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L’enseignement donné aux élèves à La Romagne


Outre l’accent mis sur l’enseignement de l’écriture et de la lecture, la loi Guizot du 28 juin 1833 organise l’enseignement primaire en trois divisions correspondant à l’âge des enfants.


La première regroupe les six/huit ans, qui se doivent d’apprendre l’instruction morale et religieuse à travers le catéchisme et l’histoire sainte, deux matières incluses dans le programme. En outre, l’élève fait l’apprentissage de l’écriture, de la lecture à haute voix et des premières notions de calcul.


Dans la deuxième division, les huit/onze ans voient s’ajouter au programme de base l’étude de la langue française (et notamment de sa grammaire), des rudiments d’histoire et de géographie, avec éventuellement un peu de chant et de dessin.


Quant aux plus grands, ils approfondissent les notions reçues précédemment. Un point concerne l’enseignement particulier donné aux filles : elles doivent être exercées aux travaux de leur sexe, et en particulier à la couture.


Pour toutes ces divisions, le maître doit recommander la propreté du corps ou des vêtements, et punir ceux qu’il trouve en défaut sur ces points.


L’enseignement primaire n’est pas le seul à susciter de l’intérêt pour améliorer le sort de la population : dès la monarchie de Juillet (qui succède en 1830 à la Restauration, après la révolution de Juillet), des tentatives voient le jour pour développer d’autres formes d’instruction (comme l’enseignement agricole, qui vise une meilleure formation des cultivateurs).


Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-1197055, Dupuy, Charles (sous la direction de) ; Matruchot, Louis (auteur), Livret de botanique agricole [opuscule de l’élève] : questions – réponses – sujets de rédaction (L'Année du certificat d'études), Paris : Armand Colin, 1894, 1 vol. (38 p.), page non paginée, vue 3/44, consultable en ligne sur Gallica, texte reproduit d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 8-R-10909 (12,2).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-1197055, Dupuy, Charles (sous la direction de) ; Matruchot, Louis (auteur), Livret de botanique agricole [opuscule de l’élève] : questions réponsessujets de rédaction (L’Année du certificat d’études), Paris : Armand Colin, 1894, 1 vol. (38 p.), page non paginée, vue 3/44, consultable en ligne sur Gallica, texte reproduit d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 8-R-10909 (12,2).

Le ministre de l’Agriculture de l’époque a le projet d’établir des fermes-écoles dans chaque arrondissement : y seraient admis des apprentis âgés de seize à dix-huit ans, fils de cultivateurs et d’ouvriers agricoles, afin de parfaire leurs connaissances. Au-dessus de celles-ci, des écoles « régionnelles[1] » [sic] permettent de former des agronomes perfectionnés.


[1] Comprendre régionales.


Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – quai de la Madeleine et école normale d’institutrices, cliché Limbour (photographe) & J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – quai de la Madeleine et école normale d’institutrices, cliché Limbour (photographe) & J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.

Dans le but que certains élèves puissent acquérir une formation plus approfondie, les chefs-lieux de canton créent une école primaire supérieure, dans laquelle l’enseignant est titulaire d’un brevet supérieur acquis au cours de sa formation dans une école normale ou privée.


L’enquête de 1848 sur le travail agricole et industriel révèle que les quatre cinquièmes des travailleurs savent lire et écrire, qu’un dixième sait lire mais ne sait pas écrire, et que le dernier dixième ne sait ni lire ni écrire[1].


[1] Archives nationales, C 945 [série C = fonds publics postérieurs à 1789, archives des assemblées nationales (1787-1958), cotes C 943-969 = enquête sur le travail agricole et industriel, prescrite par le décret du 25 mai 1848, exécutée par cantons et portant sur l’état de l’agriculture et de l’industrie dans chaque canton, la condition des ouvriers et des salaires, le chômage, les associations, l’état moral et religieux de la population ouvrière, l’émigration des travailleurs vers les villes 1848-1849].


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514234, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : villes, échelle au 1 : 1 100 000. Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (5/5 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 5].
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514234, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : villes, échelle au 1 : 1 100 000. Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (5/5 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 5].

Le département n’est pas indifférent au sort des plus petits, puisque le conseil général des Ardennes, dès 1850, émet le vœu que des salles d’asile pour l’enfance soient établies dans les communes rurales. Il n’est pas possible de déterminer exactement pour La Romagne si ces directives ont été suivies, dans la mesure où les registres des délibérations du conseil municipal de cette époque ont disparu.


La loi Falloux du 15 mars 1850 reconnaît deux types d’écoles : les unes, publiques, relèvent selon leur lieu de l’Etat, du département ou des communes. Les écoles libres dépendant de particuliers ou d’associations.


Ainsi existe-t-il à Wasigny (Ardennes) une école primaire supérieure et privée, avec possibilité d’accueillir des pensionnaires. Quelques années plus tard, la congrégation de l’Enfant Jésus de Reims (Marne) ouvre une école de filles à Lalobbe (Ardennes)[1].


[1] Archives départementales de La Marne, site de Châlons-en-Champagne, 57 V1 [série V = cultes].


C’est aussi à ce moment-là qu’est imposé le français comme seule langue en usage à l’école. Cette décision est confirmée par le règlement modèle pour les écoles publiques du 17 août 1851 adopté par le ministre de l’Instruction publique Marie Jean Pierre Pie Frédéric Dombidau, baron de Crouseilhes[1], de manière que les élèves soient « formés à l’usage habituel de cette langue », selon son article 29.


[1] Pair de France.



Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-10525063, Moreau-Nélaton, Étienne (collectionneur), [recueil de célébrités du XIXe siècle], [entre 1860 et 1880 environ], album de 50 photographies positives sur papier albuminé, format carte de visite, image 33 [portrait de Jules Ferry par Bacard fils photographe], page non paginée, vue 33/116, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 4-NA-109 (2).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-10525063, Moreau-Nélaton, Étienne (collectionneur), [recueil de célébrités du XIXe siècle], [entre 1860 et 1880 environ], album de 50 photographies positives sur papier albuminé, format carte de visite, image 33 [portrait de Jules Ferry par Bacard fils photographe], page non paginée, vue 33/116, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 4-NA-109 (2).

Les lois dites Jules Ferry des 16 octobre 1881 et 28 mars 1882 instituent l’obligation et la gratuité de l’enseignement. Elles affirment la sortie du programme obligatoire d’enseignement de tout dogme, de manière que tous aient accès à la lecture et à l’écriture.


L’enseignement civique et moral est en revanche introduit. L’instituteur est chargé de former l’esprit des enfants en développant le bon sens, l’observation, la réflexion et le raisonnement.

En outre, et surtout dans les communes rurales, il doit fortifier ses élèves dans le goût des travaux qui occupent les gens du village, tout en leur faisant comprendre les bienfaits de l’instruction, les inconvénients de la routine et la nécessité du progrès.


On sait peu de choses sur l’enseignement donné par Joseph Hézelle, maître d’école à La Romagne de 1807 à 1816, si ce n’est que, comme il était chantre, il enseigne le chant à ses élèves, mais aussi le « nouveau catéchisme ». Les livres qu’il utilise montrent la prééminence de la religion dans l’enseignement :

  • L’Instruction de la jeunesse ;
  • La Pensée chrétienne et quelques autres livres de piété ;
  • La Grammaire française.

L’un de ses successeurs en 1823, Pierre Emile Fréal, utilise une méthode d’enseignement ancienne : c’est la première allusion vague et très succincte que l’on trouve sur la méthode pédagogique.


Localement, les maîtres sont surveillés par les maires et les curés, signe d’une mentalité très conservatrice qui met l’accent sur l’importance de la moralité. Elle transparaît dans le commentaire identique émis sur ces deux instituteurs : « Il se comporte bien et instruit bien » : la prééminence du comportement sur la qualité de l’enseignement dispensé est notable.


Jusqu’aux lois de 1882, l’instituteur est constamment surveillé sur sa tenue vestimentaire : il ne peut pas se montrer bras nus, sans cravate ou avec un bonnet de coton. Il l’est également dans sa tenue morale, d’autant qu’il doit accompagner les enfants aux offices des dimanches et fêtes, ou à l’époque de la première communion.


Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV 3899, Van Loo, Louis-Michel, Le comte de Provence, futur Louis XVIII, huile sur toile, 1770, notice descriptive consultable en ligne.
Musée national du Château de Versailles et de Trianon, numéro d’inventaire MV 3899, Van Loo, Louis-Michel, Le comte de Provence, futur Louis XVIII, huile sur toile, 1770, notice descriptive consultable en ligne.

A partir de 1816, le roi crée dans chaque canton un comité chargé de surveiller l’enseignement primaire. On retrouve constamment ensuite et malgré les changements de régime cette surveillance religieuse, puisque l’évêque (ou un de ses délégués) fait partie du conseil départemental de l’Instruction publique au même titre que le préfet et deux membres du conseil général.


On est encore loin des inspecteurs primaires mis en place pour veiller à l’application des lois de 1882, mais aussi pour soutenir et conseiller les instituteurs nommés par la République. Ces derniers, titulaires de chaque canton, participent à l’élaboration de la liste des livres en usage dans le département, en assistant chaque année à une réunion, à l’issue de laquelle ils communiquent à l’inspecteur primaire les additions et les suppressions qu’ils jugent utiles.


Ces propositions remontent ensuite vers le recteur, puis au ministre qui statue en dernier ressort : le département des Ardennes dépend d’abord de l’académie de Douai (Hauts-de-France), puis de celle de Lille (Hauts-de-France) à partir de décembre 1888, avant d’être rattaché à l’académie de Reims (Marne) au milieu du XXe siècle.


La Révolution ne modifie pas la manière de recruter les maîtres d’école, qui se trouvent soumis non seulement à la municipalité mais aussi au curé. L’imbrication du civil et du religieux se marque chez l’instituteur par son double rôle dans les communes rurales où, bien souvent, il est également chantre.


La pratique ancienne et pré-révolutionnaire se poursuit, pour lui, à travers l’entretien de l’église, la sonnerie de l’angélus, des baptêmes, mariages et enterrements, ou le portage de l’eau bénite au domicile des malades. Au milieu du XIXe siècle, l’instituteur ne peut plus être contraint à être clerc laïque, sauf si une convention entre la commune et lui est signée lors de son installation.


