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Poste, télégraphe et téléphone à La Romagne


Le roi Louis XI est le créateur de la poste d'Etat.
Le roi Louis XI est le créateur de la poste du roi par relais (journée du timbre 1945).

Le service de la poste est un service très ancien, dont la création remonte à 1477 sous le règne de Louis XI. Cet établissement a un double but : l’acheminement des dépêches et des voyageurs. Il perdure jusqu’après la Révolution. Le bureau de poste desservant alors La Romagne et les villages environnants est, soit celui de Wasigny (comme l’indique le curé dans l’enquête paroissiale de 1774), soit celui de Rethel. Ce dernier est l’un des sept existant pour le secteur ardennais depuis 1700. Ensuite, et selon l’importance de la paroisse, le courrier est distribué une ou deux fois par semaine

Le blason communal de Wasigny (Ardennes) est écartelé aux un et quatre d’argent au loup courant de sable, aux deux et trois d’azur à la gerbe de blé d’or.
Le blason communal de Wasigny (Ardennes) se décrit comme écartelé aux un et quatre d’argent au loup courant de sable, aux deux et trois d’azur à la gerbe de blé d’or.

Un facteur rural en 1830, journée du timbre, émission premier jour du 18 mars 1968 à Charleville-Mézières.
Un facteur rural en 1830, journée du timbre, émission premier jour du 18 mars 1968 à Charleville-Mézières.

A partir de la Révolution, la marque de l’origine du département figure sur la lettre et ce sera le chiffre 7 qui l’identifiera jusqu’en 1875, date à laquelle il est remplacé par le nom du département. D’autre part, le bureau d’où part le courrier est distingué par un autre numéro. A partir de 1835, le bureau de Chaumont-Porcien est créé et porte le n° 825. En 1866, celui de Rocquigny ouvre. Ce sont ces deux- là qui successivement ont desservi La Romagne.

Le développement de l’instruction primaire et la suppression de la taxe des lettres, établie d’après la distance au profit d’une taxe fixe et uniforme, vont petit à petit accroître le volume du courrier. Lors de leurs tournées, les facteurs ruraux se doivent d’avoir sur eux en permanence des timbres, afin que tous puissent s’en procurer facilement.

Ces agents postaux ou « piétons » existent depuis la Révolution : le citoyen Jean-Baptiste Canon assure ce service pour La Romagne. Jusqu’à l’installation des boîtes aux lettres, c’est à eux que l’on confie le courrier à expédier. Leur tâche est pénible, puisqu’il leur faut parcourir chaque jour de longs trajets, et ce quel que soit le temps. Il n’en est pour preuve que le fait divers suivant : le 25 mai 1846, vers 10 heures du matin, Gérard Peltier âgé de 37 ans fait sa tournée dans le village. Il se présente au domicile d’Hubert Laroche, où il décède brutalement. Est-il victime d’une très grande fatigue, de chaleur précoce ou d’un malaise ? Rien ne permet d’avancer une explication.

Plaque de facteur rural du service des postes.
Plaque de facteur rural du service des postes.

Le facteur rural dans la grand-rue de La Romagne , carte postale ancienne (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur René Malherbe).
Le facteur rural dans la grand-rue de La Romagne (Ardennes), carte postale ancienne (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).

Jusqu’en 1897, les facteurs ruraux sont rémunérés proportionnellement à l’étendue du parcours effectué, qui peut aller jusqu’à 32 km. Mais ce cas est assez peu répandu. Au cours de leur vie professionnelle, en fonction de leur avancée en âge, et en raison de leur impossibilité de faire d’aussi grands parcours, ils demandent de plus petites tournées, ce qui fait diminuer leurs salaires. C’est pourquoi une expérience menée au sein de cinq départements, dont celui des Ardennes, aboutit à donner aux facteurs un traitement fixe.

Depuis 1853 environ, il existe un système de voitures de nuit qui font la liaison Rethel Rocquigny pour y déposer le courrier. Un peu plus tard, elles font le tour par Chaumont-Porcien, Wasigny et Novion, avant de rejoindre Rethel. Par la suite, cet acheminement se fait par les trains de marchandises, bien que ceux-ci ne fonctionnent pas tous les jours. C’est pourquoi leur circulation journalière est demandée par les édiles du canton.

Bien que l’on connaisse peu de messagers effectuant la tournée du village, on sait cependant qu’en 1866, c’est Jean-François Devie puis, de 1867 à 1875, François-Pierre Mauroy qui s’en charge.

Un relais de poste (journée du timbre du
Un relais de poste (journée du timbre 1973).

Ancienne boîte aux lettres de La Romagne, située sur le mur de la salle des fêtes (ancienne école), rue des Fondys, photographiée en 2017 (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).
Ancienne boîte aux lettres de La Romagne, située sur le mur de la salle des fêtes, rue des Fondys, photographiée en mars 2017 (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).

Les bureaux de poste vont se multiplier à partir de 1850 à travers le département. Lorsque les boîtes aux lettres sont installées, une à deux levées sont instaurées chaque jour. Les distributions sont journalières, et ce même le dimanche, comme le confirme une délibération du conseil municipal en juillet 1919.

Or, ces levées et distributions ne donnent pas toujours satisfaction quant à leurs horaires. Diverses propositions et demandes sont faites, sans qu’on ne trouve jamais le bon équilibre.

Boîte aux lettres de La Romagne actuellement en service, située sur le mur de la salle des fêtes (ancienne école), rue des Fondys, photographiée en avril 2021 (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).
Boîte aux lettres de La Romagne actuelle, située sur le mur de la salle des fêtes (ancienne école), rue des Fondys, photographiée en avril 2021 (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).

