, jusqu’en 1664[1]. Les villages sont pressurés, alors que ces années-là sont les premières d’une paix longtemps attendue avec l’Espagne[2]. La somme demandée pour l’ensemble de l’élection de Reims en 1660 se monte à 208 595 livres de principal[3].


[1] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2182 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2182 = liasse, 11 cahiers in-4°. – 1662-1672. – Election de Reims : taille et accessoires. – Assiette et département des tailles et accessoires pour les années 1662, 1664 à 1669 et 1671 à 1672 par les intendants Daniel Voysin en 1662, Lambert d’Herbigny en 1665, Lefèvre de Caumartin de 1666 à 1671. – Etat des sommes restant dues en 1665 sur le taillon imposé en 1656.]

[2] La guerre francoespagnole a eu lieu du 19 mai 1635 au 7 novembre 1659.

[3] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2181 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2181 = liasse, 12 cahiers in-4°. – 1625-1660. – Election de Reims : taille et accessoires. – Assiette et département des tailles, crues, accessoires et taillon à lever sur les communautés de l’élection en 1625. – Registre et département des tailles, taillon, crues des garnisons et autres crues, droits d’officiers et autres à lever sur l’élection pendant l’année 1628. – Département de la taille en 1634, du taillon en 1649. – Etat des deniers dus par les paroisses de l’élection et dont il n’a pu être fait recouvrement en 1652 à cause des guerres et de l’abandon de la plupart de ces paroisses : la somme totale s’élève à 89 042 livres 11 sols 6 deniers. – Assiette et département des tailles de 1658, 1659 et 1660 par Daniel Voysin, « intendant de la justice, police et finances et armées de S. M. en la province de Champagne ». – Extrait de l’état du roi contenant les sommes à lever sur les paroisses de l’élection pour la subsistance des gens de guerre pendant les cent cinquante jours du quartier d’hiver de l’année 1660.]


Les guerres suspendent la perception des impôts, mais ne l'annulent pas. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2181 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2181 = liasse, 12 cahiers in-4°.
Les guerres suspendent la perception des impôts, mais ne l’annulent pas. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2181 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488 = élections, cote C 2181 = liasse, 12 cahiers in-4°.

Il est très difficile pour la population de faire face à ces impôts, après les ravages des guerres. Pour ceux qui ne peuvent pas les payer, il est interdit en 1663 de saisir les chevaux, les instruments, et outils agricoles, car cela renforcerait la pauvreté. Si les tailles sont réduites momentanément après les premières années du règne de Louis XIV, cela ne dure pas.

En janvier 1678, Thomas Hue de Miromesnil[1] (1634-1702) fait remarquer que l’élection de Reims est une des trois juridictions les plus chargées en impôts, que le nombre de pauvres s’accroît de jour en jour, au point que la taille se paie très difficilement, car la circonscription est loin d’être remise de la guerre[2].


[1] Intendant de Châlons, c’est-à-dire, selon le titre officiel, « commissaire départi en la province de Champagne ».

[2] Archives nationales, G7 224 [série G = administrations financières et spéciales, sous-série G7 = contrôle général des finances, fonds G7 71-531 = lettres originales adressées au contrôleur général des finances par les intendants des généralités. 1678-1747, articles G7 223-238. Champagne (Châlons-sur-Marne). 1677-1738.]


Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV 5957,
Duplessis Joseph Siffred (1725-1802), Jacques Necker (1732-1804), directeur général des Finances, huile sur toile, XVIIIe siècle, notice descriptive consultable en ligne sur le site de l’agence photographique GrandPalaisRmnPhoto, édité par la Réunion des musées nationaux (France).
Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV5957,
Duplessis Joseph Siffred (1725-1802), Jacques Necker (1732-1804), directeur général des Finances, huile sur toile, XVIIIe siècle, notice descriptive consultable en ligne sur le site de l’agence photographique GrandPalaisRmnPhoto, édité par la Réunion des musées nationaux (France).

Il faut attendre Necker (1732-1804), et ses analyses des finances de la France, pour que l’augmentation de ce plus ancien impôt direct soit désormais dûment enregistrée par une loi. Jusqu’alors, elle pouvait être décidée à l’aide d’un simple arrêt du Conseil du roi, et présentait de fait un caractère plus arbitraire. La baisse de cette imposition n’arrive qu’à la suite des efforts faits par Colbert (1619-1683) pour réduire les tailles du royaume.

Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV7403,
Franque Jean-Pierre (1774-1860) ; Nanteuil Robert (1623-1678) [d'après], Jean-Baptiste Colbert (1619-1683), représenté en 1676 (dans un encadrement décoratif), huile sur toile, 1839, notice descriptive consultable en ligne sur le site de l’agence photographique GrandPalaisRmnPhoto, édité par la Réunion des musées nationaux (France).
Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV7403,
Franque Jean-Pierre (1774-1860) ; Nanteuil Robert (1623-1678) [d’après], Jean-Baptiste Colbert (1619-1683), représenté en 1676 (dans un encadrement décoratif), huile sur toile, 1839, notice descriptive consultable en ligne sur le site de l’agence photographique GrandPalaisRmnPhoto, édité par la Réunion des musées nationaux (France).

En réalité, il est plus juste de parler des tailles au pluriel que de la taille au singulier, puisque cet impôt se compose de plusieurs éléments : la taille proprement dite, le taillon[1] de la gendarmerie, la taille pour la solde des officiers des maréchaussées, et celle pour les étapes des gens de guerre.


[1] « Imposition de deniers, qui se levait anciennement de la même manière que la taille, et qui en était comme un supplément. Receveur général, receveur particulier du taillon. Le taillon était affecté au payement de la gendarmerie. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


L’année fiscale commence au premier octobre. Au mois de février, le Conseil du roi détermine la somme à imposer pour l’année suivante, et la répartit entre les généralités des pays d’élection. Fin juin, deux extraits établis par le contrôleur général sont adressés à l’intendant et aux officiers du bureau des finances.


Le premier répartit la somme due par sa province entre les différentes élections. Après contrôle, l’intendant, renseigné par ses subdélégués (en contact permanent avec la population) procède au département[1] des tailles entre les divers villages et villes.

Il peut ainsi tenir compte d’événements ponctuels comme les inondations, les sécheresses, les grêles, les circonstances personnelles (état de santé ou nombre et âge des enfants) et ajuster au mieux l’impôt.


[1] « XIIe siècle, au sens d’action de partager ; XVIIIe siècle, comme terme du vocabulaire administratif. Dérivé de départir, au sens de partager. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


C’est ainsi que, dans le cas d’incendies ou de dégâts dus à des orages, plusieurs habitants de La Romagne, de Rocquigny et de Saint-Jean-aux-Bois[1] obtiennent une remise ou une dispense de leur imposition, en raison de la perte de leur maison, grange, meubles, vêtements, chevaux, charrettes, charrues, foin, etc.

On peut citer le cas de très pauvres habitants, qui ont besoin de soulagement. Ou encore, une inondation en 1784 à Château-Porcien, qui a valu aux réfugiés d’être nourris et logés par d’autres habitants[2].


[1] Villages du département des Ardennes.

[2] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 953 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 749-1157 = finances, impositions, aides et gabelles, eaux et forêts, monnaies, postes et messageries, traites foraines, cote C 953 = portefeuille. – 175 pièces, papier. – 1757-1788. – Remises, décharges et modérations. – Requêtes en décharge d’impositions, avec pièces à l’appui, adressées à l’intendant et classées par élections. – Election d’Epernay : Mancy (1777-1785). – Mareuil-le-Port (1774). – Mareuil-en-Brie (1785-1788). – Mareuil-sur-Ay (1785-1786). – Mareuil-sous-Châtillon (1773). – Monthelon (1785-1788). – Montmort (1772-1787). – Moslins (1785-1787). – Moussy (1772). – Passy-Grigny (1787-1788). – Pierry (1775-1776). – Plivot : requête des habitants disant « que depuis plusieurs années ils n’ont rien récolté en différents cantons de leur prairie désolés par la grande sécheresse et surtout par des insectes qui se couloient entre deux terres, coupant entièrement les racines des herbes, de sorte que la surface de leurs héritages étoit soulevée ; que les débordements des eaux en l’’hiver dernier ont absolument enlevé le gazon de leur prez, en ont creusé plusieurs jusqu’à en arracher les bornes et à recombler les troux des autres servant de limites » (1786). – Saint-Gemme (1785). – Soilly (1773-1788). – Tauxières (1786-1788). – Tours-sur-Marne (1785-1788). Trépail (1778-1787). – Troissy (1784-1787). – Vandières (1757). – Vouciennes : requête des habitants surchargés de taxes ; « ces malheureux n’ont pu, quoiqu’ils ayent fait tous leurs efforts, s’acquitter des tailles, vingtièmes et impositions : ils en redoivent encore des sommes considérables sur les années 1780, 1781, 1782, 1783 et 1784… les frais qu’on leur fait ne font qu’augmenter leurs charges » (1784). – Vaudancourt (1772-1786). – Vaudemange ; requête des habitants « disant que l’hiver de 1784, la grande abondance de neige, en fondant, a produit une grande abondance d’eau qui a causé un très grand dommage : les grains des terres hautes et moyennes ont été ravinés et déracinés ; les terres des lieux plats sont entraînées par les eaux ou recouvertes de mauvaise terre, et les terres qui étaient pour ensemencer ont été pareillement dégradées, ce qui a ôté toutes les espérances des cultivateurs » (1785). – Venteuil (1772-1786). – Verneuil (1771-1788). – Ville-en-Selve (1787-1788). – Ville-en-Tardennois : requête des habitants « disant qu’il a plu au roi de leur faire une remise d’une somme de quatre-vingt-six livres pour être répartie au marc la livre sur tous les contribuables à la taille, comme cela s’est pratiqué dans toutes les paroisses de votre généralité ; mais ils n’ont jamais été plus surpris que d’apprendre que cette somme a été répartie, il y a environ trois mois, sur 25 particuliers de la paroisse et de ladite ville, sans que le collecteur ni aucune autre personne leur ait fait part de cela, sinon il y a huit jours qu’à force de plaintes, le collecteur, semble-t-il par une grâce spéciale, a annoncé à la porte de l’église ce bienfait de S. M. Les suppliants auroient bien moins lieu de plainte si on avoit rejeté cette somme sur tous les pauvres, mais au contraire, il semble qu’on se soit étudié à la répartir sur ces 25 particuliers des plus riches de la paroisse » (1786-1787). – Vinay (1785-1786). – Vincelles : requête des habitants au roi demandant la remise des impôts pour l’année ou un temps suffisant pour les payer (1784).]


Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Chaque paroisse est ensuite informée de son imposition par son receveur des tailles. Les collecteurs, solvables, sont élus le premier dimanche de septembre. Ils sont chargés de la répartition de l’impôt auprès de chaque foyer, puis de sa perception.

Ils changent chaque année, et peuvent être poursuivis pour prévarication[1], si une plainte est portée contre eux. Les sommes qu’ils touchent sont variables : ainsi, en 1602, ils reçoivent vingt deniers par livre perçue, alors qu’en 1620, ils n’en obtiennent que huit, et plus que six en 1626.


[1] « Manquement d’un homme d’État, d’un élu, d’un agent public aux devoirs de son mandat, de sa charge ; faute grave commise à des fins d’intérêt personnel dans l’exercice de ses fonctions. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


En-tête du rôle de La Romagne (Ardennes) en 1762. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
En-tête du rôle de La Romagne (Ardennes) en 1762. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

D’après le rôle de 1750[1], le système change : un édit permet désormais aux intendants de nommer des commissaires au lieu de collecteurs pour asseoir[2] la taille, et la récolter chaque fois que le besoin s’en fait sentir. Ainsi, en 1762, le rôle[3] est tenu par Jean Sollette, commissaire nommé par l’intendant de Champagne.


[1] Il n’existe aucun rôle conservé entre 1742 et 1750, si bien qu’il n’est pas possible de dater plus précisément le passage des collecteurs aux commissaires à La Romagne.

[2] C’est-à-dire établir la base de l’imposition.

[3] « Ce qui sert de support à un écrit officiel ; cet écrit lui-même. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Les plus anciens rôles concernant La Romagne sont établis par ordre alphabétique des prénoms, ou par noms de famille. Jusqu’en 1752, ils ne concernent que les tailles.  A partir de cette date, apparaît le détail de la capitation, auquel s’ajoutent en 1771 les quartiers d’hiver.


Liste des contribuables de La Romagne (Ardennes) par ordre alphabétique des prénoms sur le rôle de 1762. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Liste des contribuables de La Romagne (Ardennes) par ordre alphabétique des prénoms sur le rôle de 1762. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Ainsi, les collecteurs répartissent le « tant pour la taille », le « tant pour leurs six deniers », le montant de l’ustensile[1] (levé uniquement en temps de guerre) et celui des quartiers d’hiver.


[1] « Ensemble des fournitures dues à la troupe par les gens qui la logeaient et, par extension, impôt établi par addition à la taille pour tenir lieu desdits fournitures [et services]. », selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales.


La perception provoque parfois des heurts importants avec les villageois, si ceux–ci estiment être défavorisés par rapport à d’autres. Ils discutent alors la quote-part attribuée, ou dénoncent de trop fortes pressions du collecteur pour recouvrer l’impôt.


Ce dernier est responsable de la rentrée de l’argent, et doit combler personnellement tout déficit. Parfois, devant la mauvaise volonté de certains à payer, il peut avoir recours à des garnisaires[1].

Ces hommes, recrutés par les receveurs et envoyés ensuite, soit chez le collecteur, soit chez le contribuable, exercent une pression pour le règlement des dettes. L’un ou l’autre doit le feu et le logement, et cette présence accélère assez souvent le paiement de l’impôt.


[1] « Celui qu’on établissait chez un contribuable en retard pour le contraindre à s’acquitter, chez un débiteur pour garder les meubles saisis, ou chez les parents d’un jeune homme qui ne s’était pas présenté pour la conscription. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


Par sa place, le collecteur s’attire souvent des ennemis, et subit les pressions de gens influents, et ce, d’autant plus qu’il est démuni de toute autorité. Cependant, à la sortie de sa charge, et pendant les trois années qui suivent, il ne peut pas être imposé à un taux supérieur à celui de l’année précédant son entrée en poste, sauf si l’on peut prouver sa malhonnêteté.

Une plainte est ainsi déposée contre les collecteurs Jean Millet et Jean Courtois, car ils sont accusés d’avoir sous-estimé leur propre cotation, et probablement d’avoir favorisé, ou mal coté, deux contribuables, les veuves Langlet et Deschamps. Ils comparaissent le 15 mai 1737. L’année suivante, Jean Millet doit s’acquitter d’une somme supplémentaire de 12 livres. Elle est de 6 livres pour Jean Courtois, tandis que la veuve Langlet se voit réclamer 10 sols, et la veuve Deschamps 20 sols[1].


[1] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin. – 1774-1790. – Election d’Epernay : requêtes en décharge de taille adressées aux élus et classées par ordre alphabétique de communautés. – Ambonnay (1789) ; Anthenay (1785) ; Athis (1781-1787) ; Avenay (1786-1787), Avize (1789) ; Ay (1774-1788) ; J.-B. Georges, syndic de la communauté, demande à être exempt de la collecte : accordé (1775). – Baslieux (1789) ; Belval (1784-1785) ; Binson-Orquigny (1784-1789) ; Boursault (1782). – Champillon (1782-1785) ; Champvoicy (1784-1788) ; Châtillon-sur-Marne (1783-1789) ; Cherville (1789) ; Chouilly (1782-1788) ; Condé-sur-Marne (1787-1788) ; Courthiézy (1787) ; Cuis (1782-1785) ; Cumières et Mardeuil (1786). – Damery (1782-1788) ; Dizy (1782-1789) ; Dormans (1780-1790).]


En-tête du rôle de 1702 de La Romagne (Ardennes) avec le cachet de la généralité de Châlons. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
En-tête du rôle de 1702 de La Romagne (Ardennes) avec le cachet de la généralité de Châlons. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

L’analyse approfondie des rôles[1] des années 1702,1712, et 1752[2] permet de déceler un certain nombre de changements dans la population.


[1] Ibidem. [Nota bene : le cadre de classement des archives départementales de la Marne ne décrit pas de façon exhaustive toutes les pièces incluses sous la cote C 2169.]

[2] Le rôle de 1702 analysé ci-dessus a été choisi car il est le premier conservé pour La Romagne. Bien que d’autres registres ultérieurs aient été consultés aux archives départementales de la Marne, la méthodologie a consisté à privilégier un sondage des années 1702, 1712 (une décennie après) et 1752 (un demi-siècle après). Ce choix, qui pourrait paraître arbitraire, peut s’expliquer : 1712 est la première année documentée après le grand hiver de 1709. Et le système d’imposition change trop dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle pour qu’une comparaison puisse être établie après 1752. Il faut peut-être ajouter que l’état de conservation de certains documents a pu les rendre moins exploitables. Le corpus choisi a fait l’objet d’un dépouillement systématique (par nom, métier, et taille).


Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Le rôle de 1702 met en lumière la diversité des activités et des situations parmi les trois exemptés[1] (le seigneur de La Romagne, le marquis de Chaumont ; le curé de la paroisse Norbert Deheaulme ; Firmin Canel, écuyer dans les chevau-légers de la garde) et les soixante contribuables, dont quatorze laboureurs, huit tireurs de mines, neuf manouvriers, deux tisserands en toile et un peigneur de laine, deux scieurs de long, un meunier, un fruitier, un berger, un maître d’école, un hautelain[2], un mandelier[3], un couvreur en paille, un savetier[4].


[1] Les nobles, le curé du village et son vicaire (quand il y en a un), et ceux qui ont été au service du roi dans ses armées, sont dispensés du paiement de la taille.

[2] Variante orthographique d’hôtelain, c’est-à-dire aubergiste, cabaretier, hôtelier, hôte, celui chez qui on loge.

[3] « Celui qui fabrique et vend des mandes, des paniers, vannier », selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales.

[4] « Artisan qui raccommodait les souliers. », selon le Dictionnaire de l’Académie française. A distinguer du sabotier, qui est, lui, un « fabricant ou marchand de sabots. »


Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1702. La dégradation du document entraîne une perte d'information. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1702. La dégradation du document entraîne une perte d’information. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Quatre métiers ne sont pas précisés. Une femme célibataire est répertoriée, Marguerite Cornu. Dix veuves sont décomptées. La plus forte cotisation (55 livres) est celle de Pierre Leblanc, laboureur en propre et en cense. La plus faible est celle d’un habitant dont le nom est resté illisible à cause d’un bas de page déchiré, mais qui cotise 8 sols. L’assiette de la taille est de 548 livres et 15 sols. Le document est établi le 27 décembre 1701 pour un paiement en 1702.


Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Le rôle de 1712 ne montre plus que cinquante-trois contribuables et deux exemptés. Le premier est le curé Louis Potin, et le second, qualifié de « soi-disant exempt des impositions[1] », est le sieur Devie de La Horgne, lieutenant de cavalerie. L’assiette de la taille est de 429 livres 2 sols 6 deniers. Le document est établi le 6 janvier 1712 pour un paiement en 1712.


[1] L’orthographe a été modernisée.


Il n’y a plus de tireurs de mines, et il ne subsiste qu’un tisserand. L’extraction du fer et la filière de la laine semblent des secteurs en déshérence.


Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1712. L'humidité favorise le développement de certains champignons. Le papier en a gardé des traces. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1712. L’humidité favorise le développement de certains champignons. Le papier en a gardé des traces. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Désormais, seuls restent onze laboureurs, certains ayant changé de statut pour celui de manouvriers. Désormais, ces derniers sont au nombre de quinze. Les deux scieurs de long continuent d’exercer.

Sont également notés un maréchal-ferrant, un meunier, un berger (identifié comme pauvre), un maître d’école, un garde[1], trois fruitiers, et un boucher. Jean Foulon et Pierre Cocu n’ont pas de mention de métier. Onze veuves sont dénombrées. Une célibataire est recensée, Madeleine Mallet.


[1] Sous réserves, cela pourrait correspondre à un garde des bois et forêts particulier.


Le veuvage des femmes marque une hausse entre 1702 et 1712. D’autre part, une nouvelle classe apparaît dans les rôles, celle des mendiants : le terme désigne, non celui qui vit de mendicité, mais un homme pauvre, qui n’a pas de réserves, qui est très vulnérable en raison de la maladie, du chômage ou de la cherté des grains.

Une livre = vingt sols.

Cela n’empêche pas de lui prélever quelques sous malgré son statut. Ainsi, Martin Mauroy, qualifié de mendiant, doit-il payer 30 sols, soit une livre et 10 sols, en 1712. Gilles Antoine, répertorié lui comme pauvre, s’acquitte pour sa part de 20 sols, soit une livre.

Un sol = douze deniers.

Cette situation des veuves, des pauvres et des mendiants à La Romagne est sans doute liée à l’influence du grand hiver de 1709, qui a accru la pauvreté, avec une sous-alimentation des Romanais, et une plus grande mortalité.

Rôle de la taille à La Romagne (Ardennes) en 1727. Certains insectes (termites, vrillettes, poissons d'argent, etc.) creusent les documents et en rendent la lecture difficile. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Rôle de la taille à La Romagne (Ardennes) en 1727. Certains insectes (termites, vrillettes, poissons d’argent, etc.) creusent les documents et en rendent la lecture difficile. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Le rôle de 1752 atteste que la population a de nouveau augmenté. Il y a désormais quatre exemptés : Monsieur de la Motte Houdancourt ; monsieur du Merbion, officier de milice ; monsieur d’Avançon, officier réformé ; le prieur.

Les exemptés de la taille à La Romagne (Ardennes) d'après le rôle de 1752. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Les exemptés de la taille à La Romagne (Ardennes) d’après le rôle de 1752. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

S’y ajoutent soixante-quinze contribuables, dont vingt laboureurs et vingt-trois manouvriers, trois forains[1] et cinq de droits de suite[2], un tailleur, un maréchal-ferrant, deux pâtres, un cabaretier, un maître d’école, un sabotier.


[1] « Propriétaire forain, qui ne réside pas dans le lieu où sont situés ses biens et où il paie l’impôt. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[2] Le droit de suite permet à un créancier de poursuivre un bien en quelque main qu’il se trouve.


Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1752. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]
Rôle de La Romagne (Ardennes) en 1752. Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 2169 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 2099-2488, élections, cote C 2169 = liasse. – 185 pièces, 1 parchemin.]

Quatre femmes sont célibataires. Les veuves sont au nombre de treize, dont une insolvable. Quant aux veufs, ils ne forment pas une catégorie à part, leur état étant signalé en même temps que leur activité. La Romagne en compte trois. L’assiette de la taille est de 599 livres 5 sols. Le document est établi le 22 décembre 1751 pour un paiement en 1752.


La politique royale a recours presque systématiquement à la belligérance pour consolider les positions de la France. De 1688 à 1697, la guerre de la Ligue d’Augsbourg[1] est la cause de ponctions fiscales de plus en plus fortes.

Celles-ci sont destinées, d’une part, aux cavaliers et fantassins préposés à la garde de la rivière Meuse et, d’autre part, aux appointements des officiers et des soldats, à leur habillement, à l’armement et au fourrage.


[1] Aussi désignée comme guerre de Neuf Ans, guerre de la Succession palatine, guerre de la Grande Alliance, campagnes du Palatinat, elle est nommée guerre de Succession d’Angleterre ou guerre du roi Guillaume par les historiens britanniques.


La Romagne[1], comme Herbigny ou Wasigny est rattachée au 13e poste de Maubert-Fontaine, sur la ligne de défense depuis Charleville jusque Signy-le-Petit[2].


[1] Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 2007-53877, Desbrière, Michel, Chronique critique des lignes de défense de la Champagne septentrionale 1644-1748, Charleville-Mézières : Éditions Terres ardennaises, 2003, 314 p., p. 247.

[2] Tous ces villages se trouvent dans le département des Ardennes.


Au départ, la fourniture de l’ustensile comprend la place au feu et à la chandelle[1], avec fourniture du sel, du vinaigre et d’autres menues denrées, le prêt des objets de cuisine, le coucher, ainsi que l’avance de la subsistance et du fourrage pour les chevaux.


[1] C’est-à-dire le chauffage et l’éclairage.


Cet impôt se paie sur cinq mois à compter du 1er décembre. En 1655, cette obligation est convertie en une somme d’argent. Un siècle plus tard, l’intendant de Champagne Pelletier de Beaupré[1] donne des instructions concernant les dispenses de paiement d’ustensile.

Elles précisent que, si une exemption individuelle est accordée, la somme due par l’ensemble de la paroisse ne peut en aucun cas être diminuée. Si bien que la répartition s’applique à ceux qui ne sont pas dispensés :  leur participation est augmentée d’autant[2].


[1] Il est intendant de la généralité de Champagne de 1739 à 1750.

[2] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 791 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 749-1157 = finances, impositions, aides et gabelles, eaux et forêts, monnaies, postes et messageries, traites foraines, cote C 791 = portefeuille. – 3 cahiers in-fol. – 1787. – Tarif pour la répartition de la taille de 1788 dans les villes, bourgs et communautés de l’élection de Chaumont-en-Bassigny, classées par ordre alphabétique depuis Germizey jusqu’à Voucourt (un premier cahier manque). Le tableau consacré à chaque localité contient les mêmes renseignements statistiques et autres énumérés dans l’article précédent : le nom du seigneur, ceux des commissaires de la taille des trois dernières années, le taux de la taille de l’année précédente au marc la livre de la propriété et de l’exploitation réunies ; celui des impositions accessoires et de la capitation ; la mesure du lieu pour les biens fonds ; la mesure, le poids et le prix des différentes espèces de grains ; le tableau du territoire de la communauté divisé en exploitation des privilégiés, des taillables et biens incultes ; la consistance des usages communaux ; l’extrait en ce qui concerne la communauté du dénombrement général de 1774 (habitants et bestiaux) ; le montant de la taille de chacune des dix dernières années ; le chiffre proposé par l’élection et celui qui est arrêté par l’intendant pour l’année 1788.]


Les quartiers d’hiver sont destinés au logement des troupes durant la trêve hivernale. Ils pèsent lourdement sur la population. En 1727, la généralité de Châlons se doit de fournir la somme de 476 779 livres.

Ce dû est réparti entre toutes les élections, dont celle de Rethel pour 58 467 livres, et celle de Reims pour la somme de 88 689 livres[1]. A charge pour ces deux circonscriptions d’exiger à leur tour ces sommes de chacune des paroisses sur lesquelles s’exerce leur tutelle.


[1] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 1117 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 749-1157 = finances, impositions, aides et gabelles, eaux et forêts, monnaies, postes et messageries, traites foraines, cote C 1117 = portefeuille. – 59 pièces, 8 parchemins. – 1703-1775. – Impositions militaires : ustensile, fourrage et quartier d’hiver. – Lettre du roi à l’intendant de Champagne d’Harouys fixant le chiffre de l’ustensile et réglant le mode de recouvrement pour 1704 (1703). – Fixation de l’ustensile à payer par les villes de la généralité de Champagne en 1708 : la somme s’élève à 110 000 livres. – Département du quartier d’hiver par élections et paroisses : élections de Bar-sur-Aube, Chaumont, Epernay, Joinville, Rethel, Sainte-Menehould, Sézanne et Vitry (1704) ; de Châlons (1711-1712) ; de Joinville et Troyes (1716-1717) ; d’Epernay, Sainte-Menehould et Sézanne (1718). – Arrêts du Conseil fixant l’imposition à lever en Champagne pour le quartier d’hiver et l’habillement de la milice : la somme s’élève en 1727 à 476 779 livres 18 sols 3 deniers ; en 1730 à 330 954 livres 13 sols 6 deniers ; en 1762 à 573 430 livres 19 sols 9 deniers. – Demandes d’exemption de l’ustensile classées par communautés. – Châlons : Beschefer et Charruel, officiers de feue madame ; lettre de d’Argenson à l’intendant Le Pelletier de Beaupré en leur faveur (1734). – Fismes : Billet, substitut du procureur du roi au bailliage (1742). – Langres : les échevins de la ville (1735). – Reims : les bailli et procureur fiscal de l’archevêque ; 2 lettres de l’archevêque Armand-Jules de Rohan à l’intendant pour lui recommander la requête et le remercier d’y avoir fait droit (1734) ; Bernard, professeur à la faculté de médecine (1734). – Liste envoyée à l’intendant de Champagne par les échevins de Reims avec prière de leur faire savoir si les personnes y dénommées doivent être sujettes à l’ustensile ; observations de l’intendant Le Pelletier de Beaupré en réponse (1734). – Ordonnance de l’intendant Le Pelletier assujettissant à l’ustensile les officiers des traites foraines de Reims (1744). – Sainte-Menehould : Delavaux, substitut du procureur du roi au bailliage et prévôté (1734).]


La capitation est un autre impôt personnel, établi sur la fortune de chacun. A l’origine, c’est un impôt temporaire (qui se prélève par tête, comme son nom l’indique), destiné à soutenir l’effort de guerre.

Créée par la déclaration du 18 janvier 1695, elle taxe chaque feu sans exception (à moins d’indigence déclarée), d’après son état financier, et selon un tarif qui comporte vingt-deux classes.


Supprimée peu de temps après, elle est rétablie en 1701 de façon systématique. Très rapidement, un système d’abonnement ou de rachat enlève à cet impôt son caractère d’égalité. Le clergé le rachète d’abord par un « don gratuit ».

Puis il s’en affranchit complètement en 1710, en payant six fois la valeur de ce « don ». On nomme des membres de la noblesse, comme le marquis d’Ambly en 1716, pour assurer la répartition de la capitation dans les bailliages de Rethel et de Reims[1].


[1] Archives départementales de la Marne, site de Châlons-en-Champagne, C 969 [série C = administrations provinciales. – Intendances, subdélégations, élections et autres divisions administratives ou financières, bureaux des finances, états provinciaux, principautés, régences, etc., articles C 749-1157 = finances, impositions, aides et gabelles, eaux et forêts, monnaies, postes et messageries, traites foraines, cote C 969 = portefeuille. – 151 pièces, papier. –  1718-1787. – Capitation de la noblesse : commissaires chargés de travailler à la répartition. – Circulaires annuelles de l’intendant aux commissaires de la noblesse (1769-1787). – Envoi à l’intendant des lettres de cachet portant nomination des commissaires dont les noms suivent : Louvergny et Sugny (1720) ; comte de Dampierre (1724) ; marquis de Sommeyèvre (1724) ; Dey de Séraucourt (1724) ; Saint-Eulien et Pavant (1726) ; Saint-Eulien (1729) ; Féret (1733) ; Mondéjeux (1736) ; comte de Wignacourt (1740) ; Féret (1742) ; Mesgrigny (1743) ; comte de Gizaucourt (1744) ; comte de Nettancourt (1744) ; Godet de Vadenay (1745) ; marquis de Pleurre (1749) ; marquis de Villennes (1750) ; Féret (1753) ; Godet de Crouy (1753-1766) ; Capy d’Hoiry, Hocart et Renneville (1767) ; marquis d’Ambly (1770-1777) ; Hocart fils (1774) ; Gizaucourt fils (1774-1787) ; comte de Pleurre (1776-1787) ; Béguin de Savigny et Rémont de Saint-Loup (1777-1784) ; marquis de Bienville (1782) ; Cappy fils (1784).]


La capitation et les quartiers d’hiver sont établis « au marc la livre[1] » soit, pour la première, 12 sols 10 deniers, et pour les seconds, 12 sols 3 deniers.


[1] « Au marc le franc, se dit, par référence à une ancienne unité de poids, de la manière de répartir ce qui doit être reçu ou payé par chacun, en proportion de sa créance ou de son intérêt dans une affaire. Les créanciers ont été payés au marc le franc. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


A partir de 1710, et pour des périodes plus ou moins longues, sont établis de nouveaux impôts (dixième, vingtième, cinquantième), qui taxent, selon les époques, les revenus.

Cette imposition ne repose pas sur l’ensemble de la population : les nobles en sont dispensés, au nom de l’impôt du sang ; le clergé l’est aussi, pour son rôle spirituel. Seuls les roturiers, artisans, manouvriers, laboureurs y sont soumis, ce qui affaiblit considérablement la province.

Le nombre des exempts et des privilégiés est très grand, et la situation instable de l’époque nuit au commerce et aux cultures, comme le constate l’intendant Larcher[1] dans son Mémoire sur la Champagne[2].


[1] Intendant de la province de Champagne de 1692 à 1699.

[2] Bibliothèque du Sénat, 3FPM0956 [= Ancien 9351 selon une cotation antérieure], numéro de notice 956, Mémoires sur diverses généralités [XVIIIe siècle, manuscrit en français sur papier, 230, 213, et 200 pages, 350 sur 240 mm, reliure en parchemin vert], tome I, Larcher, Michel, Mémoire sur la généralité de Champagne, dressé par M[ichel Larcher], 1695, 230 p.


Cette grande misère est encore soulignée en 1712 par le sieur Galloys, receveur général des finances. Ce dernier demande de soulager la population d’une partie de l’ustensile car, dans la misère où sont les peuples, il ne peut en faire le recouvrement[1].


[1] Archives nationales, G7 236 [série G = administrations financières et spéciales, sous-série G7 = contrôle général des finances, fonds G7 71-531 = lettres originales adressées au contrôleur général des finances par les intendants des généralités. 1678-1747, articles G7 223-238. Champagne (Châlons-sur-Marne). 1677-1738.]


En 1765, des instructions pour la confection des rôles des tailles et de la capitation dans la généralité de Châlons permettent de comprendre comment est établi le montant de ces impôts, d’autant que, depuis cinq ans, le système d’imposition est passé à la taille tarifiée.

Est pris en compte ce qui relève de l’industrie, ou du travail manuel, que ce soit pour les manouvriers ou les artisans. S’y ajoute ce qui est du domaine de la propriété, ou de la location de biens, selon la déclaration royale du 13 août 1765.


L’imposition de l’industrie est réglée sur la base de deux cents jours par an, dont le prix est fixé suivant les différentes vacations ou métiers. Elle concerne les laboureurs n’ayant pas l’emploi d’une charrue toute l’année, les manouvriers et les artisans.

Certaines catégories en sont exemptées, comme les veufs et veuves de plus de soixante ans. Sont également concernées par cette mesure les personnes vivant « bourgeoisement », c’est-à-dire n’effectuant aucun travail mécanique, ainsi que les domestiques célibataires. Des réductions sont consenties aux veufs et veuves de moins de soixante ans.


Les avocats, notaires, procureurs, sergents, praticiens et chirurgiens la payent. Les commerçants (blatiers[1], coquassiers[2], revendeurs, cabaretiers, etc.) sont taxés comme le sont les biens-fonds.


[1] « Revendeur de blé, de grains. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.

[2] « Marchand de beurre, œufs, volailles », selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales.


Les autres immeubles[1] sont constitués de terres de labour, pour lesquelles on paie la taxe d’exploitation, plus la moitié de celle de propriété. Mais pour d’autres, comme les prés, les vignes, les chènevières, la taxe entière de la propriété est payée. Quant aux maisons, moulins et étangs, ces biens voient la taxe diminuée d’un quart, à cause des réparations et de l’entretien nécessaires.


[1] « Se dit d’un bien qui, par nature, ne peut être transporté d’un lieu à un autre. », selon le Dictionnaire de l’Académie française.


La lourdeur de la fiscalité, et les privilèges dont certains bénéficient, expliquent les revendications qui apparaissent dans les cahiers de doléances de 1789.

Catégories
Anciens combattants Guerre mondiale (1939-1945) Militaires Monuments commémoratifs Monuments commémoratifs militaires Patrimoine culturel Patrimoine industriel Religieux Religion Travailleurs Victimes de guerre

Mission historique et mémorielle à Berlin sur les traces de Pierre Bonhomme, natif de La Romagne, prisonnier de guerre dans les Stalags allemands


C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français – exposition temporaire à Berlin du vendredi 28 octobre 2022 au mercredi 31 mai 2023

Edition bilingue allemand-anglais du catalogue offert lors de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l'exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).

Edition bilingue allemandanglais du catalogue offert lors de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l’exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).


Le Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) organise du vendredi 28 octobre 2022 au 31 mai 2023 une exposition trilingue (en allemand, français, anglais) intitulée C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français[1].


[1] Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War.


Vidéo Eröffnung Vergessen und vorbei? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen (C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français), consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit (Centre de documentation sur le travail forcé nazi).

Cette initiative a suscité une mission historique et mémorielle à Berlin et ses environs du dimanche 26 mars au dimanche 2 avril 2023 sur les traces de Pierre Bonhomme, natif de La Romagne, prisonnier de guerre n° 53026 dans les Stalags allemands III A Luckenwalde, , III B Fürstenberg, et III D Berlin. Affecté à l’AKdo 407 (Arbeitskommando[1] n° 407), il a dû travailler sous la contrainte pendant ses cinq ans de captivité.