Il faut attendre la Troisième République et les lois sur l’obligation scolaire pour que les instituteurs soient nommés par le Gouvernement et ne dépendent plus que de lui, même si le microcosme rural se passionne toujours pour les faits et gestes des maîtres et maîtresses de leur village.


Cette nomination par l’Etat modifie profondément le mode de rétribution. Le salaire devient fixe. L’instituteur n’est plus assujetti aux parents, qui avaient pour un certain nombre beaucoup de mal à le payer. Le maire de La Romagne dresse ce constat en 1833 :

« Sur près de cent enfants capables de fréquenter les écoles, la moitié sont dans l’impossibilité de payer les rétributions, puisque la plupart appartient à des parents pauvres qui se privent d’une partie de leur nécessaire pour les envoyer à l’école deux ou trois mois chaque année, et la modicité des revenus du maître ne lui permet pas d’enseigner gratis. »

Avis émis par le maire de La Romagne (Ardennes) en 1833 sur les moyens limités qu’ont les parents pour envoyer leurs enfants à l’école, et sur l’impossibilté matérielle pour l’instituteur d’offrir ses cours.

La succession en 1857 de Marie Frougniet, femme de Victor Graux (instituteur et chantre), nous apprend qu’il y a des arrérages de traitement, et que pour sa fonction de chantre, il perçoit la somme de 30 francs.


Lors de la création de l’école de filles, la municipalité prend en charge le traitement de l’institutrice, et accorde la gratuité aux seuls enfants dont les parents ne peuvent pas payer la rétribution scolaire. Cet effort budgétaire est si important que, parallèlement, le conseil municipal, malgré la demande expresse du préfet et l’intérêt que présente la création d’une caisse des écoles pour les élèves, décide d’ajourner ce projet.


Elle ne verra le jour que quelques années plus tard : elle devient obligatoire aux termes de la loi du 28 mars 1882 article 17. Elle n’est réorganisée qu’en 1926, après avoir connu un moment de sommeil. Pour cela, des crédits sont mis au budget communal dès 1925 (40 francs), puis en 1926 (20 francs), pour former une dotation.


D’autre part, et pour ne citer qu’un exemple parmi d’autres, la coopérative scolaire reçoit quelques subsides à l’occasion des quêtes effectuées lors d’un mariage, comme c’est le cas lors de l’union de Fernand Taillet et d’Ida Carbonneaux[1].


[1] Archives départementales des Ardennes, DEP/ARDENNAIS 129, « La Romagne. – Au mariage » [chronique locale et régionale], in Le Petit Ardennais : journal politique [« puis » journal républicain] quotidien. Charleville : [s. n.], 1880-1944, cinquante-septième année, n° 3466, lundi 16 janvier 1939, p. 2 [presse locale ancienne, vue 2/6, consultable en ligne].


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514112, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), Planisphère : colonies françaises, Paris : Armand Colin, XIXe siècle, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (22/22 BIS-18..). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 22].
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514112, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), Planisphère : colonies françaises, Paris : Armand Colin, XIXe siècle, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (22/22 BIS-18..). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 22].

Très souvent, après 1882, l’instituteur est secrétaire de mairie. Afin de pouvoir effectuer cette tâche, il doit recevoir l’autorisation du conseil départemental de l’enseignement primaire. Cette fonction, si elle permet d’améliorer la rémunération du maître d’école, l’attache davantage à la commune dans laquelle il exerce.

Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514112, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), Planisphère : colonies françaises, Paris : Armand Colin, XIXe siècle, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (22/22 BIS-18..). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 22 bis].
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52514112, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), Planisphère : colonies françaises, Paris : Armand Colin, XIXe siècle, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (22/22 BIS-18..). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 22 bis].

Les instituteurs sont répartis en plusieurs classes, si bien qu’en 1905, le traitement annuel varie de 1100 francs pour un stagiaire à 2200 francs pour un enseignant de la première classe, sachant que, pour la même catégorie, une institutrice perçoit 200 francs de moins.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-53236375, Atelier Nadar (photographe), 20470. M. Guizot. Ministre de Louis Philippe, photographie positive sur papier albuminé d'après négatif sur verre, tirage de démonstration, 1 vue consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, NA-238 (50)-FT 4.
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-53236375, Atelier Nadar (photographe), 20470. M. Guizot. Ministre de Louis Philippe, photographie positive sur papier albuminé d’après négatif sur verre, tirage de démonstration, 1 vue consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, NA-238 (50)-FT 4.

Jusqu’à la loi Guizot, il n’y a pas de véritable formation pour les maîtres d’école même si, à partir de 1816, la possession d’un brevet de capacité obtenu après un examen devient obligatoire pour pouvoir exercer dans des écoles primaires. Tout d’abord, ce sont les écoles normales pour les maîtres qui sont créées puis, en 1838, celles pour les maîtresses. Cette formation en écoles normales se poursuit, quel que soit le régime.

Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – l’école normale de jeunes filles et l’école maternelle, annexe rue Jean-Baptiste-Clément, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – l’école normale de jeunes filles et l’école maternelle, annexe rue Jean-Baptiste-Clément, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.

Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – école normale d’institutrices – construite en 1884 par M. Jules Racine, architecte départemental, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – école normale d’institutrices – construite en 1884 par M. Jules Racine, architecte départemental, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.

Sous le Second Empire, les candidats à l’école normale font l’objet, avant leur entrée dans cet établissement, d’une enquête assez poussée : elle concerne non seulement leur nationalité (il n’est pas exigible d’être français), leur conduite, mais aussi leur constitution physique et leur aptitude à remplir la fonction de chantre, ce qui démontre une fois de plus les liens étroits entre enseignement et Eglise.


Si tous les critères sont réunis, il ne reste plus au candidat qu’à satisfaire au passage devant une commission, qui établit un classement par ordre de mérite en fonction des places vacantes. En dernier lieu, l’admission est prononcée par le préfet, sur la proposition de l’inspecteur d’académie.


Ce dernier tient compte des vœux du conseil municipal alors que, dans les temps précédents, l’instituteur communal était nommé directement par le conseil municipal, après consultation de la liste dressée par le conseil académique du département. C’est ce conseil qui décide du nombre d’instituteurs que doit avoir une commune et qui, pour ce faire, autorise la nomination d’un instituteur adjoint dès l’âge de dix-huit ans, parfois même avant qu’il n’ait passé son examen de compétence.


Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], 18. Charleville – école normale [Nota bene : la mention « des filles » a été ajoutée à l’encre en écriture manuscrite], Maurice Guillaume (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], 18. Charleville – école normale [Nota bene : la mention « des filles » a été ajoutée à l’encre en écriture manuscrite], Maurice Guillaume (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.

Quelques jeunes gens et jeunes filles originaires du village sont nommés après leurs études à l’école normale du département, et sont affectés parfois dans les environs. On retrouve parmi ceux-ci :

  • René-Louis Sonnet, né le 7 octobre 1838 à La Romagne, fils de Jean-Charles Sonnet et de Honorine Boudsocq ;
  • Marie-Dieudonnée Davenne, née le 28 mars 1852 à la Romagne, fille de Jean-Baptiste Davenne et d’Aurore Louette. Elle exerce successivement au Fréty (Ardennes) puis à Fépin (Ardennes).
  • Jean-Pierre Ovide Stevenot, né le 1er septembre 1857 à La Romagne, fils de Louis Stevénot et de Marie Madelaine Pélagie Desté ;
  • Léontine Auzanne-Alloy, née le 3 octobre 1861 à La Romagne, fille de Charles Nicolas Auzanne et d’Amélie Mauroy. Elle enseigne tout d’abord à Thiéry-Pré (Ardennes), à Seraincourt (Ardennes) puis à Saint-Jean-aux-Bois (Ardennes).
  • Jean-Baptiste Cambray, né le 19 juin 1867 à La Romagne, fils de Louis Virgile Cambray et de Mathilde Paillon ;
  • Elie-Clovis Dupont, né le 23 décembre 1879 à La Romagne, fils de François Jules Dupont et de Marie Constance Vuilmet.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – école normale d’institutrices – construite en 1884 par M. Jules Racine, architecte départemental, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.
Archives départementales des Ardennes, 8FI 14 [série FI = documents figurés, quelle que soit leur date, sous-série 8FI = cartes postales], Charleville – école normale d’institutrices – construite en 1884 par M. Jules Racine, architecte départemental, J. Winling (éditeur), carte postale ancienne en noir et blanc, virage sépia, consultable en ligne.

Dans les communes rurales, chaque enseignant exerce le plus souvent en classe unique, et fait parfois appel aux plus grands pour aider les plus jeunes.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52505592, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : départements, échelle au 1 : 1 000 000, Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (4/4 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 4].
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52505592, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : départements, échelle au 1 : 1 000 000, Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (4/4 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 4].

Pour enseigner, les instituteurs et institutrices du village disposent d’une salle de classe d’une surface d’environ quarante mètres carrés et d’une hauteur de deux mètres (tout au moins pour l’école de garçons), avant la mise à disposition d’une salle plus spacieuse et lumineuse dans la nouvelle école.

Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52505592, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : départements, échelle au 1 : 1 000 000, Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (4/4 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 4 bis].
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-52505592, Vidal de La Blache, Paul (cartographe), France : départements, échelle au 1 : 1 000 000, Paris : Armand Colin, 1885, 1 feuille en couleurs, 117 x 98 cm, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE AA-25 (4/4 BIS-1885). [Note : atlas de 22 cartes murales, parlantes au recto, muettes au verso. Document cartographique n° 4 bis].

Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-55008728, Selves, Henri (auteur, éditeur, imprimeur, fabricant), Globe terrestre, dressé pour l'usage des collèges, lithographies et limites coloriées, 15 cm de diamètre, 27 cm de hauteur, objet sur pied en bois tourné, page non paginée, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE A-1477 (RES), communication soumise à condition.
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-55008728, Selves, Henri (auteur, éditeur, imprimeur, fabricant), Globe terrestre, dressé pour l’usage des collèges, lithographies et limites coloriées, 15 cm de diamètre, 27 cm de hauteur, objet sur pied en bois tourné, page non paginée, vue 2/2, consultable en ligne sur Gallica, image reproduite d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, GE A-1477 (RES), communication soumise à condition.