La boîte aux lettres de La Romagne a visiblement essuyé pendant de nombreuses années les intempéries typiques des Ardennes. Son état est un indice de la dureté du métier de facteur rural.
La boîte aux lettres de La Romagne a visiblement essuyé pendant de nombreuses années les intempéries typiques des Ardennes. Son état est un indice de la dureté du métier de facteur rural.

Dès 1890, des récriminations s’élèvent : en effet, les dépêches arrivent en gare de Draize – La Romagne vers 6 h 30 pour être acheminées au bureau de  Chaumont  dans la matinée, quoique la distance ne soit que de 6 km. Or, la route est accidentée, les pentes dangereuses pour des voitures à chevaux qui sont, pour la plupart du temps, obligées de circuler au pas.

Les habitants de Chaumont aimeraient bien bénéficier des passages des autres trains à Draize pour avoir un second service de voiture. Ce dernier pourrait également être utile à ceux qui souhaiteraient prendre le train. Ainsi, la voiture ne circulerait jamais à vide et les habitants bénéficieraient d’une possibilité d’une seconde distribution. Cette requête ne semble pas avoir abouti[1] .


Modèle officiel de boîte aux lettres fabriquée pour la poste par la maison Foulon en 1930.
Modèle officiel de boîte aux lettres fabriquée pour la poste par la maison Foulon, en service entre les années 1930 et 1950.

Une fois à Chaumont, le courrier pour Rocquigny et ses environs est trié puis acheminé quelque temps après, ce qui a pour conséquence de mal desservir les commerçants, les notaires, et d’occuper les facteurs ruraux au plus fort de la chaleur en été.

La mise en place d’une organisation stable et rationnelle semble difficile pour l’administration des postes, si l’on tient compte qu’en quelque six mois entre 1907 et 1908, le service a dû faire appel à une dizaine de transporteurs différents pour faire la liaison de la gare de Draize à Chaumont.

En 1931, à des fins d’amélioration, la Poste envisage dans la région de Chaumont-Porcien la création d’un circuit automobile rural qui pourrait satisfaire les communes.


[1] Archives départementales des Ardennes, DEP/ARDENNAIS 22, « Chronique locale et régionale », in Le Petit Ardennais : journal politique [« puis » journal républicain] quotidien. 1re année, n° 1 du 31 mars 1880-35e année, n° 11991 du 25 août 1914. Charleville : [s.n.], 1880-1944, onzième année, n° 3484, vendredi 5 septembre 1890, p. 2 [presse locale ancienne, vue 2/4, consultable en ligne].


Le service des postes & télégraphes vend des bulletins de communication à partir des cabines publiques.
Le service des postes & télégraphes vend des bulletins de communication à partir des cabines publiques.

En dehors du courrier, un autre moyen de relier les habitants de La Romagne est le téléphone. Le Préfet des Ardennes propose en 1899 un projet d’organisation de réseau départemental. Ceci nécessite la mise en place d’un très important emprunt de 600 000 francs remboursable sur 30 ans. La Romagne pourrait se rattacher à ce projet. Mais elle attendra 1906 pour que cela soit effectif et que ce service assure aussi l’échange des télégrammes.

Emission premier jour représentant le télégraphe Chappe à l'occasion du bicentenaire de cette invention.
Emission premier jour représentant le télégraphe Chappe à l’occasion du bicentenaire de cette invention.

Le premier gérant choisi pour ce service est monsieur Varlet en raison de ses qualités de boulanger, épicier, aubergiste. Le local est l’une des pièces de la maison dans laquelle il exerce déjà. Afin que le service fonctionne sans interruption et sans attente, sa femme est désignée comme suppléante.


Madame Mariette Lesein, gérante de la cabine téléphonique de La Romagne, et monsieur Edmond Lesein (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur Eric Lesein).
Madame Mariette Lesein, gérante de la cabine téléphonique de La Romagne, et monsieur Edmond Lesein (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Eric Lesein).

La première guerre mondiale et l’occupation allemande de tous les villages environnants met fin à ce service. Ce n’est qu’en juin 1921 que le bureau de La Romagne, tout comme ceux de Draize et de Givron, est rouvert au public[1].

Parmi les gérants successifs de cette cabine téléphonique, on notera Léon Briard, Gaston Boudsocq, Mariette Lesein née Henri, Adrien Ravignon et madame Van der Beke.


[1] Bibliothèque Carnegie, PER CH Atlas 2, « P. T. T. service téléphonique » [rubrique Ardennes] in Le Courrier de la Champagne : journal de Reims, 20e année, n° 1 (23 janv. 1854)-34e année, n° 4123 (7 mai 1868) ; 34e année (8 mai 1868)-? ; 85e année, n° 1 (30 avr. 1919)-87e année (25 sept. 1921), Reims : [s.n.], 1854-1921, 87e année, dimanche 5 juin 1921, p. 3 [presse locale ancienne, vue 3/4, consultable en ligne].


Enveloppe premier jour du centenaire du téléphone.
Enveloppe premier jour du centenaire de l’invention du téléphone par Graham Bell en 1876.

Rares sont les particuliers qui possèdent personnellement une ligne téléphonique jusqu’à l’après-guerre, en dehors des Etablissements Malherbe qui ont été les premiers. En 1954, le téléphone rural automatique est installé à La Romagne. Le développement du fixe et du portable fera disparaître définitivement ces cabines du village.

Photographie de la dernière cabine téléphonique publique de La Romagne prise en avril 2017 (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).Dernière cabine téléphonique publique de La Romagne photographiée en avril 2017 (collection privée, avec l'aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).
Dernière cabine téléphonique publique de La Romagne photographiée en 2017 (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Daniel Sené).