[1] Commando de travail.


Vidéo Zur Zukunft des historischen Ortes ehemaligen Kriegsgefangenenlager Lichterfelde-Süd (Sur l’avenir du site historique de l’ancien camp de prisonniers de guerre de Lichterfelde-Süd), consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit (Centre de documentation sur le travail forcé nazi).

Partant d’un destin individuel spécifique, la démarche a consisté à développer une méthodologie archivistique et historienne globale pour trouver un prisonnier de guerre français en Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale.

Edition bilingue allemand-français du catalogue offert à la suite de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l'exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).

Edition bilingue allemandfrançais du catalogue offert à la suite de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l’exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).



Entrée des expositions temporaires du Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Entrée des expositions temporaires du Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Ce déplacement a donc compris plusieurs rencontres avec des historiens, archivistes, bibliothécaires, documentalistes, une quête des vestiges de 1939-1945 et des lieux de mémoire, une exploration urbaine[1] de sites abandonnés et en cours de destruction, dont :

  • un entretien personnalisé de deux heures avec Roland Borchers[2] au Centre de documentation du travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) à Berlin-Schöneweide[3], suivi d’une visite privée de la baraque 13[4] et de son abri antiaérien. Une autorisation exceptionnelle de rester sur place après la fermeture du lieu, en présence du seul agent de sécurité, a permis d’effectuer des photographies au milieu des baraquements et des cartels de l’exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ?, à l’exclusion de toute autre personne. Enfin, trois catalogues ont été offerts sur place et un quatrième[5], l’édition bilingue allemandfrançais de l’exposition, a été envoyé par la poste dès sa parution début mai 2023.
  • un trajet à Luckenwalde, à cinquante kilomètres de Berlin[6], avec un passage au musée d’histoire locale (HeimatMuseum) et au cimetière des sépultures de guerre (Friedhof Kriegsgräberstätte) du Stalag III A.
  • un rendez-vous de deux heures au domicile de monsieur Reinhard Pohlke[7] et sa femme madame Annette Pohlke[8], vice-présidente et webmestre de l’association mémorielle Initiative KZ-Außenlager Lichterfelde e.V. (un contact préalable par mail avait été établi avec monsieur Thomas Schleissing-Niggemann, président du conseil d’administration).
  • une rencontre personnalisée de deux heures avec monsieur Christian Kurzweg, archiviste référent, en quelque sorte responsable de l’ORB[9], et une stagiaire en sciences de l’information au service des utilisateurs (Benutzerzentrum) des archives fédérales (Bundesarchiv) de Berlin-Lichterfelde, département du centre de ressources documentaires (Abteilung BE = Bereitstellung)[10].
  • Un déplacement aux archives fédérales (Bundesarchiv) de Berlin-Tegel[11], département des renseignements personnels sur les soldats de la Première et Deuxième Guerre mondiale (Abteilung PA = Personenbezogene Auskünfte zum Ersten und Zweiten Weltkrieg). L’accès direct aux salles de lecture n’ayant pas été possible, le remplissage d’un formulaire administratif en allemand a débouché sur une réponse. Madame Claudia Müller, archiviste référente, fournit la précision suivante : « Les dossiers du Bureau allemand des états de service[12]WASt[13] concernant les anciens prisonniers de guerre français détenus par l’Allemagne ont été saisis en avril 1945 et pris en charge par une commission d’officiers alliés. » Elle renvoie donc au secrétariat d’Etat aux anciens combattants[14] et aux archives des pays d’origine respectifs des prisonniers de guerre. Cet échange de documents sur les prisonniers de guerre est conforme à la convention de Genève.
  • Une action de conservation curative légère[15] sur la plaque commémorative (Gedenktafel) du siège du commandement (Kommandantur) régissant le Stalag III D Berlin aujourd’hui disparu.
  • Une reconnaissance sur le terrain dans le sud-est de Berlin de pistes sur l’Arbeitskommando n°407 (dépendant du Stalag III D Berlin, dans lequel Pierre Bonhomme a été contraint de travailler). La classe 400 le rattachant possiblement à l’arrondissement de Neukölln, les quartiers traversés en priorité ont été Berlin-Britz, Berlin-Buckow, Berlin-Gropiusstadt, Berlin-Neukölln et Berlin-Rudow.
  • La quête d’anciens abris antiaériens dans le sud-est de Berlin[16], dans la mesure où Pierre Bonhomme aurait pu (sous réserves) réaliser des coffrages en bois pour des casemates[17].
  • Un reportage photographique « de guerre » sur les terrains vagues du camp de Berlin-Lichterfelde, patrimoine industriel en péril.

« Les dossiers du Bureau allemand des états de service – WASt concernant les anciens prisonniers de guerre français détenus par l’Allemagne ont été saisis en avril 1945 et pris en charge par une commission d’officiers alliés. »

Madame Claudia Müller, archiviste référente aux archives fédérales de Berlin-Tegel, département des renseignements personnels sur les soldats de la Première et Deuxième Guerre mondiale


[1] Urbex.

[2] Chercheur à l’Institut d’Europe de l’Est de l’Université libre de Berlin (chaire d’histoire de l’Europe centrale et orientale), coordinateur du projet Mémoire et identité en Cachoubie, auteur d’une thèse de doctorat Mémoires du travail forcé : l’exemple de la Pologne.

[3] Schöneweide est le nom simplifié des deux quartiers Berlin-Niederschöneweide et Berlin-Oberschöneweide dans l’arrondissement Treptow-Köpenick de Berlin (Allemagne).

[4] Où des internés militaires italiens et des travailleurs civils ont été hébergés entre 1944 et 1945.

[5] Glauning, Christine 1963- ; Borchers, Roland 1980- ; Stiftung Topographie des Terrors Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit Berlin-Schöneweide ; [et al.], Vergessen und vorbei ? : das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? : the Lichterfelde Camp and the French prisoners of war, édition bilingue allemandanglais Berlin : Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors, 2022, 191 pages, cartes, plans. Glauning, Christine 1963- ; Borchers, Roland 1980- ; Stiftung Topographie des Terrors Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit Berlin-Schöneweide ; [et al.], Vergessen und vorbei ? : das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français, édition bilingue allemandfrançais, Berlin : Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors, 2023, 191 pages, cartes, plans. Glauning, Christine 1963- ; Stiftung Topographie des Terrors Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit Berlin-Schöneweide, Le Travail forcé au quotidien 1938-1945 : catalogue de l’exposition éponyme, édition monolingue en français, Berlin : Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors, 2020, 277 p., cartes, plans. Bücking, Heribert 1940- ; Glauning, Christine 1963- ; Stiftung Topographie des Terrors Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit Berlin-Schöneweide, Die Zwangsarbeit von Zofia und Rolland : Kupferstich-Collagen : eine Begleitbroschüre zur Sonderausstellung im Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit vom 20. Januar 2023 bis 21. Mai 2023, édition monolingue en allemand, Berlin : Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors, 2023, 32 p.

[6] D’où la locution proverbiale « Luckenwalde, Luckenkien, 50 Kilometer vor Berlin ».

[7] Né en 1966, il enseigne dans un établissement secondaire berlinois le latin, le grec, le fait religieux, les technologies de l’information.

[8] Née en 1967, elle a étudié l’histoire, le latin et la théologie protestante à l’Université libre de Berlin. Elle est aujourd’hui enseignante et auteure indépendante.

[9] Orientation et recherche bibliographique.

[10] Finckensteinallee 63, 12205 Berlin.

[11] Am Borsigturm 130, 13507 Berlin.

[12] Deutsche Dienstelle.

[13] Wehrmachtauskunftstelle für Kriegerverluste und Kriegsgefangene = Service de renseignements de la Wehrmacht sur les pertes de guerre et les prisonniers de guerre.

[14] Ce dernier a en fait été intégré au ministère de la Défense et n’existe plus en tant que tel. Les documents remis par l’Allemagne se trouvent donc plutôt au Service historique de la défense, division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC)rue Neuve du Bourg l’Abbé, 14037 Caen cedex. Les Archives nationales possèdent également un fonds sur les prisonniers de guerre français (voir sous-série F9 = affaires militaires et 72AJ = Seconde Guerre mondiale).

[15] Décollage, dans le cadre d’une préservation du patrimoine urbain, des restes d’un autocollant apposé de façon intempestive, et constituant un acte de vandalisme susceptible d’abîmer la surface à terme.

[16] Bunker transformé en Musikbunker, Steinträgerweg 5, 12351 Berlin (Allemagne). Un autre situé Selgenauer Weg, 12355 Berlin (Allemagne) a été intégré dans un projet immobilier.

[17] Ces réduits d’un fort, généralement souterrains, sont à l’épreuve des bombes et des obus.


Les archives fédérales et régionales de Berlin



Les pièces d’archives personnelles antérieures à 1945 sont d’une manière générale conservées aux archives fédérales (Bundesarchiv) de Berlin.

Le Bureau allemand des états de service – WASt, dont les documents étaient conservés initialement aux archives fédérales de Berlin-Reinickendorf[1], a vu le 1er janvier 2019 ses missions intégrées aux archives fédérales de Berlin-Tegel en tant que département des renseignements personnels sur les soldats de la Première et Deuxième Guerre mondiale[2]. Le délai de traitement peut atteindre plusieurs mois avant que la demande n’aboutisse.

Les dossiers médicaux des prisonniers de guerre se trouvaient autrefois à l’Office régional de la santé et des affaires sociales[3] à Berlin. Dans la mesure où cela ne relevait pas vraiment de ses missions, ils ont été transférés le 1e juillet 2007 au Bureau allemand des états de service – WASt, puis à Berlin-Tegel, au titre de son habitude de la gestion des données individuelles.

Le centre de ressources documentaires est pour sa part à Berlin-Lichterfelde, tandis que certains documents concernant l’armée sont aux archives fédérales de Fribourg (Allemagne), département des affaires militaires[4]. Monsieur Daniel Schneider, archiviste référent de cette institution, indique : « Seuls sont conservés les dossiers matériels des institutions allemandes à propos du système des prisonniers de guerre, mais pas les dossiers personnels des prisonniers de guerre. »


« Seuls sont conservés les dossiers matériels des institutions allemandes à propos du système des prisonniers de guerre, mais pas les dossiers personnels des prisonniers de guerre. »

Monsieur Daniel Schneider, archiviste référent aux archives fédérales de Fribourg (Allemagne), département des affaires militaires.


[1] Eichborndamm 179, 13403 Berlin (Allemagne).

[2] PA = Personenbezogene Auskünfte.

[3] Landesamt für Gesundheit und Soziales (LAGeSo), Versorgungsamt – Kundencenter, Sächsische Straße 28, 10707 Berlin (Allemagne).

[4] Bundesarchiv, Abteilung Militärarchiv, Wiesentalstraße 10, 79115 Freiburg (Allemagne).


Il est important d’autre part de ne pas confondre les archives fédérales (Bundesarchiv) et les archives régionales[1] (Landesarchiv) de Berlin. Après la fin de la guerre, les documents que le Bureau allemand des états de service – WASt avait conservés sur les prisonnier de guerre détenus par l’Allemagne ont été confisqués et remis aux pays d’origine des prisonniers de guerre.


[1] Eichborndamm 115-121, 13403 Berlin (Allemagne).


Il est possible de repérer les noms des victimes de guerre sur le portail des Arolsen Archives[1] International Center on Nazi Persecution (archives Arolsen centre international sur les persécutions nazies). Toutefois, il ne s’agit pas d’une requête complète. De nombreux documents conservés ne sont pas encore accessibles en ligne. Il faut donc contacter les archivistes. 50 millions de fiches présentent des informations sur 17,5 millions de personnes. Madame Martina Paul, membre du service international de recherche[2], a ainsi retrouvé et envoyé une fiche de la mission de liaison à Berlin (Français de toutes les zones) concernant Pierre Bonhomme.

Toute demande de renseignements auprès du CICR [3] sur une personne détenue pendant la Seconde Guerre mondiale relève d’un quota trimestriel. Le service reprendra le lundi 22 mai 2023, puis le lundi 25 septembre 2023 à 8 h 00 heure de Genève (Suisse).


[1] Große Allee 5-9, 34454 Bad Arolsen.

[2] ITS = International Tracing Service/ Service international de recherches se présente depuis le 21 mai 2019 sous son nouveau nom.

[3] Comité international de la Croix-Rouge.


Le Stalag III A Luckenwalde, le musée d’histoire locale et le cimetière des sépultures de guerre


A Luckenwalde, il ne subsiste plus aucun vestige matériel du camp, si ce n’est le cimetière des sépultures de guerre (Friedhof Kriegsgräberstätte) du Stalag III A Luckenwalde[1], divisé en plusieurs carrés selon la nationalité des prisonniers enterrés. Nombreux sont ceux qui ont été inhumés dans des fosses communes (en particulier des Russes[2]). Une croix est élevée, et marque à tout jamais l’emplacement de la partie française du cimetière.  Chaque année se déroule une cérémonie du souvenir.


[1] Zum Stalag-Friedhof, 14943 Luckenwalde.

[2] A cette époque, tous les Russes sont des Soviétiques, mais tous les Soviétiques ne sont pas des Russes. L’appellation retenue ici est celle qu’employaient les prisonniers de guerre.


Un poste de travail permet de consulter des dossiers d’archives. Sur un écran interactif, il est possible de feuilleter plus de 9 000 documents concernant 3 900 détenus russes du camp.


Le Stalag III A se situait à 2,5 km de Luckenwalde, ville de 27 000 habitants à quelque 50 km du sud de Berlin dans la 3e région militaire allemande[1], dans la région de la Fläming, au cœur du Land[2] de Brandebourg. C’est une région montueuse, argileuse et caillouteuse, recouverte de bois et d’étangs. La pauvreté du sol ne permet comme cultures essentielles que le seigle ou la pomme de terre[3]. L’horizon en est borné par une végétation assez haute de résineux et de bouleaux, qui dégagent une grande tristesse. La toponymie est d’ailleurs explicite : « Luch[4] im Walde[5] » signifie « bois marécageux ». Le paysage actuel n’a pas vraiment changé, et dégage une impression sinistre.


[1] Wehrkreis III (WK III). Sous le IIIe Reich, cette division administrative comprenait pour la Wehrmacht une partie de la Nouvelle-Marche et le Brandebourg.

[2] État fédéré.

[3] Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, département des Manuscrits, NAF 17280, Croix-Rouge française, L’Âme des camps, I Chronique des Stalags I B, II D, II E, III A et III C, Paris : Croix rouge française, Comité central d’assistance aux prisonniers de guerre en captivité, 1944, page 82, vue 173/350, consultable en ligne sur Gallica.

[4] « Luch » désigne un marais dans le dialecte brandebourgeois.

[5] « Im Walde » signifie mot à mot « dans la forêt ».


Monument commémoratif à la gloire des militaires du carré yougoslave †. Cimetière de sépultures de guerre du Stalag III A (Friedhof Kriegsgräberstätte Stalag III A), prise de vue effectuée le mercredi 29 mars à Luckenwalde (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Monument commémoratif à la gloire des militaires du carré yougoslave †. Cimetière de sépultures de guerre du Stalag III A (Friedhof Kriegsgräberstätte Stalag III A), prise de vue effectuée le mercredi 29 mars 2023 à Luckenwalde (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La plupart du temps, les soldats prisonniers des Stalags sont placés dans un Arbeitskommando[1], ce qui n’est pas le cas pour les officiers des Oflags[2]. En raison de la convention de Genève, ils ne peuvent être officiellement employés que dans l’agriculture ou dans des tâches sans aucun lien avec l’effort de guerre. C’est souvent loin d’être le cas.  Au commando de Topschin, faisant partie du Stalag III A, les prisonniers sont ainsi employés dans une usine de munitions, d’obus, de bombes, de torpilles et de tanks[3]. Ils sont donc bel et bien contraints de participer à l’industrie d’armement allemande.

La construction du camp a été planifiée avant l’invasion de la Pologne en septembre 1939. Il était prévu pour accueillir au départ 10 000 hommes. Sa structure a servi de modèle[4] pour les autres camps.


[1] Commando ou unité de travail.

[2] Abréviation d’Offizierslager (camps d’officiers).

[3] Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-9759499 < Tome 39  >, Tribunal militaire international (Nuremberg, Allemagne), Procès des grands criminels de guerre devant le tribunal militaire international [Texte imprimé] : Nuremberg, 14 novembre 1945 – 1er octobre 1946 : [documents et autre matériel de preuve], texte officiel, édition française, Nuremberg : Tribunal militaire international, 1947-1949, tome XXXIX, page 172, vue 188/660, consultable en ligne sur Gallica, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 2000-282739.

[4] Le mot Musterlager désigne un stock d’échantillons dans le civil, et un camp modèle dans le langage militaire. Le régime nazi avait son propre vocabulaire.


A partir de l’été 1940, des prisonniers hollandais[1] et français sont arrivés dans ce camp. Les premiers sont libérés quelques semaines plus tard, tandis que les seconds, qui forment le groupe le plus important, y sont affectés.

Le séjour dans ce camp précède souvent l’intégration dans des commandos de travail à Berlin ou dans ses environs. Les conditions de vie y sont très difficiles.

Les prisonniers de guerre qui ont travaillé dans la région du Brandebourg ou à Berlin ont atteint le chiffre de 22 000. Une partie de ces derniers était des prisonniers transformés[2].


[1] Tous les Hollandais sont des Néerlandais, mais tous les Néerlandais ne sont pas des Hollandais. L’appellation retenue ici est celle qu’employaient les prisonniers de guerre.

[2]  Il s’agit de rendre à l’état de civil certains prisonniers de guerre, et d’en faire des travailleurs forcés.


Alors que dans ce camp, les instituteurs et professeurs étaient dispensés au départ de travail (car ils animaient une vie culturelle), les autres prisonniers essayaient de se rapprocher par origine régionale. Ils étaient astreints à des journées de 12 à 14 heures. Les commandos percevaient des vivres (toujours en quantité insuffisante) de la Croix-Rouge. Mais cela ne compensait que difficilement la pénibilité du travail : le commando n° 206, où étaient employés 300 prisonniers, extrayait de la tourbe, le n° 211 (qui en comprenait 20) exploitait du minerai, tandis que les n° 282 et 283 étaient des commandos agricoles.

Par la suite, ce camp a hébergé des prisonniers serbes et russes, dont le nombre n’a cessé d’augmenter.  Durant l’hiver 1941-1942, 2 500 de ces derniers y sont décédés. Temporairement, il y a eu également des Italiens, vers la fin, des Roumains et des Anglais[1].