Le matériel pédagogique de base est constitué de deux ou trois tableaux noirs, de cartes de géographie des départements, de la France, d’un globe terrestre, d’un nécessaire métrique, d’une collection de solides géométriques.

Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-6531093, Foncin, Pierre (auteur), La Première Année de géographie, cartes, textes, devoirs, Paris : Armand Colin, 1875, in-4° , 40 p., figures et cartes en couleurs, page non paginée, vue 1/52, consultable en ligne sur Gallica, texte reproduit d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 4-G-292.
Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-6531093, Foncin, Pierre (auteur), La Première Année de géographie, cartes, textes, devoirs, Paris : Armand Colin, 1875, in-4° , 40 p., figures et cartes en couleurs, page non paginée, vue 1/52, consultable en ligne sur Gallica, texte reproduit d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 4-G-292.

En outre, depuis 1865, l’école dispose d’une bibliothèque, qui compte alors environ cent cinquante ouvrages. Mais les prêts ne sont pas nombreux (on en dénombre seulement quatorze pour l’année 1920), ce qui peut s’expliquer par le travail effectué après l’école, qui laisse peu de temps libre.


Centre national du cinéma et de l'image animée (France), numéro d’inventaire CNC-AP-96-69, Radiguet, Honoré ; Massiot, Gaston (fabricants, distributeurs), projecteur de film 35 mm et plaques de verre, poste scolaire mixte Le Stator type 1920, notice descriptive consultable en ligne sur le site de la Cinémathèque française.
Centre national du cinéma et de l’image animée (France), numéro d’inventaire CNC-AP-96-69, Radiguet, Honoré ; Massiot, Gaston (fabricants, distributeurs), projecteur de film 35 mm et plaques de verre, poste scolaire mixte Le Stator type 1920, notice descriptive consultable en ligne sur le site de la Cinémathèque française.

Au fil des années, ces supports sont complétés. Mais, après l’invasion de 1940, le matériel pédagogique, l’appareil cinématographique, les meubles de la bibliothèque et tous ses livres, ainsi que le poêle, disparaissent. Tout est dans un premier temps réparé, et les objets remplacés, à l’exception de l’appareil cinématographique[1]. Ce qui enlève un moyen de réunir les habitants autour d’un film, à un moment où rares sont ceux qui peuvent se rendre en ville pour aller au cinéma.


[1] Archives départementales des Ardennes, 13R 1661 [série R = affaires militaires et organismes de temps de guerre depuis 1800, sous-série 13R = dommages de guerre 1939-1945].


Madame Marie-Madeleine Albertini, maîtresse de couture, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Marie-Hélène Beltrami née Albertini).
Madame Marie-Madeleine Albertini, maîtresse de couture, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Marie-Hélène Beltrami née Albertini).

En 1950, le conseil municipal propose comme maîtresse de couture madame Marie-Madeleine Albertini pour remplacer mademoiselle Jonnart dans cette tâche. En 1963, c’est madame Geneviève Fleury, la femme de l’instituteur Pierre Fleury, qui s’en occupe. Cet enseignement ne tarde pas à disparaître des programmes, remplacé par d’autres activités.


Si, au XVIIIe et au XIXe siècles, les changements de maîtres sont fréquents dans la commune, celle-ci connaît progressivement une plus grande stabilité : plusieurs enseignants du XXe siècle restent ainsi plus d’une décennie.


La première trace que l’on ait d’un logement fourni par la commune (qui n’en est probablement pas propriétaire) à son instituteur date de 1823, alors que celui-ci perçoit une rétribution de 40 francs[1].


[1] Archives départementales de la Marne, site de Reims, 7J 53 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 53-56 = enseignement, cote 7J 53 = enseignement libre. – Brochures (1834-1895). – Généralités sur l’enseignement libre (1840-1850). – Généralités sur les constructions et l’entretien d’écoles libres (1850-1870). – Compte rendu pour les cérémonies du deuxième centenaire de la fondation des écoles chrétiennes des frères (1880). – Budgets et états d’écoles primaires catholiques du diocèse de Reims (1823). – Plaintes contre les maîtres d’école ; contentieux (1823-1832)].


Plan sommaire du nouveau bâtiment scolaire, daté du 25 juin 1949, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.
Plan sommaire du nouveau bâtiment scolaire, daté du 25 juin 1949, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.

En 1849, chaque commune se doit de fournir des locaux décents pour la tenue de la classe et pour l’habitation. A partir de la construction de la première école, puis de la création de l’école de filles, les enseignants sont respectivement logés dans le bâtiment scolaire.


Un rapport daté de 1920/1921 permet de connaître ce qu’est un « logement de fonction » dans une petite commune, quoique la situation varie d’une région à l’autre. A La Romagne, les deux logements sont composés de cinq pièces d’habitation dont quatre « à feu[1] », avec une cave, un puits pour l’eau, une petite remise et un jardin d’environ trois ares. La commune ne fournit ni l’éclairage ni le chauffage du logement.


[1] C’est-à-dire avec une cheminée.


Plan sommaire du rez-de-chaussée et du premier étage de l’ancien bâtiment scolaire, 1921, échelle au 1 : 100, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.
Plan sommaire du rez-de-chaussée et du premier étage de l’ancien bâtiment scolaire, 1921, échelle au 1 : 100, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.

Selon le plan établi, on peut remarquer que le logement de l’instituteur se trouve disposé sur deux niveaux. La cuisine et la salle à manger voisinent avec la classe, alors que les chambres se trouvent au premier étage à côté de la mairie, ce qui n’est ni pratique ni intime.


Plan de masse, esquisse pour la construction d’une mairie-école, échelle au 0,002 pm, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.
Plan de masse, esquisse pour la construction d’une mairie-école, échelle au 0,002 pm, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.

Lors de la reconstruction, un effort tout particulier est fait en ce qui concerne son confort, et le logement est d’un seul tenant. En février 1959, compte tenu de la famille nombreuse de l’institutrice, le conseil municipal décide d’aménager une chambre supplémentaire dans le grenier de l’école. Après la fermeture de l’école, ce logement est loué durant quelque temps.

Plan de l’étage de la nouvelle école, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), calque, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.
Plan de l’étage de la nouvelle école, consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne (Ardennes), calque, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe.

La journée de classe se déroule jusqu’en 1882 en général de 8 h à 12 h et de 13 h à 17 h. Par la suite, les horaires comportent deux récréations ponctuées par la sonnerie de la cloche installée en 1886. La durée des vacances d’été varie entre le XIXe siècle et le suivant.

  • En 1800, elles durent du 5 août au 20 septembre.
  • En 1894, il y a six semaines de vacances en été.
  • En 1922, deux semaines sont ajoutées pour les vacances d’été.
  • En 1939, elles sont fixées du 15 juillet au 30 septembre.
  • En 1961, elles ont lieu du 28 juin au 16 septembre.

En dehors de celles-ci, le jeudi est le jour hebdomadaire sans classe jusqu’en 1972, moment où il est remplacé par le mercredi. Les élèves ont quelques jours de congés comme le Jour de l’an, les Jeudi, Vendredi et Samedi saints, les lundis de Pâques et de Pentecôte, ainsi que le jour de la fête du roi ou de l’empereur.


C’est en 1894 que les élèves bénéficient d’une semaine à Pâques, et en 1938 d’une semaine à la Noël, avant qu’un remaniement et la création de deux (puis trois) zones scolaires n’interviennent pour favoriser les développements touristiques.


Le repère religieux, bien qu’assez vivace chez de nombreuses personnes, s’efface dans la dénomination officielle, pour faire place aux vacances d’automne, de fin d’année, d’hiver, de printemps et d’été.


Jusqu’à l’application des lois de la Troisième République, le maître d’école, qui doit toujours donner des cours d’instruction religieuse, est aussi tenu de commencer et de terminer la journée de classe par une prière.


L’instruction civique et morale prend la place de l’instruction religieuse mais le jeudi, journée où les élèves vaquent, permet aux parents qui le souhaitent de faire donner celle-ci à leurs enfants. La laïcité à l’école offre ainsi aux élèves la liberté de croire ou de ne pas croire, tout en les préservant de tout prosélytisme idéologique, économique et religieux.

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Le premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne


Portrait de monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire de La Romagne (Ardennes) de 1930 à 1965, photographie ancienne en noir et blanc, virage sépia (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
Portrait de monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire de La Romagne (Ardennes) de 1930 à 1965, photographie ancienne en noir et blanc, virage sépia (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Monsieur Alcide Cugnart[1], maire de La Romagne de 1930 à 1965, prononce un discours qui célèbre la victoire du 8 mai 1945. Il y évoque l’histoire de la Nation et celle de son village. Ce témoignage historique a été remis par madame Virginie Périn, son arrière-petite-fille[2].


[1] Alcide Joseph Cugnart est né à La Romagne le 13 avril 1897. Il est mort dans ce même village le 5 juillet 1973 à l’âge de 76 ans.

[2] Et petite-fille de madame Colette Cugnart épouse Bertrand.


Il est publié avec son aimable autorisation. Il se présente sous la forme de quatre pages lignées en bleu clair avec une marge rouge, non paginées, dans un bon état de conservation relatif malgré un jaunissement du papier[1] et le pâlissement de l’encre.

Ses pleins et déliés élégants en rendent l’écriture lisible et facilitent le travail de transcription intégrale[2] sous forme d’édition diplomatique[3]. Il présente un intérêt historique et mémoriel indéniable : il est émouvant, quelque quatre-vingts ans après, de partager la première célébration de la libération de La Romagne.


[1] Dû à son acidification.

[2] Dans ce mode, les erreurs et fautes grammaticales sont conservées, contrairement à la transcription intégrale allégée et à la synthèse.

[3] Reproduction la plus fidèle possible.