[1] Tous les Anglais sont des Britanniques, mais tous les Britanniques ne sont pas des Anglais (certains sont des Écossais, des Gallois ou des Nord-Irlandais). L’appellation retenue ici est celle qu’employaient les prisonniers de guerre.

.


Le Stalag était aussi organisé du point de vue religieux, tant catholique que protestant. Les prêtres dans ce camp étaient au nombre de quarante-quatre pour tout le Stalag dont trois pour le camp, deux pour l’hôpital. Tous les autres étaient affectés aux commandos.  Selon les secteurs religieux (au nombre de 42), ceux-ci comptaient de dix à soixante commandos. Le camp comprenait aussi des séminaristes que les aumôniers pouvaient emmener avec eux. L’approvisionnement liturgique était assuré par l’Aumônerie générale de Paris en vin de messe, hosties et livres.

Le culte était autorisé en dehors des heures de travail. Les prêtres munis d’un Ausweis[1] avaient le droit de circuler librement dans leur secteur. Bien souvent, ils disaient au moins trois messes au cours de la journée, tandis que les commandos étaient massés sur un point central (où se trouvait un local convenable pour dire la messe).

Les prêtres n’avaient pas le droit de prêcher et, en cas d’impossibilité de confesser, ils prononçaient une absolution générale. Ils assuraient, outre les messes du dimanche, les communions des détenus en cellule et les enterrements au cimetière du camp.

Pour les besoins religieux et spirituels, les confrères étaient autorisés à se rencontrer.

Lorsque le camp a été libéré le 27 avril 1945, les prisonniers ont été rendus à la vie civile, envoyés en permission pendant quinze jours, avant de vaquer à leurs occupations.


[1] Pièce d’identité.

Le Stalag III B Fürstenberg


Le Stalag III B Fürstenberg est, lui aussi, un camp de prisonniers de guerre. Il avait le statut de Dulag[1]. Il se situe également dans la 3e région militaire allemande. La campagne y est sablonneuse avec des bois de pins. Il se trouvait à Fürstenberg-sur-Oder.

Il semblerait que ce camp n’avait que très peu de liens avec l’administration de la ville. Les archives municipales disposent aujourd’hui des dossiers de Fürstenberg-sur-Oder, devenu un quartier d’Eisenhüttenstadt.

Des noms de prisonniers français s’y trouvent. Celui de Pierre Bonhomme n’y figure malheureusement pas, selon madame Gabriele Urban, archiviste référente, du département des services aux citoyens (Fachbereich Bürgerdienste), Musée municipalGalerieMusée des pompiersArchives de la ville (Städtisches MuseumGalerieFeuerwehrmuseumArchiv) [2].

Le musée d’histoire locale[3] évoque l’ancien camp de prisonniers de guerre, grâce à l’initiative de monsieur Axel Drieschner. Avec sa femme, madame Barbara Schulz, il a publié un livre sur le Stalag III B Fürstenberg[4].

Devant le site de l’ancien camp, il y a une pierre commémorative qui doit rappeler tous les prisonniers et leur souffrance.


[1] Durchgangslager, c’est-à-dire un camp de transit.

[2] Stadt Eisenhüttenstadt • Zentraler Platz 1 • 15890 • Eisenhüttenstadt.

[3] Löwenstraße 4, 15890 Eisenhüttenstadt (Allemagne).

[4] Drieschner, Axel, Schulz, Barbara, Stalag III B Fürstenberg (Oder) : Kriegsgefangene im Osten Brandenburgs 1939-1945, Berlin : Metropol, 2006, 212 p., illustrations (Beiträge zur Geschichte Eisenhüttenstadts 4).


Bibliothèque universitaire Saint-Charles (Montpellier), 940.547 2 DOC, Ministère de la Guerre, État-major de l'armée, 5e bureau, Documentation sur les camps de prisonniers de guerre : secret, Paris : Ministère de la Guerre. Etat-major de l'armée, [1945], 1 volume, 493 p., [14] cartes en couleurs, page 52.
Bibliothèque universitaire Saint-Charles (Montpellier), 940.547 2 DOC, Ministère de la Guerre, État-major de l’armée, 5e bureau, Documentation sur les camps de prisonniers de guerre : secret, Paris : Ministère de la Guerre. Etat-major de l’armée, [1945], 1 volume, 493 p., [14] cartes en couleurs, page 52.

A l’époque, il comprend une cinquantaine de baraques, dont seules huit sont occupées par des Français. Réparties de part et d’autre d’une route cimentée, celles-ci hébergent chacune de trois cents à trois cent soixante prisonniers. Les travaux qui leur sont confiés sont épuisants. Nombre d’entre eux manient la pelle et la pioche comme ceux du commando n° 406 pour les mines de charbon, du n° 648 pour les mines de lignite, du n° 728 pour les mines de tourbe. Sinon, ils étaient employés dans des usines de guerre.

Au moment du repli du Stalag III B Fürstenberg, les prisonniers de guerre furent occupés jusqu’à la fin avril à effectuer des travaux de terrassements des tranchées, et à transporter des bombes d’avions. Il est même arrivé que des commandos aient effectué des travaux sous la première ligne de feu de l’artillerie russe. Malgré des réclamations, le colonel commandant le Stalag III B Fürstenberg reste sourd aux réclamations de la Croix-Rouge genevoise (Suisse).

Quant à l’homme de confiance, ce dernier signale que la durée du travail journalier était dans de nombreux cas excessive, en particulier dans les mines et les usines (12 heures). Elle pouvait monter jusqu’à quinze heures dans la culture pendant la période d’été.

Alors qu’il devait y avoir un repos de vingt quatre heures toutes les trois semaines, le repos hebdomadaire n’était pas souvent observé. En outre, l’homme de confiance principal du Stalag a signalé que des coups étaient portés sur des prisonniers français. Il y a une mauvaise foi évidente dans l’application de la convention de Genève dans ce camp.


Fin 1944, les Allemands ont décidé de déplacer ce camp à Buchenwald[1], à côté de Weimar[2]. Au début de février 1945, l’Armée rouge a pris pied sur la rive occidentale de l’Oder à Fürstenberg[3].

La campagne a retrouvé son aspect d’antan et nombre de citoyens allemands actuels en ignorent de manière feinte ou réelle l’existence.


[1] D’après Buche (hêtre) et Wald (forêt), Buchenwald signifie hêtraie (bois de hêtres).

[2] Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMP-25677, Commissariat régional de la République à Montpellier, Bulletin officiel du Commissariat régional de la République à Montpellier, 1re année , n° 1 (septembre 1944) – ? Montpellier : [s.n.], 1944-, 2e année, n° 107 du vendredi 23 février 1945, page 521, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, texte numérisé d’après l’original des archives départementales de l’Hérault, PAR 3215.

[3] Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMP-14232 <  1937-1948 >, Aragon, Louis (1897-1982), directeur de publication ; Bloch, Jean-Richard (1884-1947), directeur de publication, Ce soir : grand quotidien d’information indépendant, 1re année, n° 1 (2 mars 1937)-17e année, n° 3537 (2 mars 1953), Paris : [s.n.], 1937-1953 [n’a pas paru du 26 août 1939 à août 1944], n° 1059 du jeudi 8 février 1945, page 1 [non paginée], vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, JOD-109.


Le Stalag III D Berlin et la Kommandantur[1]


[1] Kommandanturen au pluriel. Ou « kommandanturs », en romain et
avec une minuscule (ou une majuscule), selon un usage français variable. En général, « Les mots, expressions, citations donnés dans une langue étrangère et non francisés se composent en italique dans un texte français en romain » selon le Lexique des règles typographiques en usage à l’Imprimerie nationale. Mais « de très nombreux termes étrangers, adoptés par l’usage, se composent cependant en romain comme ces exemples appartenant au langage courant : condottiere, conquistador, leitmotiv, match, sketch, week-end ». Pour éviter d’établir une distinction artificielle entre les mots germaniques recensés dans les dictionnaires français (stalags) et ceux, plus spécialisés, qui n’y sont pas (Dulags), il a été décidé par convention de considérer tous les mots employés par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale comme étrangers, et donc de les écrire avec une majuscule et en italique.


Vidéo Französische Kriegsgefangene in Berlin | Lager, Arbeit und Alltag (Prisonniers de guerre français à Berlin | camp, travail et vie quotidienne, consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit (Centre de documentation sur le travail forcé nazi).

Le Stalag III D se situait à Berlin, et dépendait de la 3e région militaire allemande comme les deux précédents. De très nombreux prisonniers français ayant été enfermés au camp de Berlin-Lichterfelde, il se confond un peu pour les historiens francophones avec le Stalag III D Berlin.

C’est là une perspective remise en cause par les chercheurs allemands. Le Stalag III D Berlin est en réalité une entité administrative qui repose sur des camps satellites disséminés sur tout Berlin : 3000 camps couvraient la ville. Certes, une majorité de Français s’est retrouvée à Berlin-Lichterfelde ou à Falkensee[1]. L’approche de la réalité historique est cependant plus complexe.


[1] Falkensee est une ville d’Allemagne située dans le Land du Brandebourg.


Plaque commémorative (Gedenktafel) du siège du commandement (Kommandantur) régissant le Stalag III D Berlin, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Plaque commémorative (Gedenktafel) du siège du commandement (Kommandantur) régissant le Stalag III D Berlin, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Un siège du commandement (Kommandantur) gère le travail des prisonniers du Stalag III D Berlin dans des commandos de travail (Arbeitskommandos) répartis en fonction de leur classe dans tous les points cardinaux à Berlin ou alentour :

  • 100 Stadtzentrum[1]
  • 200 Norden[2]
  • 300 Osten[3]
  • 400 Südosten[4]
  • 500 Süden[5]
  • 600 Südwest[6]
  • 700 Westen[7]
  • 800 Nordosten[8]

L’édifice[9], qui se trouvait rue de la Belle-Alliance [10], a totalement disparu, rasé et remplacé par un parking, à proximité de la Bibliothèque commémorative américaine (Amerika-Gedenkbibliothek)[11]. Il ne reste plus à son emplacement qu’une plaque commémorative (Gedenktafel)[12] en plastique tellement discrète qu’il a été plutôt difficile de la localiser (les bibliothécaires du lieu avoisinant ont eux-mêmes rencontré des difficultés pour la trouver).


[1] Centre-ville.

[2] Nord.

[3] Est.

[4] Sud-est.

[5] Sud.

[6] Sud-ouest.

[7] Ouest.

[8] Nord-est

[9] Belle-Alliance-Straße 106-107. Aujourd’hui, Mehringdamm, Berlin (Allemagne).

[10] Ce nom de Belle-Alliance est une autre façon de désigner la bataille de Waterloo (Belgique) en 1815.

[11] Blücherplatz 1, 10961 Berlin (Allemagne)

[12] Blücherplatz 1, 10961 Berlin (Allemagne).


Pierre Bonhomme, affecté à l’Arbeitskommando n° 407


Bibliothèque universitaire Saint-Charles (Montpellier), 940.547 2 DOC, Ministère de la Guerre, État-major de l'armée, 5e bureau, Documentation sur les camps de prisonniers de guerre : secret, Paris : Ministère de la Guerre. Etat-major de l'armée, [1945], 1 volume, 493 p., [14] cartes en couleurs, page 72.
Bibliothèque universitaire Saint-Charles (Montpellier), 940.547 2 DOC, Ministère de la Guerre, État-major de l’armée, 5e bureau, Documentation sur les camps de prisonniers de guerre : secret, Paris : Ministère de la Guerre. Etat-major de l’armée, [1945], 1 volume, 493 p., [14] cartes en couleurs, page 72.

Un bureau de censure postale (Postzensur[1]) contrôlait la correspondance et les colis échangés entre les prisonniers de guerre et leurs proches. Les photographies et livres autorisés de Pierre Bonhomme étaient frappés du tampon « Stalag III D 75 geprüft » ou « Stalag III D 96 geprüft »[2], « Freigegeben Stalag III D[3] » ou « Freigegegeben zur Heimsendung M.-Stammlager III D[4] ».

Des ajouts manuscrits par les Allemands ont permis d’identifier que Pierre Bonhomme avait été affecté à l’Arbeitskommando n° 407 lors de son internement au Stalag III D Berlin.


[1] Tempelhofer Ufer (codes postaux 10961 et 10963), dans l’arrondissement berlinois de Friedrichshain-Kreuzberg, s’étend de la Schöneberger Straße au Landwehrkanal.

[2] Geprüpft = validé, contrôlé. Ce tampon correspond à la censure postale.

[3] Validé [par l’administration du] Stalag III D.

[4] Libéré pour rapatriement du Stalag III D. La lettre M. est une abréviation pour Mannschaft [troupe]. Stammlager désigne un centre de détention. Le Kriegsgefangenen-Mannschafts-Stammlager est donc un camp de concentration pour les prisonniers de guerre, destiné aux hommes du rang ou aux sous-officiers. C’est ce que les Français connaissent sous son abréviation Stalag = Stammlager.


Vidéo Das Stalag III D | Kriegsgefangene in Berlin (Le Stalag III D | Prisonniers de guerre à Berlin) consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit (Centre de documentation sur le travail forcé nazi).

Il a été impossible de trouver des renseignements sur ce commando de travail, ce qui arrive souvent selon les historiens allemands. Il est simplement identifié sans aucune mention supplémentaire sur une liste militaire française[1] des « principaux Kommandos » :

  • n° 402 : Reidow[2] (98 P. G.[3]), usine aviation.
  • n° 407
  • n° 412 : Reidow[4] (555 P. G.), usine aviation.
  • n° 413 : Franfurt-sur-Oder[5] (600 P. G.), usine de munitions.
  • n° 415
  • n° 419 : Berlin (transformé) (88 P. G.), fleuriste.
  • n° 420 : (44 P. G.), usine Krupp[6].
  • n° 424 : Reidow[7] (6 P. G.), usine aviation.
  • n° 425 : Britz[8] (1767 P. G.) (transformé), une noyade fin 1943, bon abri.
  • n° 427 : composé de punis.
  • n° 431
  • n° 483 : Ludwigsfeld[9] (600 P. G.), usine aviation Daimler-Benz[10].

[1] Bibliothèque universitaire Saint-Charles (Montpellier), 940.547 2 DOC, Ministère de la Guerre, État-major de l’armée, 5e bureau, Documentation sur les camps de prisonniers de guerre : secret, Paris : Ministère de la Guerre. Etat-major de l’armée, [1945], 1 volume, 493 p., [14] cartes en couleurs, page 75.

[2] Transcription fautive. Lire Berlin-Rudow, quartier de l’arrondissement de Neukölln.

[3] Prisonniers de guerre.

[4] Voir n° 402.

[5] Lire Francfort-sur-l’Oder (Allemagne), ville du Land de Brandebourg.

[6] Fried. Krupp AG est un conglomérat industriel dans le secteur de l’acier fondé par Friedrich Krupp (1787-1826). Il est appelé couramment Krupp.

[7] Voir n° 402.

[8] Berlin-Britz, quartier dans l’arrondissement de Neukölln.

[9] Transcription fautive. Lire Ludwigsfelde, une ville du Land du Brandebourg dans l’arrondissement de Teltow-Fläming.

[10] Il s’agit des usines automobiles de Ludwigsfelde (Automobilwerke Ludwigsfelde), devenues en 1936 le siège pour la production de moteurs d’avion Daimler-Benz Motoren GmbH.


Plaque commémorative à la gloire des « anciens prisonniers de guerre du Stalag III D à leurs camarades décédés en captivité » † exposée au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Plaque commémorative à la gloire des « anciens prisonniers de guerre du Stalag III D à leurs camarades décédés en captivité » † exposée au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

On ne peut donc qu’émettre des conjectures sur le n° 407 par rapport aux positions du commando n° 406 (Neukölln) et du n° 408 (Berlin-Lichtenrade). Ce dernier avait sous sa garde 39 prisonniers de guerre, d’après une liste allemande Commandos de travail sans les Italiens (Arbeitskommandos ohne Italiener)[1] établie par Thomas Irmer, historien, politologue, spécialiste de l’histoire du travail forcé sous le régime nazi.

D’après son hypothèse d’une « répartition géographique possible » (« mögliche geographische Gliederung »), les camps de la classe 400 se situeraient dans le sud-est (Südosten) de Berlin. Les données restent fragmentaires :

  • n° 401
  • n° 402 : 98 Kgf.
  • n° 403 : 58 Kgf.[2], Metall[3]
  • n° 404 : Briten[4] ?
  • n° 405 : Britz[5], Gaubschat-Fahrzeugwerke[6], 118-179 Kgf.
  • n° 406 : Neukölln[7]
  • n° 408 : Obsch.[8] Lichtenrade[9], 39 Kgf.
  • n° 410 : 50-72 Kgf. Floristen[10]
  • n° 411 : 21 Kgf.
  • n° 412 : Rudow[11], 555 Kgf., Luftfahrindustrie[12]
  • n° 413
  • n° 415 : Rudow, 55 Kgf., Industrie
  • n° 416 : 55 Kgf.
  • n° 418
  • n° 419 : 72 Kgf.
  • n° 421 : 52 Kgf.
  • n° 423 : Elektrolux[13], 65 Kgf.
  • n° 425 : Britz[14]
  • n° 427, 428, 429 Zernsdorf bei KW[15] (n° 428 : 144 Briten[16])
  • n° 430 Neukölln[17], Lazarett[18]

[1] Ce document de travail inédit, qui se présente sous forme d’une photocopie, a fait l’objet d’un dépouillement systématique.

[2] Selon les contextes, abréviation pour Kriegsgefangene (prisonniers de guerre) ou Kriegsgefangener (prisonnier de guerre).

[3] Métal.

[4] Britanniques.

[5] Berlin-Britz, quartier dans l’arrondissement de Neukölln.

[6] Usine de véhicules Gaubschat. La société Gaubschat Fahrzeugwerke GmbH a été fondée par Fritz Gaubschat en 1904 à Rixdorf, ville intégrée dans Berlin (Allemagne) en 1912 et renommée Berlin-Neukölln. Elle a fait faillite en 1975. Elle était impliquée au départ dans la construction de véhicules utilitaires.

[7] Quartier (Ortsteil) de Berlin-Neukölln ou arrondissement (Bezirk) de Neukölln.

[8] Abréviation pour obscheinlich (apparemment).

[9] Berlin-Lichtenrade, dans l’arrondissement de Tempelhof-Schöneberg

[10] Fleuristes.

[11] La société Flugzeugreparaturwerk Rudow GmbH s’occupait de réparation d’avions à Berlin-Rudow, quartier dans l’arrondissement de Neukölln.