Jehanne au sacre, statue polychrome en pied de Jeanne d'Arc (vers 1412-1431) par Prosper d'Épinay (1836-1914), marbre, bronze argenté, ivoire, lapis-lazuli, sculpture de 1901 installée en 1909 dans la chapelle Sainte-Jeanne d'Arc de la cathédrale Notre-Dame de Reims.
Jehanne au sacre, statue polychrome en pied de Jeanne d’Arc (vers 1412-1431) par Prosper d’Épinay (1836-1914), marbre, bronze argenté, ivoire, lapis-lazuli, sculpture de 1901 installée en 1909 dans la chapelle Sainte-Jeanne d’Arc de la cathédrale Notre-Dame de Reims.

Sa datation n’est pas explicite. Mais une critique historique externe du texte (dite de véracité) permet d’estimer que la cérémonie s’est déroulée le dimanche 13 mai 1945 : cette déduction se tire d’une remarque de l’édile républicain sur la fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme[1].


[1] Cette célébration civile n’est pas à confondre avec la Sainte-Jeanne d’Arc. Dans l’esprit de l’orateur, la libération d’Orléans le 8 mai 1429 par l’héroïne (sans laquelle la France serait devenue anglaise) rejoint la victoire des Alliés le 8 mai 1945 (qui ont permis que la France ne devienne pas allemande).


Page 1 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
Page 1 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

« Mesdames, Messieurs,
 
C’est avec une profonde émotion que je prends la parole pour vous convier à célébrer officiellement la victoire[1].


[1] Le maire de La Romagne écrit le mot soit avec une minuscule, soit avec une majuscule. La typographie originale a été respectée.

Début du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

La 14e DI (division d’infanterie) a eu à partir de janvier 1940 Jean de Lattre de Tassigny (1889-1952) alias Dequesne pour commandant historique : il a réussi à contrer trois fois en mai-juin 1940 la Wehrmacht, qui cherchait à franchir l’Aisne du côté de Rethel (Ardennes). Il a été compagnon de la Libération par décret du 20 novembre 1944, élevé à la dignité d’Etat de maréchal de France à titre posthume. Sa notice biographique est consultable en ligne sur le site du musée de l’Ordre de la Libération (Paris).

La Victoire ! Quel beau nom et comme il résonne agréablement à nos oreilles !
 
C’est qu’il engendre pour tous les Français bien des joies et pour nous Ardennais, il fait disparaître bien des anxiétés !

Passage sur les Ardennes, issu du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Des joies car c’en est terminé de la guerre atroce, de la guerre totale[1] que nous avaient imposée nos ennemis. Le Cessez le feu[2] a sonné sur tous les fronts et le calme bienfaisant règne après le fracas de la bataille.


[1] Une guerre totale est un conflit qui mobilise à la fois les États, les économies et les sociétés.

[2] Lire cessez-le-feu, selon l’Académie française. L’Allemagne signe la reddition sans condition le 7 mai 1945 à Reims (Marne). La suspension des hostilités doit intervenir le lendemain. Une nouvelle signature a lieu à Berlin (Allemagne) le 8 mai. Une différence de fuseau horaire explique que les Russes, eux, célèbrent le jour de la Victoire le 9 mai à Moscou, alors en URSS (Union des républiques socialistes soviétiques) et aujourd’hui dans la fédération de Russie.


Vidéo La Garde républicaine – Rhin et Danube, musique militaire, marche officielle de la 1e armée française, version consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne BnF collection sonore – chanson française.

Nous ne tremblerons plus pour nos fils partis dernièrement, enrôlés dans les rangs de la 1ère armée française[1] reconstituée. Ils vont monter la garde en Allemagne[2] et faire flotter nos trois couleurs victorieuses sur les bords du Rhin et du Danube[3].


[1] Premier et première s’abrègent plutôt en 1er et 1re, selon l’Académie française. La 1re armée française est le nom donné aux unités militaires placées sous les ordres du général Jean de Lattre de Tassigny (1889-1952).

[2] Cette armée, qui comprend alors l’ensemble des forces armées françaises engagées en Allemagne, est sous commandement français. La 2e DB reste, elle, sous autorité américaine.

[3] « Rhin et Danube » est le surnom donné à la 1re armée à la suite de ses victoires remportées le long de ces fleuves entre le 31 mars et le 26 avril 1945.


Nos prisonniers et déportés rentrent petit à petit. Je suis infiniment heureux de voir que la moitié d’entre eux ont[1] retrouvé leur foyer, leur famille et que malgré les privations, les souffrances morales de l’exil trop long, ils nous sont revenus en général en bonne santé.


[1] Lorsque le sujet est un nom de fraction suivi d’un complément, le verbe s’accorde soit avec le nom de fraction, soit avec son complément. « La moitié des utilisateurs est satisfaite ou sont satisfaits. »


Nous attendons impatiemment ceux qui ne sont pas là aujourd’hui[1] pour fêter avec nous la victoire et nous souhaitons qu’ils nous reviennent tous sans tarder, joyeux d’être enfin libérés et de retrouver la France et leur cher petit village[2].


[1] Marceau Lelong, Paul Macquin, Remi Macquin, Léon Marandel, Henri Marquigny, Gaston Mauroy, Marcel Mauroy, Gaston Quentin, Robert Quentin sont rapatriés entre le 23 et le 30 mai 1945.

[2] Le maire se souvient sans doute ici du poème Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage de Joachim du Bellay : « Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village / Fumer la cheminée, et en quelle saison, / Reverrai-je le clos de ma pauvre maison, / Qui m’est une province, et beaucoup davantage ? »


Page 2 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
Page 2 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Oui, nous ne sommes plus anxieux pour l’avenir immédiat ! Adieu cette pensée qui nous obsédait alors que la nostalgie de la petite patrie nous avait, au mépris des dangers et de l’incertitude du lendemain, fait rentrer dans notre chère commune[1] !


[1] Référence à la dispersion des Romanais lors de l’exode, et aux difficultés du retour liées aux complications administratives pour obtenir des autorisations des autorités allemandes.


Si l’Allemagne avait été victorieuse, nos Ardennes ne seraient pas restées françaises[1] et nous aurions dû encore nous exiler, quitter à tout jamais nos champs, dire adieu à nos horizons familiers et aimés.

[1] Le maire rappelle le traumatisme causé par trois guerres successives : Les Ardennes ont été occupées par l’armée prussienne à partir du mois de septembre 1870, par les Allemands du 29 août 1914 au 11 novembre 1918, et enfin par le Troisième Reich dès 1940.

Passage sur les Ardennes, issu du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Musée de l'Ordre de la Libération (Paris), numéro d'inventaire D1946.1.1, Collier de grand maître de l'Ordre de la Libération, œuvre réalisée par Gilbert Poillerat (1902-1988), orfèvre, décorateur et maître-ferronnier d’art français, remise le 31 août 1947 au général de Gaulle (1890-1970), fondateur et grand maître de l’Ordre de la Libération, image consultable en ligne.
Musée de l’Ordre de la Libération (Paris), numéro d’inventaire D1946.1.1, Collier de grand maître de l’Ordre de la Libération, œuvre réalisée par Gilbert Poillerat (1902-1988), orfèvre, décorateur et maître-ferronnier d’art français, remise le 31 août 1947 au général de Gaulle (1890-1970), fondateur et grand maître de l’Ordre de la Libération, image consultable en ligne.

Et si maintenant nous ne tremblons plus pour notre destinée, c’est grâce à nos vaillants alliés, c’est grâce à notre grand chef le Général de Gaule[1], comparable à notre Jeanne d’Arc nationale que nous honorons également aujourd’hui[2]. Tous deux ont toujours eu foi en la Victoire.


[1] Lire général de Gaulle. Le militaire, résistant, homme d’État et écrivain français (1890-1970) a été chef de la France libre, commandant des FFL (Forces françaises libres), président du gouvernement provisoire, fondateur et grand-maître de l’Ordre de la Libération.

[2] Cette mention permet de dater précisément le jour où le discours a été prononcé. D’un point de vue religieux, Jeanne d’Arc a été canonisée le 16 mai 1920, et sa fête religieuse fixée au 30 mai, jour du bûcher de Rouen, en 1431. Sa fête nationale est fixée au 8 mai, jour anniversaire de la délivrance d’Orléans en 1429. Par une loi du 10 juillet 1920, la République décide que le deuxième dimanche de mai sera choisi pour la fête patriotique et nationale. En 1945, il tombe le dimanche 13 mai.


Page 3 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
Page 3 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

De Gaule[1] d’abord à la tête de quelques Français qui comme lui n’ont jamais désespéré de notre redressement, a vu, à son appel[2], grossir les rangs des braves qui sous les ordres de Leclerc[3] et de Tassigny[4], ont débarqué en Normandie[5]et[6], à Marseille[7] et en une marche victorieuse et triomphale libéré notre Alsace[8], franchi le Rhin[9], planté notre drapeau à Ulm[10] et à Bertchesgaden[11], le repaire de Hitler.


[1] Lire De Gaulle.

[2] Le 18 juin 1940. Il est une réponse au discours radiophonique du 17 juin 1940 par le maréchal Pétain.

[3] Philippe Leclerc de Hautecloque (1902-1947), alias Leclerc, compagnon de la Libération par décret du 6 mars 1941, membre de la Résistance AEF [Allied Expeditionary Force] et du Conseil de défense de l’Empire, élevé à la dignité d’Etat de maréchal de France le 23 août 1952 à titre posthume.

[4] Jean de Lattre de Tassigny (1889-1952) alias Dequesne, compagnon de la Libération par décret du 20 novembre 1944, élevé à la dignité d’Etat de maréchal de France à titre posthume.

[5] Un tapis de bombes tombe dans la nuit du 5 au 6 juin 1944 pour préparer le débarquement de Normandie (opération Neptune) le 6 juin 1944 (Jour J, ou D-Day en anglais), première journée de la bataille de Normandie (Operation Overlord).

[6] La conjonction de coordination a été biffée et remplacée par une virgule.

[7] La bataille de Marseille du 21 au 28 août 1944 a conduit à sa libération.

[8] La libération de Strasbourg s’est effectuée le 23 novembre 1944, celle de Colmar le 2 février 1945.

[9] Le 31 mars 1945, le franchissement du Rhin à Spire et Germersheim (Land de Rhénanie-Palatinat) par la 1re armée française lui permettent une entrée en Allemagne.

[10] Le 24 avril 1945.