[12] Industrie aéronautique.

[13] L’orthographe a été germanisée. Electrolux est une entreprise suédoise d’électroménager créée en 1910.

[14] Voir n° 405.

[15] Zernsdorf près de Königs Wusterhausen. Depuis 2003, ce village fait partie de cette ville. Il est situé dans l’arrondissement de Dahme-Spreewald (Dahme-Forêt-de-Spree) du Land (État fédéré) de Brandebourg (Allemagne).

[16] Voir n° 404.

[17] Voir n° 406.

[18] Hôpital militaire.


Pierre Bonhomme aurait d’après un récit personnel travaillé du « bois de mine ». Ce qui serait logique : avant d’être militaire comme pontonnier, il était charpentier. De fait, il aurait pu être éventuellement boiseur, chargé du soutènement et de la réparation dans des galeries. Monsieur Ronny Maylahn, du comité de direction (Führungskoordination) de la société de recherche et de documentation sur les constructions souterraines Berliner Unterwelten e.V.[1] n’a pas pu nous renseigner sur le sujet.


[1] Brunnenstraße 105, 13355 Berlin (Allemagne). Berliner Unterwelten peut se traduire selon les cas « les souterrains de Berlin », « les sous-sols de Berlin », voire « les bas-fonds de Berlin » et même dans certains contextes « les enfers de Berlin ».


L’hôpital militaire principal de Berlin-Neukölln et l’Arbeitskommando n° 430


Hopital militaire de Berlin-Neukölln. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Hopital militaire de Berlin-Neukölln. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Plusieurs hôpitaux militaires[1] peuvent soigner les prisonniers de guerre. Le plus important était établi à Berlin-Neukölln dans un établissement scolaire[2]. Il était lié à l’Arbeitskommando n° 430. Il a repris ses fonctions premières. Un centre d’épouillage se trouvait à Berlin-Lichterfelde, ce qui a permis de limiter les risques de typhus.


[1] Lazarett [latsaˈrɛt], neutre <Lazarette̸s; Lazarette>.

[2] Donaustraße 122, 12043 Berlin.


Les baraquements redécouverts du camp de Berlin-Lichterfelde


Vidéo Vergessen und vorbei? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen (C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français), consultable en ligne pour la chaîne Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit (Centre de documentation sur le travail forcé nazi).

L’ensemble des baraquements de Berlin-Lichterfelde a été retrouvé au moment où devait se dérouler dans ce lieu une opération immobilière. Il avait été ouvert dès 1938, avant donc le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale le 1ᵉʳ septembre 1939.

A l’origine, la Reichsbahn[1] y a installé un camp pour 1 400 travailleurs allemands de la région des Sudètes (Tchéquie) à l’angle d’Osdorfer straße et du Lanweg. En 1939, la Wehrmacht a loué une partie de ce site pour accueillir des prisonniers tout d’abord polonais.

A partir du mois d’août 1940, ce camp est affecté aux prisonniers français : en janvier 1941, plus de 18 000 prisonniers qui y vivaient étaient français. Les baraques construites grossièrement avec des parpaings ont remplacé parfois les premières, en bois, qui ont brûlé lors d’attaques aériennes en 1942/1943. Chacune mesurait 38 m de long sur 16 de large, et devait être occupées par 96 hommes environ. Le grand nombre de prisonniers a fait que leur occupation a été plus importante dans les faits.


[1] Société des chemins de fer allemands.


La mise au jour de ce camp tient à un projet de construction d’appartements.  L’association Initiative KZ-Außenlager Lichterfelde e.V. (un collectif citoyen)[1] et l’Office d’État des monuments historiques de Berlin (Landesdenkmalamt Berlin)[2] tentent de sauver des baraques situées dans le quartier[3] et identifiées formellement en 2017 comme ayant fait partie du camp de Berlin-Lichterfelde. Une est classée monument historique, les autres sont plus ou moins délabrées et à l’abandon, en cours de destruction, après avoir connu après la Seconde Guerre mondiale divers usages.


[1] Président du conseil d’administration : Thomas Schleissing-Niggemann. Vice-présidente : Annette Pohlke.

[2] Klosterstraße 47, 10179 Berlin (Allemagne).

[3] Landweg 3, 12007 Berlin (Allemagne).


Le gardien chargé du terrain en friche refuse d’orienter le promeneur (les bâtiments se trouvent pourtant à moins de cent mètres de sa guérite). Les passants qui s’arrêtent font mine de ne rien comprendre aux explications données dans un allemand très clair. Les habitants du quartier ignorent ce qui se passe à quelques dizaines de mètres de leur maison. Une exploration urbaine[1] « sauvage » du site permet de mesurer la désolation du lieu, squatté occasionnellement et bombé à la peinture. Une captation d’images permettra à terme d’étudier les lieux à travers le prisme de la culture visuelle.

A peu près quatre-vingts ans après la capitulation du Troisième Reich, l’historien affronte moins un négationnisme agressif qu’une parfaite indifférence et un total désintérêt.


[1] Urbex.


Les dix grands baraquements qui restent sont du même modèle que ceux du camp du quartier de Berlin-Schöneweide[1]. Ce lieu se révèle être un camp de travailleurs forcés, où étaient internés notamment des Italiens, tant militaires que civils, mais aussi des hommes et des femmes originaires d’Europe de l’Ouest et l’Est.


[1] Le lieu a été identifié comme un camp en 1994 alors qu’il se trouvait au milieu d’immeubles et qu’il servait depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale à diverses activités comme la chaudronnerie.


Les prisonniers sont répartis dans différents commandos de travail. Il existe un homme de confiance qui a le droit d’aller les visiter. Les tâches confiées à ces prisonniers sont simples, mais physiquement très pénibles. Pour ce travail, le prisonnier reçoit un faible salaire, alors que les entreprises remportent de gros bénéfices grâce à cette main-d’œuvre bon marché.


L'enduit qui s'abîme avec le temps laisse entrevoir le parpaing d'origine. Camp de Berlin-Lichterfelde, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

L’enduit qui s’abîme avec le temps laisse entrevoir le parpaing d’origine. Camp de Berlin-Lichterfelde, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.


La dégradation du mur le fait paradoxalement revenir à un état premier : le temps destructeur peut être aussi conservateur, en rendant visible l’invisible. Camp de Berlin-Lichterfelde, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La dégradation du mur le fait paradoxalement revenir à un état premier : le temps destructeur peut être aussi conservateur, en rendant visible l'invisible. Camp de Berlin-Lichterfelde, prise de vue effectuée le jeudi 30 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le camp de Berlin-Schöneweide et l’abri antiaérien de la baraque 13


Au camp de Berlin-Schöneweide, les conditions de vie y auraient été semble-t-il relativement meilleures que dans d’autres. Cette donnée reste cependant à relativiser en fonction des nationalités : les Russes emprisonnés ont par exemple subi des traitements pires que celui des Italiens.


Plan d'orientation du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Plan d’orientation du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le Centre de documentation du travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), ouvert en 2006, est situé sur ce site historique[1].


[1] Britzer Straße 5, 12439 Berlin (Allemagne).


Les baraquements de pierre ont été construits en 1943 sous la direction d’Albert Speer, premier architecte du IIIe Reich inspecteur général des travaux pour la capitale du Reich (Generalbauinspektor für die Reichshauptstadt)[1].


[1] Abrégé en GBI.


Une exposition permanente inaugurée en 2013, Quotidien du travail forcé 1938–1945, montre à quel point le nazisme s’appuyait sur la main-d’œuvre sous contrainte.

Les travailleurs invités[1], en provenance de pays amis de l’Allemagne n’y étaient pas soumis. L’historiographie allemande englobe sous le concept général de travailleurs forcés :

  • les prisonniers de guerre[2]
  • les travailleurs civils[3]
  • les travailleurs de l’Est[4]
  • les déportés, traités comme des esclaves.

D’un point de vue davantage français, les anciens combattants ne goûtent guère d’être confondus avec les membres du STO[5]. En France, ces derniers ont le droit au titre de « victimes du travail forcé en Allemagne nazie[6] ». Mais les dernières décisions de justice leur interdisent celui de « déportés du travail[7] ». La « transformation » de certains en travailleurs « libres » étant en lien avec la Relève, dispositif mis en place en 1942 par le régime de Vichy, il s’agit là encore d’une question sensible.


[1] Gastarbeitnehmer.

[2] Militärinternierte (internés militaires).

[3] Zivilarbeiter.

[4] Ostarbeiter.

[5] Service du travail obligatoire.

[6] Par décret du 16 octobre 2008.

[7] Refus le 28 mars 2011 par la Cour de cassation.


Edition monolingue en français du catalogue offert lors de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l’exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).

Edition monolingue en français du catalogue offert lors de la rencontre à Berlin (Allemagne) du mardi 28 mars 2023 au Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors) par Roland Borchers, commissaire de l'exposition Vergessen und vorbei ? Das Lager Lichterfelde und die französischen Kriegsgefangenen = Past and forgotten ? The Lichterfelde Camp and the French Prisoners of War = C’est le passé, on oublie ? Le camp de Lichterfelde et les prisonniers de guerre français. (collection personnelle de l’auteure).


[1] Zwangsarbeiter.


Depuis leurs balcons, les habitants pouvaient voir tout ce qui se passait dans le camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Depuis leurs balcons, les habitants pouvaient voir tout ce qui se passait dans le camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

La baraque 13, qui a accueilli des prisonniers de guerre italiens, est la mieux conservée[1].


[1] Köllnische Straße 17, 12439 Berlin (Allemagne).


Vue extérieure de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Vue extérieure de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.


Mur en parpaing avec lequel la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide a été construite. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Mur en parpaing avec lequel la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide a été construite. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le baraquement se compose d’un couloir central et de douze dortoirs de part et d’autre (destinés chacun à seize prisonniers), d’une seule pièce d’eau avec une fontaine, des latrines[1] et des urinoirs publics.

Chaque prisonnier a un châlit avec un sac de paille, une couverture, une gamelle, un gobelet et des couverts. La distribution de la nourriture varie selon les nationalités. Toujours manquante et de mauvaise qualité, elle l’est encore plus pour les prisonniers russes, qui sont davantage affamés, épuisés, et soumis aux mauvais traitements.


[1] A peine plus confortables que les feuillées de la vie militaire.


Entrée de l'abri antiaérien de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Entrée de l’abri antiaérien de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Pièces de l'abri antiaérien de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Pièces de l’abri antiaérien de la baraque 13 du camp de Berlin-Schöneweide. Centre de documentation sur le travail forcé nazi de la fondation Topographie de la terreur (Dokumentationszentrum NS-Zwangsarbeit der Stiftung Topographie des Terrors), prise de vue effectuée le mardi 28 mars 2023 à Berlin (Allemagne). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le plus souvent, une cave se trouve sous le baraquement. Elle est aménagée en abri antiaérien avec de petites cellules. Les prisonniers s’y réfugient lors des nombreux bombardements.


Porte blindée en métal hermétique avec valve de l'abri antiaérien de la baraque 13. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Porte blindée en métal hermétique avec valve de l’abri antiaérien de la baraque 13. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.


Sortie de l'abri antiaérien de la baraque 13. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Sortie de l’abri antiaérien de la baraque 13. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.


En conclusion de cette mission historique et mémorielle à Berlin


Cette mission historique et mémorielle à Berlin met en lumière l’évolution des lieux depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Certains bâtiments ont connu une reconversion, d’autre une conservation comme patrimoine industriel[1], les derniers enfin une destruction. Des historiens allemands s’évertuent à témoigner du sort de millions d’hommes asservis sous le nazisme, tandis qu’une nouvelle génération semble se faire à l’idée d’une lente et inexorable disparition, que le déni parfois précipite…


[1] Le camp de Berlin-Schöneweide est répertorié dans le parcours d’ERIHEuropean Route of Industrial Heritage e.V. (Route européenne du patrimoine industriel).

Catégories
Anciens combattants Guerre mondiale (1939-1945) Militaires Religion Travailleurs Victimes de guerre

Les natifs de La Romagne prisonniers de guerre en 1939-1945 (A-Z)


Le blog laromagne.info commémore l'appel du 18 juin 1940 et soutient la pétition du Souvenir français. Son objectif est de transmettre : « Aucun élève ne doit quitter sa scolarité sans avoir visité au moins un site mémoriel combattant et avoir participé au moins à une cérémonie patriotique. »
Le blog laromagne.info commémore l’appel du 18 juin 1940 et soutient la pétition du Souvenir français. Son objectif est de transmettre : « Aucun élève ne doit quitter sa scolarité sans avoir visité au moins un site mémoriel combattant et avoir participé au moins à une cérémonie patriotique. »

Bonhomme, Pierre, Georges, charpentier puis militaire de carrière, sous-officier du génie, décoré de la médaille militaire[1], né le 6 janvier 1910 à La Romagne, fils de Désiré Vital Bonhomme et de Blanche Georges, n° de matricule 891. Il est fait prisonnier à Goviller (Meurthe-et-Moselle) le 21 juin 1940[2].


[1] Attribuée par un décret paru au Journal officiel de la République française n° 239 du 9 octobre 1949, page 10146, qui mentionne dix-huit ans de service et six campagnes.

[2] Liste du Frontstalag 162.

Médaille militaire (avers) de monsieur Pierre Bonhomme †, collection personnelle de l'auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Médaille militaire (avers) de monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Attestation du 4 décembre 2008 délivrée par le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) de Genève certifiant posséder les renseignement sur le parcours de prisonnier de guerre de monsieur Pierre Bonhomme  †, collection personnelle de l'auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Attestation du 4 décembre 2008 délivrée par le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) de Genève certifiant posséder les renseignement sur le parcours de prisonnier de guerre de monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Il est dirigé vers un camp provisoire[1]. D’après une liste officielle des prisonniers français n° 28 du 9 octobre 1940, il est au Frontstalag 162 à Dommartin-lès-Toul (Meurthe-et-Moselle). Il porte le numéro de prisonnier 6987 et se trouve dans le quartier n° 4. Une liste nominative du camp d’Ecrouves (Meurthe-et-Moselle) datée du 13 juillet 1940 indique qu’il s’y trouve à ce moment-là.


[1] Fiche bristol [Karteikarte] du Frontstalag 162 en date du 9 octobre 1940.


L'Allemand sans peine (méthode Assimil éditée en 1941), exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme † avec référence manuscrite aux Stalags XVII B Krems-Gneixendorf et Stalag III D Berlin (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
L’Allemand sans peine (méthode Assimil éditée en 1941), exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme † avec référence manuscrite aux Stalags XVII B Krems-Gneixendorf et Stalag III D Berlin (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

A partir du 4 octobre 1940, il est au Stalag XVII B Krems-Gneixendorf[1]. C’est dans ce camp qu’il reçoit son immatriculation de prisonnier de guerre[2] n° 53026. Il se retrouve ensuite au Stalag III B Fürstenberg (arrondissement de l’Oder-Spree), d’après sa fiche bristol[3] du 9 octobre 1940.


[1] Gneixendorf est un village près de Krems-sur-le-Danube (Krems an der Donau) situé dans le Land de la Basse-Autriche.

[2] Kriegsgefangener.

[3] Karteikarte.


Carte de l'emplacement des Stalags en Allemagne (1940-1945).
Carte de l’emplacement des Stalags en Allemagne (1940-1945).

Cette ville correspond à l’actuelle Eisenhüttenstadt (Land du Brandebourg), en Allemagne. Cette ville nouvelle est issue de la fusion en 1961 de Fürstenberg, Staline-Ville[1], et Schönfließ. Cet immense camp se situe dans la vallée de l’Oder est situé à cent vingt kilomètres au sud-est de Berlin et à environ soixante kilomètres de la frontière polonaise[2]. C’est pour les autorités allemandes un camp modèle[3].


[1] Stalinstadt.

[2] La voie ferrée conduisant à Berlin et le canal de l’Oder forment en quelque sorte les limites naturelles du camp.

[3] Modelllager.


Détail de l'emplacement de quelques Stalags en Allemagne (1940-1945).
Détail de l’emplacement de quelques Stalags en Allemagne (1940-1945).

Selon une liste allemande datée du 20 novembre 1940, il est transféré au Stalag III A Luckenwalde[1] sous le n° 53021 le 13 novembre 1940 depuis le Stalag XVII B Krems-Gneixendorf. Il est présent dans le Stalag III D Berlin[2] le 24 novembre 1940, selon une carte de capture dont le tampon très effacé semblerait être du 18 décembre 1940.


[1] Land du Brandebourg, en Allemagne.

[2] Berlin-Lichterfelde est un quartier de Berlin dans l’arrondissement de Steglitz-Zehlendorf.


Carte du combattant n° 143757 de monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Carte du combattant n° 143757 de monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

D’après une liste n° 111 reçue le 24 mars 1941 et une fiche de capture du CICR[1] du 1e décembre1944, il est probable qu’il est encore dans ce camp pendant cette période. Il semble qu’il y reste jusqu’à la libération de ce camp en avril 1945. D’après sa fiche nominative du Frontstalag 162 à Dommartin-lès-Toul (Meurthe-et-Moselle), Pierre Bonhomme est rapatrié le 27 mai 1945 au centre de Maubeuge (Nord)[2].


[1] Comité international de la Croix-Rouge.

[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 410 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Musée de la Reddition du 7 mai 1945 (Reims), numéro d'inventaire R.853, acte de capitulation rédigé par les Alliés, texte dactylographié à l’encre noire, notice descriptive consultable en ligne sur le portail officiel des musées de Reims. Crédits photographiques : © Christian Devleeschauwer.
Musée de la Reddition du 7 mai 1945 (Reims), numéro d’inventaire R.853, acte de capitulation rédigé par les Alliés, texte dactylographié à l’encre noire, notice descriptive consultable en ligne sur le portail officiel des musées de Reims. Crédits photographiques : © Christian Devleeschauwer.

Fouquet, Henri Albert, n° de matricule du recrutement 411, né le 20 octobre 1907 à La Romagne, fils de Gustave Fouquet et de Marie Carbonneaux, rappelé à l’activité le 2 octobre 1939, affecté au dépôt du génie n° 15. Il est fait prisonnier le 21 juin 1940 à Rambervillers (Vosges). Henri Fouquet[1] est interné au camp de transit de Baccarat (Meurthe-et-Moselle) avant d’être démobilisé par le comité départemental le 28 août 1941.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 392 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Pour nos prisonniers de guerre, timbre  brun carminé en taille douce, collé sur des cahiers de captivité de prisonniers de guerre du Stalag IV-B Mühlberg (1940).
Pour nos prisonniers de guerre, timbre  brun carminé en taille douce, collé sur des cahiers de captivité de prisonniers de guerre du Stalag IV B Mühlberg (1940).

Lelong, Marceau Alfred, domestique de culture, classe de mobilisation 1927, n° de matricule de recrutement 1308, né le 11 novembre 1912 à La Romagne, fils de Jules Alcide Lelong et de Marie Claire Faveaux, rappelé le 26 août 1939 au 29e régiment régional.

Il passe au 22e régiment régional le 16 janvier 1940. Il est fait prisonnier à Etampes (Essonne) le 15 juin 1940. Interné au Stalag IV B Mühlberg[1], à une cinquantaine de kilomètres de Dresde. Il a le matricule n° 72021. Rapatrié le 30 mai 1945, Marceau Lelong est démobilisé le 1er juin 1945 par le comité départemental de Charleville[2].


[1] Ville allemande située dans l’arrondissement d’Elbe-Elster (Land du Brandebourg).

[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 423 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Monsieur Pierre Bonhomme †, titulaire de la médaille militaire depuis plus de 50 ans (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Monsieur Pierre Bonhomme †, titulaire de la médaille militaire depuis plus de 50 ans (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Lequeux, Armand Adonis, ferronnier, n° de matricule du recrutement 111, né le 19 mars 1915 à La Romagne, fils de Victor Eugène Lequeux et de Marie Georgette David, convoqué le 29 mars 1939 au 91e régiment d’infanterie, il passe au 295e régiment d’infanterie le 2 septembre 1939.

Fait prisonnier à La Salle[1] (Saône-et-Loire) le 28 juin 1940. Interné au Stalag II A Neubrandenbourg[2]. Il porte le numéro de prisonnier 66459. Malade, il est rapatrié le 4 juin 1941 et est démobilisé le 9 juillet 1941. Armand Lequeux se retire alors à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine)[3].


[1] Près de Mâcon (Saône-et-Loire).

[2] Ville d’Allemagne située dans le Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale, au nord de Berlin.

[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 442 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Macquin, Paul Adolphe, classe de mobilisation 1925, n° de matricule du recrutement 119, né le 7 janvier 1905 à La Romagne, fils de Paul Eugène Macquin et de Marie-Angèle Lantenois, rappelé à l’activité par mesure de mobilisation générale, il est affecté au dépôt ALVF[1] n° 209.

Parti aux armées le 11 février 1940 et affecté au 374e RALVF[2] 13e bataillon le 1er avril 1940. Il est fait prisonnier à « Archambeau[3] » le 20 juin 1940. Interné au Stalag II C Greifswald[4] sous le n° de prisonnier 3355. Paul Macquin est rapatrié le 28 mai 1945[5].


[1] Artillerie lourde sur voie ferrée.

[2] Régiment d’artillerie lourde sur voie ferrée.

[3] Sic, id est Bourg-Archambault (Vienne).

[4] Ville du nord de l’Allemagne (Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale).

[5] Archives départementales des Ardennes, 1R 378 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Reconnaissance des services rendus à la France par monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Reconnaissance des services rendus à la France par monsieur Pierre Bonhomme † (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Macquin, Rémi Jean, commis de perception, né le 5 mars 1911 à La Romagne, fils de Paul Eugène Macquin et de Marie Angèle Lantenois, n° de matricule du recrutement 110.

Rappelé à l’activité le 2 septembre 1939, il est fait prisonnier à Saint-Dié (Vosges) le 22 juin 1940. Interné au Stalag XIII D Nuremberg-Langwasser[1] sous le n° de prisonnier 88022. Libéré le 5 mai 1945 et rapatrié le même jour, Rémi Macquin est démobilisé le 16 mai 1945 par le comité départemental de Charleville[2].


[1] Land de Bavière.

[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 415 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Monsieur Jean Malherbe † pose devant sa voiture. Hotchkiss est un constructeur automobile et manufacturier d'armes français, qui a produit des véhicules militaires jusqu'en 1969. Photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).
Monsieur Jean Malherbe † pose devant sa voiture. Hotchkiss est un constructeur automobile et manufacturier d’armes français, qui a produit des véhicules militaires jusqu’en 1969. Photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).

Malherbe, Eugène Jean, employé de commerce, n° de matricule du recrutement 230, né le 20 février 1913 à La Romagne, fils de Georges Malherbe et de Lucie Bonpart, rappelé à l’activité à la 2e section de COMA[1] le 25 août 1939 et affecté au groupe d’exploitation de la 52e division d’infanterie.

Nommé sergent le 21 juin 1940. Fait prisonnier à La Bourgonce (Vosges) le 22 juin 1940. Interné au Stalag XIII D Nuremberg-Langwasser. Eugène Jean Malherbe est rapatrié le 23 avril 1945 et démobilisé par le centre des Ardennes le 1er juin 1945.


[1] Commis et ouvriers militaires d’administration.


Marandel, Léon André, cultivateur, maréchal-ferrant, classe de mobilisation 1922, soldat au 140e régiment d’artillerie, n° de matricule du recrutement 244, né le 27 janvier 1902 à La Romagne, fils de Alfred Célestin Marandel et d’Eugénie Chéry.Rappelé à l’activité le 23 août 1939, il est fait prisonnier à Epinal (Vosges) et interné au Stalag XII D Trier[1]/Petrisberg sous le n° de prisonnier 1564. Rapatrié, Léon Marandel est démobilisé le 5 novembre 1945 par le comité départemental d’Amiens[2].


[1] Trèves est une ville du sud-ouest de l’Allemagne (Land de Rhénanie-Palatinat).

[2] Archives départementales des Ardennes, 1R 356 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Marquigny, Henri Emile, ouvrier de culture, classe de mobilisation 1922, né le 20 mars 1906 à La Romagne, mort pour la France[1], n° matricule du recrutement 408, fils de Joseph Louis Emile Marquigny et de Marie Ida Boitte. Rappelé à l’activité le 20 septembre 1939 et affecté au 301e RALP[2].

Après un séjour à l’hôpital de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret) du 20 octobre 1939 au 24 février 1940 et sa convalescence, il rejoint le dépôt d’artillerie n° 302 le 17 mars 1940. Il est affecté le 29 mars 1940 au parc de munitions d’armée et passe à la 662e compagnie du parc de munitions d’armée.

Fait prisonnier le 12 juin 1940 au fort de La Chaume[3]. Henri Marquigny est rapatrié le 30 mai 1945 et décède quelques mois plus tard à l’hôpital militaire de Mézières le 5 octobre de la même année[4].


[1] Il figure à ce titre sur le monument aux morts de La Romagne.

[2] Régiment d’artillerie légère portée.

[3] Thierville-sur-Meuse, près de Verdun (Meuse).

[4] Archives départementales des Ardennes, 1R 385 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Mauroy[1], Gaston Auguste, n° de matricule du recrutement 269, né le 2 juillet 1902 à La Romagne, fils de Charles Emile Mauroy et de Juliette Léonie Bailly. Il est fait prisonnier à Maubert-Fontaine. Il est interné au Stalag XII A Limburg an der Lahn[2] sous le n° de prisonnier 21506. Gaston Mauroy est démobilisé le 31 mai 1945 par le comité départemental de Charleville.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 356 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].

[2] Limbourg-sur-la-Lahn (Land de la Hesse).


Monsieur Marcel Mauroy † et d'autres prisonniers de guerre, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Michel Mauroy).
Monsieur Marcel Mauroy † et d’autres prisonniers de guerre, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Michel Mauroy).

Mauroy, Marcel Charles, n° de matricule du recrutement 59, né le 6 mai 1904 à La Romagne, fils de Charles Emile Mauroy et de Marie Juliette Léonie Bailly. Rappelé à l’activité le 24 août 1939, affecté au 17e RAD[1].

Fait prisonnier le 22 juin 1940 à La Bourgonce (Vosges). Il est interné au Stalag XIII B Weiden/Oberpfalz[2]. Il est rapatrié le 25 mai 1945 sous le matricule 83774. Marcel Mauroy est démobilisé par le comité départemental de Charleville le 30 mai 1945[3].


[1] Régiment d’artillerie divisionnaire.

[2] Weiden in der Oberpfalz (Land de la Bavière).

[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 371 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Miclet, Henri Léon, domestique, n° de matricule du recrutement 60, né le 16 février 1916 à La Romagne, fils de Paul Georges Miclet et de Célestine Constance Destrez. Rappelé à l’activité le 20 août 1939, affecté à la CM[1]. Capturé le 12 juin 1940 à Saint-Valéry-en-Caux (Seine-Maritime), il est au Stalag IX C Bad Sulza[2] sous le n° de prisonnier 3940. Rapatrié le 9 juin 1941 comme aîné de cinq enfants. Démobilisé par le comité départemental de Guéret (Creuse) le 25 juin 1941[3], Henri Miclet se retire à Lérat (Creuse).


[1] Cavalerie montée.

[2] Land de Thuringe.

[3] Archives départementales des Ardennes, 1R 448 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Miclet, Joseph Emile, charron,classe de mobilisation 1926, n° de matricule du recrutement 434, né le 12 octobre 1906 à La Romagne, fils de Georges Miclet et de Célestine Destrez. Rappelé à l’activité le 25 août 1939 au dépôt d’artillerie n° 2.

Il est fait prisonnier à Redon (Ille-et-Vilaine) le 23 juin 1940, et est interné dans un Frontstalag sous le n° de prisonnier 11303 avant d’être mis en congé de captivité le 18 juillet 1941. Joseph Miclet est démobilisé le 1er août 1941[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 385 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Quentin, Gaston Fernand, militaire, n° de matricule du recrutement 490,décoré de la médaille militaire par décret du 21 décembre1954[1], né le 1er février 1920 à La Romagne, fils de Louis Albert Quentin et de Marie-Juliette Bosserelle.

Engagé en 1938 à l’intendance militaire de Versailles (Yvelines), il est affecté au 2e régiment du génie à Metz (Moselle) et est nommé caporal le 28 juillet 1938 puis sergent le 1er avril 1939. Il est fait prisonnier le 4 juillet 1940 et est interné au Stalag VII A Moosburg[2] avec le n° de prisonnier 30746.

Il est rapatrié le 23 mai 1945 et, après une permission d’un mois, il est dirigé en septembre 1945 à Bad-Salzig[3] en Allemagne. Gaston Quentin poursuit sa carrière militaire et devient officier[4].


[1] Journal officiel de la République française n° 5 du 5 janvier 1954.

[2] Land du Bade-Wurtemberg.

[3] Land de la Rhénanie-Palatinat.

[4] Archives départementales des Ardennes, 1R 468 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Quentin, Robert Léon, cultivateur puis militaire de carrière, n° de matricule du recrutement 63, né le 13 mai 1914 à La Romagne, fils de Louis Albert Quentin et de Marie Juliette Bosserelle. Après son engagement en 1932 et diverses affectations, il est nommé sergent au 105e régiment d’infanterie en juillet 1939. 

Le 18 septembre 1939, il est affecté à la CHR[1] du dépôt d’infanterie 64. Il est muté le 1e janvier 1940 à une compagnie de passage[2]. Son contrat est maintenu tacitement. Muté à la CBI[3] le 24 mai 1940, il rejoint le DI 83[4] le 15 juin 1940 par ses propres moyens. Fait prisonnier[5] le 24 juin 1940, Robert Quentin est rapatrié le 15 juin 1945[6].


[1] Compagnie hors rang.

[2] Les documents consultés n’ont pas permis d’identifier laquelle.

[3] Compagnie de base et d’instruction.

[4] A Auxerre (Yonne).

[5] Aucun renseignement n’est donné sur le lieu de son emprisonnement.

[6] Archives départementales des Ardennes, 1R 434 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].


Roncin[1], Henri Albert, ouvrier agricole, classe de mobilisation 1928, n° de matricule de recrutement 1093, né le 17 juin 1908 à La Romagne, fils de Calixte Sulpice Roncin et de Valentine Angèle Depurrieux. Rappelé à l’activité le 24 août 1939 et affecté au 348e régiment d’infanterie.

Il est fait prisonnier le 28 juin 1940 à Fontenay-le-Comte (Vendée) et interné au Stalag VIII C Żagań[2] sous le n° de prisonnier 11136. Henri Roncin est rapatrié et démobilisé le 26 septembre 1942 par le comité départemental de Charleville.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1R 400 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 1R = préparation militaire et recrutement].

[2] Ville de Pologne connue aussi sous son nom allemand de Sagan.


Plusieurs hommes du rang nés à la Romagne ont donc été faits prisonniers de guerre en Allemagne dans les Stalags[1] du Troisième Reich. Si le sort des détenus des camps de concentration et d’extermination nazis est aujourd’hui mieux connu, celui des militaires emprisonnés en 1939-1945 reste encore un vaste champ d’étude. Il semble donc important d’expliciter ce que ces militaires romanais ont pu vivre…


[1] Abréviation de Kriegsgefangenen-Mannschafts-Stammlager (camp de base de prisonniers de guerre).


Entre mai et juin 1940, le soldat est le plus souvent envoyé, après sa capture, dans un Frontstalag[1]. C’est un lieu de rassemblement pour prisonniers de guerre de tous grades, doté d’une organisation très structurée, et avec un personnel important.

C’est en quelque sorte un espace de transit, avant l’acheminement vers les camps définitifs, disséminés sur tout le territoire allemand, et répartis entre les diverses circonscriptions militaires[2] du Reich : les hommes de troupe et les sous-officiers rejoignent des Stalags, et les officiers des Oflags[3].


[1] Ou Frontstammlager (camp de prisonniers dans les territoires français occupés).

[2] Wehrkreise.

[3] Offizier-Lager (camps d’officiers).


Les conventions de Genève, timbre de la Croix-Rouge.
Les conventions de Genève, timbre de la Croix-Rouge.

Les prisonniers subissent un long périple ferroviaire vers les camps qui leur sont assignés : entassés parfois à soixante dans des wagons de marchandises ou à bestiaux dépourvus de paille et surtout de sanitaires, ils doivent, à leur arrivée, parcourir à pied, encadrés par des gardes, le chemin séparant la gare de leur lieu de captivité.


Henry Dunant (1828-1910), fondateur de la Croix-Rouge.
Henry Dunant (1828-1910), fondateur de la Croix-Rouge.

Généralement, l’entrée du camp, symbolisée par une porte massive, est précédée d’une ou deux enceintes de barbelés avec, à intervalles réguliers, des miradors d’où des sentinelles surveillent les environs.


Gustave Moynier (1826-1910), fondateur de la Croix-Rouge.
Gustave Moynier (1826-1910), fondateur de la Croix-Rouge.

Le camp, pouvant accueillir plusieurs milliers d’hommes, est constitué de nombreuses baraques en bois ou en brique construites de part et d’autre d’une allée centrale. Elles permettent de concentrer dans un même lieu des prisonniers de différentes nationalités.


Infirmière, timbre de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.
Infirmière, timbre de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.

A l’intérieur de chaque baraquement, l’éclairage est chiche, et les châlits[1] à deux ou trois étages. Ces rectangles étroits et spartiates sont recouverts d’une très mince paillasse, et d’une seule couverture. A cet inconfort matériel, s’ajoute la promiscuité. Dans ces conditions, le sommeil du prisonnier de guerre est rarement réparateur.


[1] Cadre de lit en bois ou en métal.


Pour nos blessés, timbre de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.
Pour nos blessés, timbre de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.

C’est dans le premier camp où il est affecté que le prisonnier reçoit son immatriculation. Les initiales KG (Kriegsgefangener, c’est-à-dire prisonnier de guerre) sont peintes en blanc sur sa vareuse et sa musette. A partir de ce moment-là, il devient un numéro au sens strict. Cette anonymisation est pour lui une épreuve de plus.


Sauvé, timbre vert de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.
Sauvé, timbre vert de la Croix-Rouge française, gravé en taille-douce.

D’une part, il doit surmonter la situation dans laquelle il est tombée comme soldat face à un ennemi supérieur en nombre et en matériel, mais il doit affronter d’autre part la mentalité de son époque qui le considère comme un vaincu.


Monsieur Pierre Bonhomme † et d'autres prisonniers de guerre au Stalag III-D, photographie ancienne en noir et blanc (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Monsieur Pierre Bonhomme † et d’autres prisonniers de guerre au Stalag III D, photographie ancienne en noir et blanc (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Il est totalement soumis à l’autorité de ses geôliers allemands : lors de son arrivée, il subit le contrôle de son identité, une fouille intégrale lui est imposée. Ses objets personnels (livres, photographies, etc.) sont momentanément confisqués. Il ne les récupère que quelques jours plus tard, dûment tamponnés.

Freigegeben zur Heimsendung Mannschafts-Stammlager III-D se traduit en français par « Validé pour un envoi à domicile. Stalag III-D », verso d'une photographie ancienne en noir et blanc, encre rouge sur papier photo (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Freigegeben zur Heimsendung Mannschafts-Stammlager III D se traduit en français par « Validé pour un envoi à domicile. Stalag III D », verso d’une photographie ancienne en noir et blanc, encre rouge sur papier photo (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Reims consacre un salon aux prisonniers le 31 mai 1944.
Reims consacre un salon aux prisonniers le 31 mai 1944.

Il passe ensuite par l’étape de l’épouillage des vêtements et du corps. Les effets enlevés sont passés à l’étuve, avant d’être restitués à leur propriétaire. Pendant ce temps, le prisonnier est badigeonné d’insecticide. Malgré cela, tout au long de sa captivité, il est la proie de la vermine[1] et de la dysenterie.


[1] Insectes (poux, puces, punaises) parasites de l’homme et des animaux.


Pour nos prisonniers de guerre, timbre brun carminé en taille-douce.
Pour nos prisonniers de guerre, timbre brun carminé en taille-douce.

La nourriture est plus que frugale et constamment insuffisante. Le repas consiste en quelques louches de soupe claire, un morceau de pain et un tout petit bout de viande. Très vite, le prisonnier est tenaillé par la faim : il ressent une véritable torture physique, même si le gros cul[1] anesthésie momentanément sa souffrance.


[1] Tabac de troupe inférieur au Scaferlati Caporal (le fameux cube de gris). Le terme s’applique tout d’abord à un gros bâtiment de la marine de guerre. Par métonymie, il désigne un marin puis, par extension, un homme de troupe, un soldat.


Conventions de Genève 22 août 1864, timbre premier jour de la Croix-Rouge française.
Conventions de Genève 22 août 1864, timbre premier jour de la Croix-Rouge française.