[11] Lire Berchtesgaden, commune des Alpes bavaroises (Allemagne). Situé dans le quartier Obersalzberg, le Berghof était la résidence secondaire d’Adolf Hitler. Il a été détruit par un bombardement aérien le 25 avril 1945. Il n’a aucun rapport avec la Kehlsteinhaus, surnommé le « nid d’aigle ». Cette dernière n’est d’autre part pas une maison de thé, contrairement à une autre erreur : il s’agit d’une confusion avec le Teehaus am Mooslahnerkopf, qu’aimait fréquenter le Führer. La Wolfsschanze (« tanière du loup ») était quant à elle le quartier général d’Hitler à Gierłoż (Görlitz en Prusse-Orientale), dans le comté de Kętrzyn (Pologne).


La deuxième division blindée, surnommée 2e DB ou « division Leclerc », car commandée par le général Philippe Leclerc de Hautecloque (1902-1947), alias Leclerc, a débarqué en Normandie, à Utah Beach (Saint-Martin-de-Varreville), dans le département de la Manche, le 1er août 1944. Sa notice biographique est consultable en ligne sur le site du musée de l’Ordre de la Libération (Paris).

C’est aussi grâce à nos Résistants qui ont grandement contribué au succès du débarquement. A tous nous adressons, avec notre profonde admiration, nos remerciements émus.


Vidéo La Garde républicaine – Chant des partisans, musique militaire, version instrumentale consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne BnF collection sonore – chanson française.

Mais, dans l’allégresse de la Victoire, n’oublions pas ceux qui sont morts pour la défense et la gloire de la Patrie[1], les uns, soldats, broyés glorieusement à leur poste de combat, les autres, civils, tués par la mitraille ou les bombes des sinistres oiseaux du ciel[2], d’autres encore s’éteignant obscurément sur un lit d’hôpital et ceux, héros martyrs[3] auxquels les tortures[4] n’ont pas pu faire desserrer les dents, qui n’ont pas voulu livrer à l’ennemi les noms des admirables patriotes qui ont lutté dans l’ombre[5] pour la délivrance de la France[6].


[1] Lire patrie. La mention honorifique « Mort pour la France » atteste qu’une personne s’est sacrifiée pour elle.

[2] Le maire de La Romagne fait ici allusion aux bombardiers allemands, dont le Stuka ou Sturzkampfflugzeug (avion de combat en piqué).

[3] Allusion aux combattants, héros et martyrs de la Résistance.

[4] Le 22 mars 1944, Pierre Brossolette s’est suicidé pour ne pas parler. Dans la nuit du 17 au 18 juin 1940, Jean Moulin a tenté de se trancher la gorge, jugeant qu’il risquait de céder.

[5] Le roman L’Armée des ombres de Joseph Kessel a paru en 1943 à Alger. Il raconte le quotidien de la Résistance française.

[6] Les « grands » de la Résistance ont autant droit aux honneurs que les « soutiers de la gloire », selon l’expression de Pierre Brossolette lors de son discours à la BBC, le 22 septembre 1942 : le maire de La Romagne pense ainsi aux jeunes résistants de la Romagne (André Barré, Robert Carbonneaux, Raymond Didier, Raymond Ravignon).


« Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes

Ni l’orgue ni la prière aux agonisants

Onze ans déjà que cela passe vite onze ans

Vous vous étiez servis simplement de vos armes

La mort n’éblouit pas les yeux des partisans »

Strophes pour se souvenir par Louis Aragon (1897-1982) dans Le Roman inachevé, Paris : éditions Gallimard, 1956.

Ils sont tous dignes d’une éternelle reconnaissance parce que tous ils ont offert sans compter tout ce qu’ils pouvaient offrir, leur jeunesse, leurs forces, leurs joies, leurs espérances, leur sang et leur vie.


Vidéo Il y a 80 ans : l’appel du 18 juin, extrait consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne Élysée, la page officielle de la Présidence de la République française. [Nota bene : l’enregistrement original de l’appel du 18 juin 1940 ayant rapidement disparu, c’est en réalité le passage radiophonique du général de Gaulle (1890-1970) à la BBC le 22 juin 1940 qui est souvent diffusé. La version filmée date, elle, du 2 juillet 1940.]

Ils sont morts, mais leur âme survit en nous et nous dicte notre devoir : l’Union[1].


[1] Le 13 novembre 1945, l’Assemblée nationale élit le général de Gaulle président du gouvernement de la République française. Ce dernier constitue le 21 novembre un gouvernement d’union nationale.


Page 4 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
Page 4 du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Pour que la volonté française de paix[1] puisse s’imposer au monde, il faut resserrer les liens qui unissent tous les fils de notre beau pays.


[1] La capitulation allemande a permis un cessez-le-feu et a constitué un armistice, mais non un traité de paix. De nombreuses conférences internationales sur la paix et la sécurité en Europe ont donc été organisées.


L’union totale, étroite, généreuse entre tous est la condition essentielle de notre redressement[1], de notre sécurité future[2] et du salut de la France[3].


[1] Le 5 juin 1947, à Harvard, le général George Catlett Marshall (1880-1959), secrétaire d’État du président Harry Truman, annonce un programme d’aide au développement, connu depuis comme « plan Marshall ». Les Européens mettent en place le 16 avril 1948 l’OECE (Organisation européenne de coopération économique).

[2] Les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 créent la Sécurité sociale.

[3] Le discours étant prononcé le jour de la fête nationale de Jeanne d’Arc, ce « salut » peut être entendu à la fois dans un sens « patriotique » et selon une acception « théologique ». D’après la lettre apostolique du Pape Pie XI Beata Maria Virgo in cælum assumpta in gallicæ, énoncée le 2 mars 1922, « Notre-Dame de l’Assomption est proclamée patronne principale de la France, et sainte Jeanne d’Arc, patronne secondaire ».


Vidéo Charles de Gaulle – extrait du discours du 25 août 1944 à Paris, consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne BnF collection sonore – livre audio.

Je termine en vous invitant tous à venir lever votre verre à la prospérité de notre France éternelle[1].


[1] Cette idée est chère au général de Gaulle, qui l’a pour cette raison mise en avant dans son discours du 25 août 1944 : « Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! Libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle. »

Réflexion sur la grandeur de la France, issue du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).

Vidéo La Garde républicaine ; François-Julien Brun – La Marseillaise, musique militaire, hymne national de la République française, version consultable en ligne sur Youtube pour la chaîne BnF collection sonore – World Music.

Mais avant je désirerais que, sous les plis de nos trois couleurs, nous chantions en chœur une fervente Marseillaise[1].
 
Vive la France ! »


[1] La Marseillaise a été décrétée chant national le 14 juillet 1795 (26 messidor an III) par la Convention. Sous le régime de Vichy (1940-1944), elle a été remplacée par le chant Maréchal, nous voilà ! Les constitutions de 1946 et de 1958 réaffirment La Marseillaise comme hymne national.

Fin du premier discours de la victoire du 8 mai 1945 à La Romagne (Ardennes) par monsieur Alcide Cugnart (1897-1973), maire du village de 1930 à 1965 (collection privée, avec l’aimable autorisation de madame Virginie Périn).
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Le revenu et le logement du curé de La Romagne


Les dîmes sont des redevances en nature, dues au clergé sur les produits de la terre et les troupeaux. A l’origine, elles sont fixées au dixième du revenu, avant de connaître des modifications et d’être décidées dans chaque paroisse. Cependant, les terres exploitées par les religieux de l’abbaye de Chaumont-Porcien (Ardennes) et leurs fermiers en sont exemptés.


Cette faveur est obtenue par l’abbé Jean, et confirmée non seulement par l’archevêque de Reims, mais aussi par le pape Eugène III[1], lors de son séjour en France en 1147 pour le Concile de Paris. Par la suite, le pape Lucius III[2] accorde en 1181 l’exemption de payer les dîmes des terres novales à cette abbaye, ce qui n’empêche pas par la suite des désaccords de survenir.


[1] Pape de 1145 à 1153.

[2] Pontificat de 1181 à 1185.


Les « grosses dîmes » se perçoivent sur le seigle, l’avoine, le blé. Les « menues dîmes » le sont sur le chanvre, les légumes, et les « dîmes novales » sur le produit de terres récemment mises ou remises en culture, soit depuis moins de 40 ans.


Elles sont perçues par l’abbaye comme « gros décimateur ». A ce titre, elle a en charge l’entretien et la réparation du chœur de l’église, des murs de la couverture et de la croix du clocher, si celui-ci est bâti au-dessus du chœur. De plus, elle a obligation de fournir les ornements et les livres du culte. Elle alloue ensuite un revenu au curé de chaque paroisse, ou portion congrue.


Monnaie de 100 livres dite 10 louis d'or – col nu – 1640 – Paris, avers représentant la tête laurée de Louis XIII à droite, au-dessous date. Légende en abréviations latines : LVD·XIII·D·G·FR·ET·NAV·REX / ·1640·
Monnaie de 100 livres dite 10 louis d’or col nu 1640 Paris, avers représentant la tête laurée de Louis XIII à droite, au-dessous date. Légende en abréviations latines : LVD·XIII·D·G·FR·ET·NAV·REX / ·1640·

Lors du partage des biens de l’abbaye entre les religieux et l’abbé commendataire, les dîmes tombent dans l’escarcelle de celui-ci. Celles de La Romagne, tenues alors par Armand Deschamps, rapportent pour l’essentiel 30 livres. Trente ans plus tard, elles sont louées pour plus de 100 livres.

Monnaie de 100 livres dite 10 louis d'or – col nu – 1640 – Paris, revers réprésentant une croix formée de huit L adossés, couronnés et cantonnés de quatre lis. En cœur, la lettre d’atelier dans un cercle. Légende en abréviations latines : CHRISTVS·REGNAT·VINCIT·ET·IMPERAT·
Monnaie de 100 livres dite 10 louis d’or col nu 1640 Paris, revers réprésentant une croix formée de huit L adossés, couronnés et cantonnés de quatre lis. En cœur, la lettre d’atelier dans un cercle. Légende en abréviations latines : CHRISTVS·REGNAT·VINCIT·ET·IMPERAT·

Double louis d'or au soleil – 1712 – Paris, avers représentant la tête du roi à droite, avec une grande perruque laurée, au-dessous, atelier et date. Légende en abréviations latines : LVD. XIIII. D. G. – FR. ET. NAV. REX.
Double louis d’or au soleil 1712 Paris, avers représentant la tête du roi à droite, avec une grande perruque laurée, au-dessous, atelier et date. Légende en abréviations latines : LVD. XIIII. D. G. – FR. ET. NAV. REX.