La faim, la misère, les souvenirs d’un passé plus heureux atteignent leur moral. La dureté de leur vie est parfois atténuée par l’arrivée de colis ou de lettres, qui sont les seuls liens avec leur famille et leur vie antérieure. Le courrier met entre une dizaine et une quarantaine de jours pour parvenir à son destinataire.

Les prisonniers n’ont le droit pour correspondre avec les leurs qu’à deux lettres et deux cartes postales par mois. Ils ont la possibilité de recevoir mensuellement deux colis familiaux d’un kilo chacun et de temps en temps un paquet de cinq kilos.

En outre, ils reçoivent des cartons de la Croix-Rouge contenant entre autres du corned-beef[1], surnommé « singe » de façon argotique.


[1] Dans les pays francophones et depuis la Seconde Guerre mondiale, le corned-beef est connu une préparation culinaire de viande de bœuf habituellement salée, mise en petits morceaux, vendue dans une boîte de conserve métallique.


Prières du prisonnier, exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme †, collection personnelle de l'auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Prières du prisonnier, exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme †, collection personnelle de l’auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Pour ce qui est du réconfort spirituel, certains prisonniers éprouvent le besoin d’assister aux offices, qui sont assurés régulièrement. Dès septembre 1940, en France, l’Aumônerie générale des prisonniers de guerre, fondée par le cardinal Emmanuel Suhard, archevêque de Paris, est reconnue.

A partir de décembre, elle envoie dans les camps de prisonniers des « valises-chapelles », qui contiennent ce qui est nécessaire à la célébration de la messe. C’est ainsi qu’est distribué aux captifs un missel intitulé Prières du prisonnier : quelques simples prières pour rencontrer le Seigneur.

Oraisons supplémentaires tirées de Prières du prisonnier, exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme †, collection personnelle de l'auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Oraisons supplémentaires tirées de Prières du prisonnier, exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme †, collection personnelle de l’auteure. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Famille du prisonnier, timbre vert en taille-douce.
Famille du prisonnier, timbre vert en taille-douce.

Au quotidien, l’organisation du travail est régie par la section III de la convention de Genève du 27 juillet 1929. Son article 27 précise : « Les sous-officiers prisonniers de guerre ne pourront être astreints qu’à des travaux de surveillance, à moins qu’ils ne fassent la demande expresse d’une occupation rémunératrice. »

Bien qu’ils soient comme eux enfermés dans les Stalags, les hommes du rang n’ont pas du tout le même traitement : la plupart du temps, ils sont contraints de travailler dans un Arbeitskommando[1] et donc de rejoindre des fermes, des usines, des carrières.


[1] Kommando concerne ici une unité de travail forcé.


L'Allemand sans peine (méthode Assimil éditée en 1941), exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme † avec référence manuscrite aux Stalags XVII-B Krems-Gneixendorf et Stalag III-D Berlin (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
L’Allemand sans peine (méthode Assimil éditée en 1941), exemplaire de monsieur Pierre Bonhomme † avec référence manuscrite aux Stalags XVII B Krems-Gneixendorf et Stalag III D Berlin (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Le réveil est fixé à cinq heures, les sentinelles allemandes s’adressent bruyamment aux prisonniers avec des « Raus ! Raus[1]! » ou des « Schnell ! Schnell[2] ! », les obligeant à se presser pour le rassemblement sur la place du Stalag. Matinal ou vespéral, il peut durer un long moment. Et ce, quelles que soient les conditions atmosphériques…


[1] « Dehors ! Dehors ! ».

[2] « Vite ! Vite ! ».


Avec Moi, René Tardi, prisonnier de guerre - Stalag II B, Jacques Tardi transpose en bande dessinée les carnets de son père, sur ses années de captivité en Allemagne (collection personnelle de l'auteure).
Avec Moi, René Tardi, prisonnier de guerre – Stalag II B, Jacques Tardi transpose en bande dessinée les carnets de son père, sur ses années de captivité en Allemagne (collection personnelle de l’auteure).

Les prisonniers de guerre sont ensuite dirigés sous escorte vers le lieu de leur travail. La durée du labeur peut alors atteindre treize heures. Il n’est pas exclu qu’ils soient retenus, si nécessaire, les dimanches et les jours fériés.


Pour nos prisonniers de guerre, timbre vert en taille-douce.
Pour nos prisonniers de guerre, timbre vert en taille-douce.

Lorsqu’ils sont libérés à partir d’avril 1945, ils sont en grande partie livrés à eux-mêmes et au bon vouloir des Américains ou des Russes. Ils partent sur des routes défoncées, à travers des paysages dévastés, avant que leur retour vers la France ne soit organisé.


Nomination de monsieur Pierre Bonhomme † au titre de la régularisation de l'avancement des ex-prisonniers de guerre (collection personnelle de l'auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Nomination de monsieur Pierre Bonhomme † au titre de la régularisation de l’avancement des ex-prisonniers de guerre (collection personnelle de l’auteure). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Là, ils doivent retrouver leur travail ou réintégrer leurs unités après un mois de permission, se réadapter à leur vie d’avant et garder souvent le silence sur ce qu’ils ont subi en captivité. De nos jours, la détresse et le découragement de ces hommes se sont peu à peu effacés de la mémoire collective…

Catégories
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La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) à La Romagne


Ordre de mobilisation générale de la Seconde Guerre mondiale, daté du samedi 2 septembre 1939.
Ordre de mobilisation générale de la Seconde Guerre mondiale, daté du samedi 2 septembre 1939.

Dès les premiers jours suivant la mobilisation et la déclaration de guerre le 3 septembre 1939, diverses troupes françaises se trouvent cantonnées, soit à La Romagne, soit dans les villages environnants, comme au hameau Les Duizettes[1].


[1] Commune de Rocquigny.


Campagne de mai et juin 1940 de la 3e brigade de spahis, avec l'aimable autorisation du colonel (er) Thierry Moné.
Campagne de mai et juin 1940 de la 3e brigade de spahis, carte en couleurs (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Thierry Moné, officier de l’arme blindée qui a commandé le 1e régiment de spahis de 1997 à 1999).

Les soldats sont chargés de surveiller l’arrivée de parachutistes et de bloquer l’accès des Hauts Sarts et de la Verrerie aux blindés. Fin octobre, les spahis de la 3e brigade[1]  (formée à partir des 2e RSA[2] et RSM[3]) rejoignent Novion-Porcien et stationnent pour une partie d’entre eux à La Romagne.


[1] Moné, Thierry (colonel en retraite), Les Spahis de La Horgne : la 3e brigade de Spahis dans les combats de mai et juin, Valence : la Gandoura & CRCL [Calot rouge et croix de Lorraine], amicale des spahis du 1er Marocains, 2010, 205 p., pages 9 et 16 [exemplaire personnel n° 290 sur 400].

[2] Régiment de spahis algériens.

[3] Régiment de spahis marocains.


Un Romanais qui a vécu cette époque s’en souvient :

« Leurs uniformes rutilants et leurs chevaux barbes[1] font grande impression sur les habitants. »
[1] Cheval de selle de race orientale.

Témoignage écrit de monsieur Pierre Malherbe †.

Une anecdote l’a marqué particulièrement lorsqu’il était un tout jeune homme :

« Un beau matin, tout contre la porte de la cave d’Henri Mauroy, nous avons vu des spahis qui s’affairaient auprès d’un cheval mort. Ils ont commencé par le dépouiller puis ont étendu la peau sur des perches avant de débiter des morceaux de viande. C’était vraiment un spectacle insolite pour nous. »

Témoignage écrit de monsieur Pierre Malherbe †.

Ces spahis quittent le village pour être d’abord cantonnés dans les forêts avoisinantes, avant d’être dirigés sur Monthermé, puis de prendre part le 15 mai 1940 aux combats de La Horgne.


Le village voit passer encore bien d’autres troupes, en particulier le 31e d’artillerie venant de Saint-Brieuc (Bretagne) [1]. Se succèdent encore le 9e génie, le 10e d’artillerie et enfin le 18e (qui s’y repose et peut soigner ses chevaux blessés)[2].


[1] Deux cents hommes stationnent à la ferme de la Bouloi avant de monter sur la Belgique.

[2] Témoignage oral de monsieur Louis Devie (Logny-lès-Chaumont).


Certaines de ces troupes construisent des baraquements en bordure de la gare de Draize – La Romagne, où l’un de ceux-ci sert de buvette et a pour enseigne « Au pou qui tète »[1], tandis qu’à proximité s’entasse de la ferraille de récupération. D’autres creusent une tranchée-abri sur la place.


[1] Témoignage écrit de monsieur Pierre Malherbe †.


Bien avant le début du conflit, en raison des nombreuses occupations subies par les Ardennes au cours des siècles précédents, la préfecture, forte d’exemples encore dans toutes les mémoires, prend des dispositions dès les années 1930 pour organiser le départ des populations du nord du département.

Des trajets sont tracés, pour que le déplacement éventuel puisse se passer dans les meilleures conditions possibles, en passant par le sud des Ardennes. Les villages de Draize et de La Romagne sont prévus pour accueillir provisoirement une partie de la population de Charleville, qui pourrait ensuite être acheminée vers des zones de repli.


En mai 1940, lors de l’offensive sur l’Aisne, le village, où se trouvent ce jour-là des évacués de la Meuse, est bombardé : une torpille aérienne (projectile de gros calibre) et des bombes causent certes de sérieux dégâts matériels, en particulier sur l’église. Elles concernent surtout des pertes humaines, civiles et militaires : Aimé Vuillemet (le garde champêtre qui annonce l’ordre d’évacuation) et Marthe Mauroy sont tués sur le coup. C’est aussi le cas d’un soldat français du nom de Laurent Stéphane Marie Marchand[1]. Deux autres périssent quant à eux aux abords de la Draize, où ils sont enterrés sur place avant de l’être dans le cimetière paroissial.


[1] Service historique de la Défense, site de Caen, AC 21 P 81257, [série AC = victimes des conflits contemporains, sous-série AC 21 P = MPDR (ministère des Prisonniers, déportés et réfugiés) puis MACVG (ministère des Anciens combattants et victimes de guerre), dossiers individuels].


Le sort s’acharne, ce jour-là, sur la famille d’Aimé Vuillemet : son fils Paul est atteint par un éclat de bombe. Pour l’accueil des blessés, deux infirmeries sont établies dans le village, dont l’une au bord du chemin qui mène à la Cour Avril, et l’autre dans la maison de Marceau Carbonneaux[1].


[1] Témoignage oral de monsieur René Lelong †.


Le 10 mai 1940, l’ordre d’évacuer les Ardennes est donné. Le lendemain, tous les habitants de La Romagne quittent le village le cœur gros, la mort dans l’âme de devoir abandonner leurs bêtes. Par exception, quelques-uns restent : monsieur et madame Ledouble, leur fils Jules et madame Pagnié, qui est assez âgée[1].

Alors que, de longue date, un plan d’enlèvement du bétail a été prévu par les autorités et pour chaque canton[2], il ne peut être appliqué en raison de la rapidité de l’avance des troupes allemandes. Les cultivateurs, bouleversés, doivent laisser leurs bêtes dans les prés.


[1] Témoignage écrit de monsieur Pierre Malherbe †.

[2] Archives départementales des Ardennes, 1M 119 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 1M = administration générale (fonds du cabinet du préfet)].


Après avoir bien inutilement fermé leurs maisons, les habitants partent en exode, les uns en automobile, les autres dans des charrettes tirées par les chevaux qui n’ont pas été réquisitionnés par l’armée. Dès le 2 septembre 1939, les principaux cultivateurs voient partir la plupart de ces animaux de trait. En 1941, il n’en reste plus que vingt-sept sur la petite soixantaine que comptait La Romagne juste avant les réquisitions. Les derniers Romanais partent à vélo ou à pied.


Château de Châtenay à La Chataigneraie (Vendée), photographie en couleurs, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Gréau, président du CHEL (Cercle d'histoire et d'études locales).
Château de Châtenay à La Chataigneraie (Vendée), photographie en couleurs, collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Gréau, président du CHEL (Cercle d’histoire et d’études locales).

L’ordre d’évacuation totale des Ardennes jette sur les routes tous les Ardennais ou presque dans un désordre indescriptible : aucun des plans arrêtés ne peut être mis à exécution, en raison de l’urgence. LesRomanais se replient vers les départements des Deux-Sèvres et de la Vendée. C’est ainsi que la famille Cugnart se retrouve au château de Châtenay à La Chataigneraie (Vendée)[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1M 127 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 1M = administration générale (fonds du cabinet du préfet)].


André Druart (personnage le plus à gauche) à Borcq-sur-Airvault (Deux-Sèvres), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).
André Druart (personnage le plus à gauche) à Borcq-sur-Airvault (Deux-Sèvres), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).

Eugène François Lesein rejoint Rosnay (Indre) en passant par Mareuil-sur-Lay-Dissais (Vendée). Numa Edmond Lesein atteint Saint-Sulpice-en-Pareds (Vendée), tandis que la famille Druart est à Borcq-sur-Airvault (Deux-Sèvres). Dans cette commune, après des moments difficiles à vivre, une rencontre se concrétisera par un mariage.


Quelques habitants de La Romagne (Ardennes) réfugiés dans une école privée à Gourdon (Lot) en juillet 1940, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †). Sous toutes réserves, les personnes identifiées de gauche à droite et de bas en haut seraient les suivantes : au premier rang, Rosa Malherbe née Bompart (n°2), Euphrasie Bompart née Marandel (n°3), Marcel Malherbe (n°4), Lucie Malherbe (n°5), René Malherbe (n°6), Maurice Malherbe (n°7) ; au deuxième rang : André Legros (n°2), Lucie Legros née Malherbe (n°4), Madeleine Legros (n°6), Alfred Marandel (n°7), Pierre Malherbe (n°9), Pierre Marandel (n°10), René Didier(n°11), Lucie Laroche (n°12), Madame Didier (n°13).
Quelques habitants de La Romagne (Ardennes) réfugiés dans une école privée à Gourdon (Lot) en juillet 1940, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †). Sous toutes réserves, les personnes identifiées de gauche à droite et de bas en haut seraient les suivantes : au premier rang, Rosa Malherbe née Bompart (n°2), Euphrasie Bompart née Marandel (n°3), Marcel Malherbe (n°4), Lucie Malherbe (n°5), René Malherbe (n°6), Maurice Malherbe (n°7) ; au deuxième rang : André Legros (n°2), Lucie Legros née Malherbe (n°4), Madeleine Legros (n°6), Alfred Marandel (n°7), Pierre Malherbe (n°9), Pierre Marandel (n°10), René Didier(n°11), Lucie Laroche (n°12), Madame Didier (n°13).

D’autres habitants trouvent refuge dans des lieux divers, non envisagés au départ. Certains font une étape à Coulanges-sur-Yonne (Bourgogne), avant d’atteindre Gourdon (Lot), où ils retrouvent les familles Malherbe, Legros, Didier, Marandel, etc. Les familles Devie et Bonhomme sont logées près d’Issoudun (Indre), au moulin de la Bonde.


Le préfet des Ardennes, qui se trouve à Sainte-Hermine (Vendée), constate dans un de ses courriers que les conditions dans lesquelles s’est produite l’évacuation n’ont pas toujours permis de diriger la population repliée dans les communes initialement assignées[1]. La Romagne en est l’illustration parfaite.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1M 123 [série M = administration générale et économie depuis 1800, sous-série 1M = administration générale (fonds du cabinet du préfet)].


Portrait de Joseph Dominique Albertini en uniforme militaire, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Marie-Hélène Beltrami).

Quoique l’armistice soit signé le 17 juin 1940, de nombreux Romanais faits prisonniers ne rentrent qu’au bout de plusieurs années : c’est le cas par exemple d’Achille Cotte[1] ou de Dominique Albertini. Pour la plupart, ces soldats ne sont libérés qu’en 1945.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1145 W 10 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Le retour se fait très difficilement, et de manière échelonnée : dès le 1er juillet 1940, une zone interdite située au nord de l’Aisne est établie dans le département, et englobe le village. Pour rentrer, des laissez-passer sont nécessaires. Ils sont accordés selon le bon vouloir des autorités allemandes, qui multiplient les tracasseries administratives.


Les agriculteurs se demandent ce que sont devenues leurs cultures et leurs bêtes en leur absence. Seuls quelques-uns d’entre eux (comme André Didier ou Adolphe Macquin) peuvent rentrer à cette date.

L’absence de la majorité des exploitants permet aux Allemands de s’emparer aussitôt de terres : Alcide Cugnart, Alexis Boudaud et Alfred Devie (mais ce ne sont pas les seuls[1]) se voient confisquer respectivement vingt-quatre, trente-cinq et quarante-deux hectares. En outre, l’occupant leur prend leur matériel (faucheuse, moissonneuse, brabants, tombereaux, herses et râteaux), sous le prétexte fallacieux d’abandon.


[1] Archives départementales des Ardennes, 11R 89 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 11R = services temporaires de la période de guerre 1939-1945].


Le retour définitif du plus grand nombre s’étale sur presque toute l’année 1941, avec un pic en mai. Et ce n’est qu’en novembre que s’effectue le retour du dernier, Aristide Carbonneaux-Fétrot.

Date du retour à La Romagne (Ardennes)Nom du cultivateur
Juillet 1940Didier, André
Novembre 1940Macquin, Adolphe
1er mars 1941Lesein, Edmond
20 avril 1941Cotte, Achille (de retour d’un camp de prisonniers de guerre)
1er mai 1941Bocquet-Huet, Ernest
1er juillet 1941Marquigny, Joseph
3 juillet 1941Devie, Paul (de retour d’un camp de prisonniers de guerre)
1er août 1941Devie, Alfred
11 août 1941Boudaud, Jean-Baptiste
24 septembre 1941Chrétien, Gustave Henry
Non préciséeMarandel, Ernest
Non préciséeCugnart, Alcide
1er novembre 1941Legros, Auguste
9 novembre 1941Carbonneaux-Fétrot, Aristide
Quelques exemples du retour des cultivateurs à La Romagne (Ardennes) après l’exode de mai 1940.

Les Romanais dont le retour a lieu le plus tôt, c’est-à-dire en juillet 1940, retrouvent d’emblée La Romagne occupée par des troupes allemandes, dont une partie s’est installée dans l’école[1], et qui ne quitteront le village qu’en juin 1941.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1 W 5 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


En revanche, ceux qui reviennent après janvier 1941 ont la fâcheuse surprise de découvrir qu’ils ne peuvent réintégrer leur exploitation qu’à condition de travailler comme salariés agricoles de l’Ostland[1].

Cette situation entraîne des frictions et des plaintes auprès du procureur de La République, notamment lorsque certains des derniers rentrés découvrent chez leurs voisins du matériel ou du bétail qui leur appartenait autrefois, et qui aurait été « confié » par les Allemands.


[1] Ostdeutsche Landbewirtschaftung-gesellschaft ou Société agricole d’Allemagne orientale, créée par le ministre de l’Alimentation et de l’agriculture du Reich allemand.


Emprise de la WOL (Wirtschaftsoberleitung) à La Romagne, Archives départementales des Ardennes, 12 R 144, [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 12R = archives des services allemands pendant la guerre de 1939-1945].
Emprise de la WOL (Wirtschaftsoberleitung) à La Romagne, Archives départementales des Ardennes, 12 R 144, [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 12R = archives des services allemands pendant la guerre de 1939-1945].

L’Ostland applique dans les Ardennes un programme de confiscation de terres, comme cela a été fait peu de temps auparavant en Pologne. Cette société est représentée par la WOL[1], à la tête de laquelle se trouve le directeur départemental, établi à Charleville. Un Kreislandwirt[2] est nommé par arrondissement. Un Bezirkslandwirt[3] contrôle chaque canton. Un Betriebsleiter[4] réside dans la commune qu’il supervise, ou vit à proximité immédiate.


[1] Wirtschaftsoberleitung (service de mise en culture).

[2] Agriculteur d’arrondissement.

[3] Agriculteur de canton.

[4] Gérant, c’est-à-dire un chef de culture.


Ce dernier est un civil allemand qui applique une nouvelle politique agricole : l’occupant trouve que la culture ardennaise comporte trop de prés et de bois. Les paysans, désormais sous la férule germanique, doivent travailler en commun toutes les terres pour les emblaver[1] le plus possible, sans tenir compte des possessions de chacun[2]. En témoigne l’enlèvement des bornes marquant les limites des propriétés (Il faudra les remettre en place une fois la guerre terminée).


[1] Ensemencer en blé.

[2] Archives départementales des Ardennes, 1 W 35 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Cette prise de terres concerne quelque deux cent un hectares, rien que pour La Romagne (dont cinquante de cultures et cent cinquante et un de pâtures). Pour lui donner un aspect de légalité, les Allemands la notifient au préfet, qui doit à son tour en informer le propriétaire et le maire du village.


Ensuite, ce sont les bâtiments pour abriter les récoltes qui sont réquisitionnés (la grange de La Romagne n’est rendue à son usage premier que le samedi 31 mars 1945). Des maisons sont saisies pour servir de logement à des ouvriers travaillant pour le compte de la WOL de Draize (c’est le cas de bâtiments appartenant à Joseph Marquigny[1]).


[1] Archives départementales des Ardennes, 11R 409 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 11R = services temporaires de la période de guerre 1939-1945].


Au moment de l’invasion allemande, la Romagne compte trente-deux exploitations, dont vingt ont moins de vingt hectares. Parmi les douze restantes, seules deux ont une superficie comprise entre cinquante et cent ha[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 56 W 37 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


La reprise est difficile pour la campagne 1940/1941, car peu de sols peuvent être ensemencés (environ vingt-deux ha), et ce n’est qu’en 1942 que les terres sont à nouveau cultivées. Les exploitants se heurtent alors à de nouvelles obligations, puisqu’ils sont contraints de déclarer leurs récoltes et de les livrer à des organismes stockeurs. S’ils n’ont pas le matériel nécessaire, ils doivent faire appel obligatoirement à l’entrepreneur de battage désigné par l’occupant.


Aussitôt les habitants partis, des vols de bétail se produisent, des troupeaux d’armée sont formés. Le bétail errant devient propriété de la WOL, qui le confie à certains agriculteurs du village. Ce n’est qu’après bien des palabres, des démarches et des menaces que deux cultivateurs (Messieurs Cugnart et Lesein) parviennent à récupérer chacun… une bête[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1050 W 57 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Cette situation contraste fortement avec ce qui se passe du côté allemand, selon un Romanais qui a connu cette période :

« Une quarantaine de vaches confisquées par la WOL se trouvaient à la ferme de la Bouloi et étaient traites par des femmes d’origine polonaise. »

Témoignage oral de monsieur Louis Devie (Logny-lès-Chaumont), dont les parents étaient les propriétaires de cette ferme.

Lorsque la vie agricole reprend à La Romagne en 1941, il ne reste plus que cent un bovins. Les quelques attributions de bétail qui sont accordées sont fort modestes : à plusieurs reprises, une commission cantonale ne concède qu’une ou deux bêtes. Malgré toutes les difficultés endurées, il y en aura deux cent douze à la fin de l’année 1943.

À la suite de la disparition de la WOL, les attributions de bétail sont alors plus importantes. Il ne faut cependant pas croire que le cultivateur dispose comme il l’entend de sa production laitière. Il doit se conformer en cela (et comme pour le reste) aux décisions allemandes.


La Romagne doit fournir trente kilos de beurre par semaine, et la commune de Givron est contrainte d’en procurer cinq. Le responsable de la Kommandantur de la Romagne exige du maire de Montmeillant que tout le beurre fabriqué dans sa commune lui soit livré, sinon il sera arrêté une nouvelle fois.

La production ne peut aller qu’aux Allemands, qui achètent ce beurre 28 francs le kilo. Ces quantités de beurre représentent mille quatre cents à mille cinq cents litres[1] de lait. Pour se rendre compte de l’exigence, il faut savoir qu’une vache laitière en produit environ mille quatre cent soixante litres par an.


[1] Archives départementales des Ardennes, 1 W 35 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Comme les troupeaux n’ont plus rien à voir avec ceux d’avant-guerre, les laiteries ne peuvent pas s’approvisionner normalement. Ces contraintes provoquent en particulier les doléances des établissements Hutin Frères[1], qui font le ramassage dans tout le secteur depuis longtemps, et qui sont désormais obligés de « faire un long trajet sans obtenir un seul litre de lait, en raison des contraintes de la Kommandantur ».


[1] Laiterie de La Neuville-lès-Wasigny (Ardennes).


D’autre part, les habitants font face à des difficultés de ravitaillement, tant alimentaire que vestimentaire. Les tickets de rationnement font leur apparition et parfois la chasse nocturne aux grenouilles menée par des jeunes gens du village améliore l’ordinaire des quelques habitants qui en bénéficient[1]. Les occupants manifestant un profond dégoût pour ces animaux, ils ne risquent pas de les confisquer à leur profit !


[1] Témoignage écrit de monsieur Pierre Malherbe †.


Adaptation au gazogène du camion de la cidrerie Malherbe à La Romagne (Ardennes), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).
Adaptation au gazogène du camion de la cidrerie Malherbe à La Romagne (Ardennes), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).

Pour ce qui est des vêtements, le canton de Chaumont dispose pour l’ensemble des communes qui en font partie d’un certain nombre de points, qui doivent être répartis en fonction du nombre d’habitants de chaque village. Un cahier des attributions est tenu.

C’est ainsi que l’on sait qu’il faut douze points pour acquérir un blouson, et vingt-cinq pour un pantalon de travail. Quant au carburant, il est parcimonieusement attribué, obligeant chacun à modérer son utilisation des moyens de transport.


Rares sont les habitants (pour ne pas dire aucun), qui retrouvent leur maison intacte. La cidrerie, installée dans le village depuis les années vingt, est pillée : l’armée de l’occupant se serait livrée à diverses rapines, dont celui de vins et spiritueux[1].

Ce ne sont certainement pas les seuls responsables : entre le 11 mai (jour du départ des habitants) et la prise du village par les Allemands le 14 mai, des troupes françaises et des réfugiés belges ont traversé la commune et y ont aussi probablement participé.


[1] Archives départementales des Ardennes, 13R 1661 [série R = affaires militaires, organismes de temps de guerre, sous-série 13R = dommages de guerre 1939-1945].


Périodiquement, le maire reçoit de la part des autorités allemandes des demandes de cantonnement. Il essaie d’y répondre le plus possible par la négative, arguant de l’état du village, avec ses maisons inhabitables et le pillage déjà subi[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1 W 35 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Les habitants entendent passer régulièrement des bombardiers allemands qui se dirigent vers l’Angleterre.

« Parfois, les avions ennemis perdent en cours de route des réservoirs, ce qui est attesté par ceux retrouvés aux Houis ou dans le bois d’Angeniville. D’autre part, les Allemands ont installé des radars à Doumely, mais aussi entre Marlemont et Signy-l’Abbaye, et un mirador sur la route des Fondys. »

Témoignage oral de monsieur René Lelong †.

Fernand Mennessier récupérant des débris d'avion du côté de Fraillicourt (Ardennes), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Michel Mauroy).
Fernand Mennessier récupérant des débris d’avion du côté de Fraillicourt (Ardennes), photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Michel Mauroy).

Puis c’est le tour de bombardiers anglais, partant ou revenant de leur mission sur le territoire allemand. Comme ceux-ci, pourchassés par l’aviation ennemie, s’écrasent parfois dans des communes voisines (comme à Novion-Porcien, Fraillicourt ou Rocquigny), ce spectacle ajoute à l’horreur vécue par les populations.


La présence allemande est encore plus pesante lorsque la loi sur le STO[1] est promulguée. Elle concerne des jeunes gens de la commune ou y ayant des attaches, nés entre 1919 et 1923. Une vingtaine d’hommes sont concernés pour ces quatre années, dont Raymond Mauroy, Pierre Malherbe et Robert Laroche.


[1] Service du travail obligatoire.


Couverture de la brochure, non paginée, sans mention d'édition, Travailler en Allemagne, c'est gagner sa vie dans de bonnes conditions, Archives départementales des Ardennes, 1 W 151-3 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].
Couverture de la brochure, non paginée, sans mention d’édition, Travailler en Allemagne, c’est gagner sa vie dans de bonnes conditions, Archives départementales des Ardennes, 1 W 151-3 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].

A partir de 1942, l’Allemagne a besoin de travailleurs, car nombre de ses ouvriers ont été mobilisés sur le front russe. Le recrutement d’ouvriers français volontaires est fondé sur la relève, instaurée dès le mois de juin. Un prisonnier est libéré contre trois ouvriers s’engageant à travailler en Allemagne.

Très rapidement, la donne change et c’est une libération accordée pour sept travailleurs qui s’engagent. Une importante propagande vantant les conditions de travail, de salaire, etc. accompagne la politique de collaboration du régime de Vichy.

Au-delà des avantages sociaux, l'Allemagne nazie vante aux travailleurs français les loisirs mis en place dans ses usines.
Au-delà des avantages sociaux, l’Allemagne nazie vante aux travailleurs français les loisirs mis en place dans ses usines.

En réalité, peu d’hommes se laissent ainsi séduire. C’est pourquoi l’Etat français fait parvenir des notes d’orientation hebdomadaire aux préfets pour rappeler que l’effort de propagande pour la relève ne doit pas se ralentir. L’argument est qu’en partant les ouvriers serviraient la cause de la France[1], ou que les prisonniers seraient d’autant plus nombreux à rentrer que le rythme de départ d’ouvriers serait plus important[2].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1 W 150, note d’orientation hebdomadaire n° 12 en date du 16 octobre 1942 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].

[2] Archives départementales des Ardennes, 1 W 150, note d’orientation hebdomadaire n° 15 en date du 6 novembre 1942 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


La pression des autorités sous l’Occupation se fait sentir de plus en plus : en 1942, elle exige l’envoi de trois cent cinquante manœuvres non spécialisés. En 1943, il y a environ deux mille départs pour tout le département, qui compte deux cent vingt-six mille habitants[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, 1 W 150 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Chaque travailleur se rendant en Allemagne doit être en possession d’un passeport valable. Cette demande est souscrite avec la plus grande sincérité et exactitude dès son arrivée.

Dans une lettre de la préfecture de police de Paris au préfet des Ardennes à Mézières en date du 2 février 1943, on apprend que Raymond Mauroy se trouve en Allemagne depuis le 30 novembre 1942 et qu’il a fait une demande de passeport le 17 janvier 1943 lors de son arrivée[1] à Solingen (Rhénanie-du-Nord-Westphalie). Il sera de même pour Pierre Malherbe et Robert Laroche.


[1] Archives départementales des Ardennes, 112 W 11 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


En vertu d’un arrêté ministériel du 25 novembre 1942 et d’un arrêté préfectoral du 10 décembre 1942, chaque commune est obligée d’effectuer un recensement général des travailleurs disponibles : ce dernier concerne tous les hommes de dix-huit à cinquante ans. Ils sont ensuite répartis en différentes catégories (âge, situation familiale, etc.).

Il apparaît qu’un certain nombre de villages ardennais ne sont pas pressés de répondre à cette demande : c’est le cas de La Romagne, Givron, Rocquigny, Sery, Le Fréty, etc. Ils sont rappelés à l’ordre.


A partir de cette époque, ce recrutement a un caractère quasi obligatoire, et les réfractaires sont poursuivis beaucoup plus activement. Cette recherche, opérée par la gendarmerie, n’est pas sans créer des tensions entre la maréchaussée et la population. Elle entraîne aussi des scrupules chez les gendarmes, si bien que quelques-uns d’entre eux ne manifestent pas pour ce genre de mission une ardeur à toute épreuve.

Ils laissent parfois échapper une information sur la date et le but de leur tournée : les concernés peuvent ainsi trouver refuge dans l’environnement forestier du village. Pour se soustraire à ce recrutement, André Barré rejoint le maquis de Signy-l’Abbaye et le groupe de Draize, sous la direction de Fernand Miser.

Cet insigne des troupes de forteresse (secteur fortifié des Ardennes) est un symbole de résistance.
Cet insigne des troupes de forteresse (secteur fortifié des Ardennes) est un symbole de résistance.

Carte de travail et certificat de libération[ArbeitskarteBefreiungsschein], travail auxiliaire [Hilfsarbeit] dans l’usine de Volkswagen [Volkswagenwerk], ville de la Coccinelle [Stadt des KdF.-Wagens], arrondissement de Gifhorn [Krs. Gifhorn], collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †.

Dans des rapports en provenance de la brigade de Chaumont-Porcien datant de mars et juin 1943, le brigadier évoque que le regard de la population change à leur égard, dans la mesure où la gendarmerie est intervenue non seulement lors de réquisitions pour l’Allemagne, mais aussi en raison du STO.

Dans son compte rendu de septembre, il insiste sur la répugnance éprouvée par les militaires par rapport aux ordres concernant le STO, soulignant qu’ils n’agissent que par contrainte et discipline, ce qui les met en porte-à faux vis-à-vis de la population.

Dans un autre document, il souligne que, de mars 1943 à mai 1944, quatre-vingt-huit recherches de réfractaires au STO sont restées infructueuses dans le canton. Par là, il laisse flotter l’idée que, sans rien dire, les gendarmes n’auraient pas apporté tout le zèle requis, afin d’être en accord avec leur conscience[1] .


[1] Service historique de la Défense, département de la Gendarmerie, site de Vincennes, 8E 226, registre de correspondance confidentielle au départ (R/4) du 16 septembre 1942 au 14 décembre 1946 [série E = compagnies puis groupements de gendarmerie départementale, sous-série 8E = compagnie de gendarmerie départementale des Ardennes (1917-1946), article 8E 226 = brigade territoriale de Chaumont-Porcien, 1942-1946].


Vadon, Jacques, Secteurs et maquis de la Résistance ardennaise, Archives départementales des Ardennes, 1 Fi 132 [série Fi = documents figurés, cartes, plans, gravures, cartes postales, photographies, dessins, sous-série 1Fi = documents de dimensions 24 * 30 cm et au-dessus].
Vadon, Jacques, Secteurs et maquis de la Résistance ardennaise, Archives départementales des Ardennes, 1 Fi 132 [série Fi = documents figurés, cartes, plans, gravures, cartes postales, photographies, dessins, sous-série 1Fi = documents de dimensions 24 * 30 cm et au-dessus].

Le maquis de Signy-l’Abbaye se livre à des actions ciblées vers les moyens de communications pour déstabiliser l’ennemi. En réaction, ce dernier fait surveiller les chemins de fer, en particulier ceux de la ligne Hirson – Charleville, mais en vain : les partisans continuent leurs opérations. De ce fait, des restrictions de la liberté de circuler pour les habitants du secteur sont appliquées. Le couvre-feu est ramené à 20 heures au lieu de 22 heures.


La Résistance fournit également son aide lors de parachutages (un terrain est créé à Chaumont-Porcien) ou assiste des clandestins qui souhaitent rejoindre les maquisards[1]. De juin à août 1944, son action s’intensifie, tandis que des destructions de matériel ont lieu contre des biens utilisés au profit des Allemands, comme à Saint-Jean-aux-Bois ou à Wasigny[2]. Les voies ferrées sont sabotées afin de retarder l’armée allemande dans son action.


[1] Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, FOL-D1 MON-36, Giuliano, Gérard ; Lambert, Jacques, Les Ardennais dans la tourmente : l’Occupation et la Libération, Charleville-Mézières : Terres ardennaises, 1994, 453 p., page 159 [Contient un choix de documents et de témoignages.]

[2] Archives départementales des Ardennes, 1050 W 116 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene : les fonds contemporains reçoivent, au moment de leur versement, un numéro d’ordre suivi de la lettre W].


Pont du chemin de fer de La Romagne, repérage topographique des lieux-dits de La Romagne (Ardennes) effectué avec monsieur Christian Beltrami le jeudi 24 mars 2022. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Pont du chemin de fer de La Romagne, repérage topographique des lieux-dits de La Romagne (Ardennes) effectué avec monsieur Christian Beltrami le jeudi 24 mars 2022. Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Dès le début de l’année, après avoir étudié le plan vert[1], André Point dit « commandant Fournier » [2] propose des déraillements sur certaines lignes, ce qui en rendrait l’exécution beaucoup plus facile.

Les coupures prévues sur la ligne de Liart – Amagne auraient lieu entre Montmeillant et Draize – La Romagne puis entre Novion-Porcien et Amagne[3]. Ces suggestions sont acceptées malgré l’arrestation d’un responsable de la SNCF et d’une équipe plan vert[4].

Elles permettent de répondre aux instructions données par la Résistance de se préparer à une insurrection nationale, en perturbant les transports et en lançant des actions contre les troupes de l’Occupation.


[1] Qui a pour but de neutraliser les voies ferrées.

[2] Chef de la Résistance ardennaise, membre de l’OCM (Organisation civile et militaire).

[3] Archives départementales des Ardennes, 1393 W 9 [série W = archives publiques entrées par voie ordinaire (hors état civil, officiers publics et ministériels). Nota bene