Louis XIV, probablement pour améliorer la situation des curés, ordonne que ceux-ci doivent avoir au moins 300 livres de portion congrue. Mais comme cela déplaît au curé de la paroisse, il demande qu’on lui abandonne toutes les dîmes de la paroisse.

Double louis d'or au soleil – 1712 – Paris, revers représentant une croix formée de huit L adossés, chaque bras étant couronné, avec soleil en cœur, cantonnée de quatre lis divergeant du centre. Légende en abréviations latines : .CHRS. – .REGN. – .VINC. – .IMP.
Double louis d’or au soleil 1712 Paris, revers représentant une croix formée de huit L adossés, chaque bras étant couronné, avec soleil en cœur, cantonnée de quatre lis divergeant du centre. Légende en abréviations latines : .CHRS. – .REGN. – .VINC. – .IMP.

En 1710, il est donc le seul décimateur[1], tant des grosses que des menues dîmes alors que, dans d’autres paroisses, elles restent affermées. Ainsi en témoigne le bail passé le 3 novembre 1719 entre les religieux de la Piscine et Pierre Philbert (et consorts) de Rocquigny, pour la somme de 370 livres[2].


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 267/1 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cote 2G 267= doyenné de Rethel (1248-1790), états des paroisses, visites, enquête de 1774]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 240 et suivantes, vue 265/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 267 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une pièce, parchemin : une liasse de 180 pièces, papier (1 cahier de 17 feuillets), 4 sceaux et 2 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 267].

[2] Archives départementales des Ardennes, C 939 [série C = administrations provinciales avant 1790, articles C 546-2428 = supplément à la série C, fonds C 596-2149 = administration des domaines, généralité de Châlons, cotes C 936-1050 = bureau de Château-Porcien, contrôles des actes des notaires et sous-seings privés, tables des mainmortes et des biens nobles, insinuations laïques, centième dernier, 1710-1791. Nota bene : des 4000 articles composant à l’origine cette série, seuls 4 registres du contrôle des actes de Sedan (1760-1816) ont subsisté après le bombardement de 1940].


Elles sont prélevées directement dans le champ, sitôt la récolte terminée : les paysans font publier au prône de la messe de paroisse, ou à l’issue de celle-ci, le jour de la récolte. Cela est fait de manière que le décimateur (ou son collecteur) puisse se trouver sur les lieux.


Quelques difficultés surviennent entre les religieux et le curé de La Romagne Louis Potin qui, en 1707, veut prendre par force la dîme sur quelques pièces de terre dépendant de la ferme de la Paternotte. La réaction des moines est fulgurante, et leur action efficace, si bien que le curé n’y dîme jamais plus.

En 1742, un problème identique voit le jour avec le curé Bataille, qui entend lever la dîme sur la ferme de la Marlière. Devant la vivacité de la réaction, le curé se désiste et rend les gerbes qu’il a indûment prélevées.


Le prêtre reçoit pour son ministère une rétribution, le « gros », qui est sans rapport avec la population ou l’imposition. On apprend par la transcription d’un registre du revenu temporel de l’abbaye datant de 1615 que l’abbé Etienne de Galmet, plutôt que de donner la portion congrue, préfère abandonner les dîmes aux curés de La Romagne, Montmeillant (Ardennes) et Saint-Jean-aux-Bois (Ardennes).

Celles-ci sont probablement moins élevées , à moins qu’il ne s’agisse que du renouvellement d’un abandon des menues dîmes,  comme celui qui avait eu lieu en 1566.Cette interrogation se pose, car l’acte ne couvre pas l’intégralité des dîmes.


On sait qu’en 1745, le curé de La Romagne est « gros décimateur » et qu’en 1774 il est possesseur des « grosses et menues dîmes ».  Son revenu cette année-là est estimé à 500 livres environ. Or, en 1786, en pleine période de crise économique et financière, les dîmes affermées de La Romagne valent à peine 700 livres[1].


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 267/1 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cote 2G 267= doyenné de Rethel (1248-1790), états des paroisses, visites, enquête de 1774]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 240 et suivantes, vue 265/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 267 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une pièce, parchemin : une liasse de 180 pièces, papier (1 cahier de 17 feuillets), 4 sceaux et 2 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 267].


National Gallery of Scotland (Edimbourg, Grande-Bretagne), numéro d’inventaire NGL 067.46 G, Poussin, Nicolas (1594-1665), Le Sacrement de l’extrême-onction, 1644, huile sur  toile, prêt de la collection Bridgewater, notice descriptive consultable en ligne.
National Gallery of Scotland (Edimbourg, Grande-Bretagne), numéro d’inventaire NGL 067.46 G, Poussin, Nicolas (1594-1665), Le Sacrement de l’extrême-onction, 1644, huile sur  toile, prêt de la collection Bridgewater, notice descriptive consultable en ligne.

Il touche également un « casuel [1] » qui, en février 1678, s’élève à 9 livres et est payé par Debroise et Fondrillon, custodes de l’église de La Romagne, pour « ses droits touchant les obits qui se disent annuellement pour les bienfaiteurs de la fabrique[2] ». En 1710, celui-ci « n’est pas bien fort[3] », sans plus de détails, alors qu’en 1774 on peut le chiffrer à 12 francs.


[1] Offrande offerte pour l’exercice de certains ministères (baptêmes, bénédictions, funérailles, mariages).

[2] Archives départementales des Ardennes, 1J 21-9 [série J = archives d’origine privée (entrées par voie d’achat, don, legs ou dépôt), sous-série 1J = documents entrés par voies extraordinaires : dons, achats, legs, dépôts effectués de 1945 à 1975, articles 1J 21 = histoire du Porcien, dons Didion et abbé Henry, novembre 1949, pièce 1 J 21-9 = Montmeillant et La Romagne. – Extraits des registres paroissiaux et d’état-civil (1678-1680). – Familles Lantenois, Hamel, Mauroy et Picard, notes par A. Picard, un cahier].

[3] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 267/1 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cote 2G 267= doyenné de Rethel (1248-1790), états des paroisses, visites, enquête de 1774]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 240 et suivantes, vue 265/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 267 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une pièce, parchemin : une liasse de 180 pièces, papier (1 cahier de 17 feuillets), 4 sceaux et 2 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 267].


Cela n’empêche pas les habitants de La Romagne de se plaindre en 1745 du prix trop haut des obits[1], auprès de Zénard Viegen, vicaire général et visiteur de la paroisse, délégué par l’archevêque, monseigneur le prince de Rohan.


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 268 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cotes 2G 267-268 = doyenné de Rethel (1248-1790)]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 243 et suivantes, vue 267/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 268 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une liasse de 199 pièces, 31 sceaux et 11 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 268].


En 1779, le revenu du curé est toujours le même, soit 500 livres, alors qu’il doit payer une taxe de 29 livres[1]. En 1786, il a, en plus de ses dîmes, 45 livres de fondations fixes.


[1] Bibliothèque Mazarine, fonds général, Ms. 3270 [ancienne cote : Ms. 2255 B], Abbé Bauny (chanoine de l’église collégiale de Saint-Symphorien et secrétaire de l’archevêché), Pouillé du diocèse de Reims, Tome III, deuxième partie, datée de 1779, cures, chapelles et bénéfices simples, papier, 257 pages, p. 29, notice descriptive consultable sur Calames, le catalogue en ligne des archives et des manuscrits de l’enseignement supérieur.


Il reçoit aussi le montant de la location des biens de la cure, qui consiste en petites terres et prés, et sur lesquels nous sommes renseignés à travers deux inventaires[1]. Et on sait qu’en 1686, une messe basse de dévotion ou de fondation est rétribuée 10 sols, un obit de fondation 50 sols, un certificat pour épouser en dehors de la paroisse 10 sols, l’enterrement d’un corps d’adulte 15 sols et celui d’un enfant 10 sols[2].


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 268/7 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cotes 2G 267-268 = doyenné de Rethel (1248-1790)]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 243 et suivantes, vue 267/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 268 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une liasse de 199 pièces, 31 sceaux et 11 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 268].

[2] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 268/7 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cotes 2G 267-268 = doyenné de Rethel (1248-1790)]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 243 et suivantes, vue 267/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 268 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une liasse de 199 pièces, 31 sceaux et 11 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 268].


National Gallery of Scotland (Edimbourg, Grande-Bretagne), numéro d’inventaire NGL 067.46 C, Poussin, Nicolas (1594-1665), Le Sacrement du mariage, 1647-1648, huile sur toile, prêt de la collection Bridgewater, notice descriptive consultable en ligne.
National Gallery of Scotland (Edimbourg, Grande-Bretagne), numéro d’inventaire NGL 067.46 C, Poussin, Nicolas (1594-1665), Le Sacrement du mariage, 1647-1648, huile sur toile, prêt de la collection Bridgewater, notice descriptive consultable en ligne.

Plus tard, dans le désir d’unifier les pratiques, monseigneur Charles de La Roche-Aymon édite un tarif pour le clergé du diocèse de Reims. Ainsi, un extrait de baptême, de mariage ou de sépulture coûte 5 sols.

La célébration de fiançailles vaut 15 sols. Il en coûte 2 livres pour la publication des trois bans (si le mariage se fait dans une autre paroisse), et 4 livres et 10 sols pour les publications et la célébration du mariage dans la paroisse.

Une levée de corps se paie 3 livres, l’enterrement d’un adulte s’élève à 30 sols (soit 1 livre et 10 sols) pour le curé. Il ne faut pas oublier qu’à tout cela s’ajoute, pour les paroissiens, la rétribution du maître d’école[1].


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 91 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 88-115 = administration diocésaine, comptabilité, fabriques, cote 7J 91 = fabrique des églises du diocèse de Reims. – Documents divers (XIXe siècle)].


Ces tarifs ne sont appliqués qu’à ceux qui peuvent les payer, selon leurs facultés. Comme plus de la moitié de la paroisse est pauvre, aux yeux de son curé, ce revenu est aléatoire.


Pour toutes ses activités, le curé touche un revenu que l’on souhaite en 1783 ne pas être inférieur à 600 livres, quelle que soit la paroisse. C’est justement le montant du revenu du curé de l’époque, alors qu’en 1710 son prédécesseur déclare percevoir 500 livres y compris le casuel.


Il bénéficie aussi d’un droit tout particulier à la Champagne : le droit du fer. Celui-ci consiste en ce que l’on partage la dîme par moitié. Si un laboureur qui n’est pas de la paroisse laboure sur le terroir de celle-ci, le gros décimateur de son domicile partage avec l’autre curé la dîme. Elle est due à la vingtième gerbe. Ce droit s’étend non seulement aux territoires séparés de celui de la paroisse par un territoire intermédiaire, mais également à ceux qui lui sont immédiatement contigus.


La répartition n’est pas toujours simple, comme en témoigne cette anecdote où, en 1708, Jean Robinet (fermier des dîmes de Montmeillant) prétend exercer le droit du fer sur les terres de la Paternotte, sous prétexte que le fermier Philippe Jadart demeure à Montmeillant. Les religieux l’assignent aussitôt, ce qui lui fait rendre les gerbes.


La dîme est abolie par le même décret que les droits seigneuriaux le 4 août 1789. De ce fait, une subvention doit pourvoir aux dépenses du culte divin. A partir de messidor an XI, tous les desservants sont pourvus d’un traitement.


Le curé Joseph Bourdon, qui traverse cette période, touche pour le trimestre de nivôse an II la somme de 300 francs, et aurait pour pension annuelle environ la somme de 1000 francs[1]. Il atteste, devant témoins (Hubert Laroche, Jean Baptiste Davaux et Hubert Langlet), qu’il n’a pas émigré.


[1] Archives départementales des Ardennes, L 1269 [série L = administrations et tribunaux de l’époque révolutionnaire (1790-an VIII), articles L 1250-1275 = cultes, clergé constitutionnel et réfractaire, cote L 1269 = pensions écclesiastiques, dossiers individuels, citoyennetés, serments, dossiers de détention, promesses et certificats de paiement, district de Rethel, cantons d’Asfeld à Wasigny, 1791- an VII].


En l’an VI, il certifie que son revenu est celui que lui accorde la Nation, qu’il n’a pas recueilli de succession de son ordre après sa suppression, et qu’il est en conformité avec la loi. Après la signature du Concordat, il perçoit le traitement fixé par celui-ci.


En 1827, le curé de Montmeillant qui dessert La Romagne touche à ce titre un supplément de traitement de 150 francs[1] tandis que, vers 1890, le curé du village a un revenu de 1100 francs, soit 900 francs pour La Romagne et 200 francs pour Draize.


[1] Tableau des ressources affectées en 1827 au personnel du clergé du département. Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 64 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 62-69 = administration diocésaine, circulaires, correspondance administrative, guerre, cote 7J 64 = administration diocésaine, correspondance administrative. – Bénédictions de chapelles et oratoires (1815-1828). – Correspondance entre l’archevêché et les préfectures des Ardennes et de la Marne au sujet des presbytères, chapelles, oratoires, églises et au sujet du clergé (1820-1840)].


La loi promulguée le 9 décembre 1905 abroge le Concordat, et indique qu’aucun culte n’est salarié ou subventionné. Le curé Bastin, à la demande du diocèse de Reims, rend compte de la situation de sa paroisse au 20 avril 1905 : il perçoit tout au plus par an 150 à 180 francs pour les messes et les recommandises[1]. En ce qui concerne Draize, il reçoit quarante à cinquante francs de casuel au maximum, et trois ou quatre recommandises à 5 francs[2].


[1] Messes dites le dimanche, à la suite d’un enterrement.

[2] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 25 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 13-28 = contrôle épiscopal, cote 7J 25 = enquêtes paroissiales. – Tableaux de l’état des paroisses des archiprêtrés de Notre-Dame de Reims, Charleville, Mézières, Rethel, Rocroi (paroisse de Blombay), Sedan, Vouziers (1905)].


Conformément à la loi, et pour une durée de 8 ans, il recevra une allocation dégressive, qui passera de 900 francs en 1907 à 450 en 1910, puis 300 en 1912/1913. Ensuite, les prêtres vont faire connaissance avec un nouveau type de rémunération, par la répartition du denier du culte.


Celui-ci est assez difficile à obtenir de 1914 jusqu’aux années 20, car la population est extrêmement fragilisée par la guerre. En 1940, le traitement d’un curé dans le diocèse de Reims est de 3100 francs et, quoique les temps soient difficiles, il croîtra durant cette période. Durant cette même période, les honoraires des messes augmentent, alors que, comme par le passé, le casuel reste faible dans les campagnes.


Après la Seconde Guerre mondiale, la participation au denier du clergé par habitant augmente peu à peu. La moyenne passe de 5,4 francs en 1962 à 7,25 dix ans plus tard[1].


[1] Données établies à partir des suppléments au Bulletin du diocèse de Reims : revue religieuse, historique et littéraire récapitulant les dons. En dehors de Reims, voir Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMP-10685 < 1867-1943 >, Eglise catholique. Diocèse (Reims, Marne)Bulletin du diocèse de Reims : revue religieuse, historique et littéraire, 1e année, n° 1 (6 juil. 1867) – 89e année, n° 12 (25 mars 1961), Reims : [s.n.], 1867-1961, consultable en ligne sur Gallica, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, 8-LC11-842 (7).


Les sommes reçues par le curé lors de ses visites à ses paroissiens sont envoyées par ce dernier à l’archevêché pour être regroupées au sein du diocèse, puis redistribuées à chacun des prêtres. En 1962, la population est de 196 habitants, et le montant du denier du culte est de 1056 francs.

Les curés perçoivent en outre vers 1950 des rémunérations pour les messes et des recommandises. A cela s’ajoute une rétribution pour le gardiennage[1] de l’église, qui est de 500 francs annuels. Cette dernière est portée à 1200 francs par an en 1984[2].


[1] Circulaires du ministère de l’Intérieur n° 2 du 4 janvier 1944 et n° 279 du 14 avril 1947.

[2] Décision du conseil municipal en date du 27 septembre 1984 (consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).


Le curé habite au presbytère, dont l’entretien est à la charge des fidèles selon l’Ordonnance de Blois de 1579. On ne possède aucun renseignement sur ce bâtiment jusqu’en 1710, date à laquelle on constate pour celui de La Romagne qu’il est « passable » et assez proche de l’église.


Un peu plus tard, en 1774, on apprend qu’il est à portée de l’église et qu’il se compose d’une cuisine, de deux chambres, d’un cabinet où il faut faire quelques réparations, d’une bûcherie, de caves, d’un « fourni[1] », d’une « granche[2] », d’une écurie et d’un jardin. La toiture est en paille et « ne vaut rien ».


[1] Fournil.

[2] Grange.


En réalité, ce presbytère est une amélioration notoire pour le curé, par rapport à l’état de misère dans lequel vivaient ceux qui ont exercé à La Romagne ou à Rocquigny en 1663. Ils logent alors dans la remise à bois ou dans un lieu tout aussi impropre car « les malheurs de la guerre ont étendu leurs ravages partout en détruisant bien des presbytères[1] ».


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 136 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 129-147 = documentation historique, monographies, notes d’érudits, cote 7J 136 = fonds Bouchez, histoire du clergé du diocèse de Reims. – Deux feuilles d’explication sur le fonds Bouchez. –Résumé historique, par l’abbé Bouchez, du clergé paroissial du diocèse de Reims de 1663 à la Révolution. – Notices historiques sur le cardinal Barberini ; monseigneur Charles-Maurice Le Tellier ; les visites d’églises au XVIIe siècle ; l’établissement du grand séminaire de Reims ; les présentations aux cures ; monseigneur de Mailly et les jansénistes ; l’épiscopat de monseigneur de Rohan de 1722 à 1762 ; le mouvement des ordinations dans le diocèse de Reims ; l’état moral des paroisses sous la Révolution. – Les curés et vicaires de l’ancien diocèse de Reims d’après leur ordre de succession dans les paroisses de 1663 à 1791 (2 volumes)].


On peut établir un parallèle avec celui qu’occupe le curé de Montmeillant, et qui se compose d’un corps de logis de quatre pièces, d’un corridor au milieu, d’un bon grenier, d’un jardin, d’une grange-écurie et d’une petite cour[1] .


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 2G 267/17 [série G = clergé séculier, sous-série 2G = fonds de l’archevêché de Reims, cote 2G 267= doyenné de Rethel (1248-1790), états des paroisses, visites, enquête de 1774]. Cité par Demaison, Louis, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 rédigé par M. L. Demaison, archiviste, Marne, archives ecclésiastiques – série G, clergé séculier, tome 1, Reims : Henri Matot, 1900, in-folio, IV-380 p., page 240 et suivantes, vue 265/404, consultable en ligne sur Internet Archive [La cote G 267 de l’archevêché de Reims est décrite dans cet ouvrage comme une pièce, parchemin : une liasse de 180 pièces, papier (1 cahier de 17 feuillets), 4 sceaux et 2 cachets. Le fonds désormais déposé aux archives départementales de la Marne porte aujourd’hui la cote 2G 267].


La vente du presbytère comme bien national a lieu le 8 nivôse an V (soit en 1796). Tout comme les terres de la cure et de la fabrique, il fait l’objet d’une estimation confiée à Pierre Davenne et Gobert Gouge.


Malgré son « état de délabrement », Pierre Chéry en fait l’acquisition pour la somme de 770 livres. Aux bâtiments du presbytère, s’ajoute l’acquisition d’un second lot, composé du jardin et du verger d’environ 50 verges, dont le prix dépasse celui du bâti[1]. De son côté, la commune demande à vendre une grange que le curé occupe.


[1] Archives départementales des Ardennes, Q 278 [série Q = domaines, enregistrement, hypothèques depuis 1790, articles Q 90-468 = ventes de biens nationaux, cotes Q 272-282 = vente de biens nationaux, district de Rethel, 1790-an IV].


Peu après, ce dernier manifeste son envie de profiter du terrain que lui accorde la loi et, par la suite, demande s’il peut jouir des embellissements qu’il avait faits au presbytère. Puis il sollicite auprès du conseil municipal une indemnité pour la boiserie qu’il a posée à ses dépens dans ledit presbytère.


Lors de la reprise du culte et de la réouverture des églises, le village n’a plus ni presbytère ni jardin[1], si bien que la municipalité ne peut pas fournir une habitation au curé.  Elle doit donc lui offrir une indemnité de logement.


[1] Archives départementales de la Moselle, 29J 370 [série J = archives privées, sous-série 29J = évêché de Metz (1093-1999), articles 29J 340-396 = contrôle épiscopal, an XIII-1925, pièces 29J 355-385 = visites canoniques, enquêtes sur l’état des paroisses, 1803-1886, cotes 29 J 355-377 = ancien diocèse de Metz, 1803-1886].


Cette situation dure plus d’une vingtaine d’années, puisque le curé de l’époque en informe sa hiérarchie : « Il n’y a toujours pas de presbytère à La Romagne, mais on aurait le dessin[1] d’en acquérir un. »


[1] [sic, id est dessein].


Quant à l’abbé Morin, il écrit dans une lettre adressée à son archevêque que le presbytère qui est en bon état appartient à la commune, mais que c’est une maison à loyer[1].  Comme il n’y a plus aucun document jusqu’en 1883 sur ce sujet, on sait néanmoins qu’à cette époque l’abbé Noiville, alors très malade, n’a pas pu être remplacé, car propriétaire de son presbytère.


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 66 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 62-69 = administration diocésaine, circulaires, correspondance administrative, guerre, cote 7J 66 = administration diocésaine. – Lettres adressées à l’archevêché concernant l’état des paroisses (1815-1830). – Correspondance administrative de l’archevêché surtout au sujet des paroisses ou avec les paroisses (1823-1903). – Documents divers sur les paroisses et les paroissiens (1830-1831)].


C’est certainement cette situation qui fait prendre conscience au conseil municipal de l’urgence de posséder un presbytère[1]. La décision est ainsi prise d’acheter à monsieur Baudouin « un bâtiment et un jardin presque tout entier à l’avant, en grande partie entourés de murs un peu bas, et parfaitement placés  rue Haute, et qui conviendraient sous tous les rapports ».

Quelques travaux d’aménagement et d’agrandissement sont réalisés grâce à des subventions de la commune vers 1885. L’état souhaité par l’abbé Bastin[2] serait qu’il y ait au rez-de-chaussée et juste au-dessus de la cave une cuisine et une salle à manger, à mi-étage un palier, et des chambres à l’étage.


[1] Archives départementales des Ardennes, D1, décision du conseil municipal de La Romagne du 3 mai 1883.

[2] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 25 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 13-28 = contrôle épiscopal, cote 7J 25 = enquêtes paroissiales. – Tableaux de l’état des paroisses des archiprêtrés de Notre-Dame de Reims, Charleville, Mézières, Rethel, Rocroi (paroisse de Blombay), Sedan, Vouziers (1905)].


Tandis que les autorités ecclésiastiques envisagent une éventuelle fermeture de l’église si les lois concernant la séparation des Eglises et de l’état sont promulguées, le religieux est en mesure d’informer sa hiérarchie qu’il y aurait néanmoins « une petite maison peu confortable en vue pour y installer le curé, d’autant qu’on pourrait envisager pour l’exercice  du culte la construction d’un local en bois[1] ».


[1] Archives départementales de la Marne, centre de Reims, 7J 25 [série J = archives privées, documents entrés par voie extraordinaire, sous-série 7J = fonds de l’archevêché de Reims (1637-1963), articles 7J 13-28 = contrôle épiscopal, cote 7J 25 = enquêtes paroissiales. – Tableaux de l’état des paroisses des archiprêtrés de Notre-Dame de Reims, Charleville, Mézières, Rethel, Rocroi (paroisse de Blombay), Sedan, Vouziers (1905)].


Ancien presbytère de La Romagne, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).
Ancien presbytère de La Romagne, photographie ancienne en noir et blanc (collection privée, avec l’aimable autorisation de monsieur Pierre Malherbe †).

Après la loi du 2 janvier 1907 article I, la location du presbytère entre la commune et le curé est soumise à l’homologation du préfet. Si ce dernier estime que le prix fixé est trop bas, il oppose son refus, si bien que le conseil municipal doit procéder à une nouvelle mise à prix plus conforme au marché locatif de l’époque. En 1910, la somme est de 110 francs.


Ancienne école de filles et nouveau presbytère, prise de vue effectuée le lundi 22 novembre 2021 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.
Ancienne école de filles et nouveau presbytère, prise de vue effectuée le lundi 22 novembre 2021 à La Romagne (Ardennes). Crédits photographiques : © 2020 laromagne.info par Marie-Noëlle ESTIEZ BONHOMME.

Par la suite, ce bâtiment situé au lieu-dit le Village (rue Haute), consistant en un corps de logis avec jardin, est loué par le maire Joseph Marquigny à des particuliers. Puis il est vendu, car l’ancienne école de filles désaffectée par manque d’effectifs devient le nouveau presbytère.


En 1923, celui-ci est loué 200 francs pour une durée de 9 ans, car les réparations nécessaires n’ont pas encore été faites, puis 500 francs (mais les contributions restent à la charge de la commune).


En 1931, l’abbé Pleugers informe le conseil municipal de la vétusté du lieu, et du prix trop important du loyer. Un nouveau bail est signé pour la somme annuelle de 250 francs. La même année, un puits est creusé pour donner de l’eau à cette maison.


Le lieu est loué en 1960 au curé en charge de la paroisse, l’abbé Buché, pour la somme de 120 nouveaux francs. Les contributions sont toujours à la charge de la commune.


Lors de son départ, le conseil municipal choisit de racheter toute l’installation de l’eau qu’il avait faite à ses frais au presbytère. De plus, la décision est prise de la pose d’une dalle de ciment pour les toilettes, et de la protection des murs intérieurs avec des plaques de fibrociment[1], afin d’offrir un peu plus de confort.


[1] Décision du conseil municipal du 10 août 1967 (consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).


L’installation de l’adduction d’eau en 1973 rend inutile l’emploi de la motopompe qui permet l’alimentation en eau du presbytère. Le conseil municipal propose de la vendre[1]. Quant au loyer, son montant est toujours le même jusqu’en 1984 : le montant est fixé désormais à la somme symbolique de 100 francs[2].


[1] Séance du conseil municipal en date du 10 décembre 1973 (consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).

[2] Séance du conseil municipal en date du 29 mars 1984 (consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).


Le presbytère est occupé jusqu’en 1988, date à laquelle le dernier prêtre résidant à la Romagne, l’abbé Dubois-Matra, quitte la paroisse. Il est assez grand, puisqu’il comprend six pièces principales, réparties entre un rez-de-chaussée et un étage, ainsi qu’une petite remise, un grand grenier, un garage, et un jardin. La commune procède à sa vente le 1er mars 1989, après la décision prise par le conseil municipal d’autoriser celle-ci[1].


[1] Séance du conseil municipal en date du 22 septembre 1988 (consultation des documents sur place à la mairie de La Romagne, avec l’aimable autorisation de monsieur René Malherbe).


Une nouvelle ère s’ouvre pour les habitants de La Romagne, qui regrettent la suppression de la cure et la disparition de la présence familière du curé du village.

Catégories
Administration communale Maires Mairies

L’administration communale de La Romagne avant la Révolution


Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-9748855, page 1, vue 1/10, consultable en ligne sur Gallica, Édict du Roy Henry II sur les estats de prevosts, maïeurs, eschevins, et autres charges & estats des villes de France, 7 pages, in-8°, 1547, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-46804 (13).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-9748855, page 1, vue 1/10, consultable en ligne sur Gallica, Édict du Roy Henry II sur les estats de prevosts, maïeurs, eschevins, et autres charges & estats des villes de France, 7 pages, in-8°, 1547, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-46804 (13).

Jusqu’à la Révolution, un village est administré par un maire élu ou désigné qui est le représentant du seigneur, puisqu’il perçoit les droits seigneuriaux[1]. Il publie les ordonnances, veille au maintien de l’ordre, et poursuit les délinquants.

Quant aux échevins[2], ils sont nommés par le seigneur et rendent la justice[3].


[1] Quand ceux-ci ne sont pas affermés.

[2] Membre du corps municipal, qui s’occupe des affaires communales.

[3] Monchot, Stéphanie, Peuplement et occupation du sol dans les doyennés de Justine et de Saint-Germainmont, mémoire de maîtrise, Université de Reims Champagne-Ardenne, 1996.


Ce tableau[1] donne un aperçu de l’organisation municipale de La Romagne au XVIe siècle.

AnnéeMaireEchevins
1531Pierre NoéJean Terlot ; Ponsart Noé ; Pierre Legros ; Jean Fondrillon le jeune
1536Jean CoutantPonsart Noé ; Pierre Guerlet
1542Jean CoutantColas Vasselier ; Jehan Coutant (2e du nom)
1543Jehan CoutantColas Vasselier ; Etienne Vallé ; Pierre Fondrillon
1545Jehan CoutantJean Coutant ; Jean Fondrillon
Maires et échevins à la Romagne au XVIe siècle.

[1] Bibliothèque Carnegie, ms. 2450, Mémoire détaillé de tous les biens de la manse conventuelle de l’abbaye de Chaumont-la-Piscine achevé en 1771, manuscrit consultable en ligne sur la BVMM (Bibliothèque virtuelle des manuscrits médiévaux) élaborée par l’IRHT-CNRS (Institut de recherche et d’histoire des textes).


Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-3045269, page non paginée, vue 1/12, consultable en ligne sur Gallica, Édict du roy, portant pouvoir aux communautez de rentrer dans leurs usages, avec deffenses de saisir les bestiaux. Donné à S. Germain en Laye au mois d'avril 1667. Verifié en Parlement le 20. dudit mois, 10 pages, in-4°, Paris : les imprimeurs et libraires ordinaires du Roy, 1667, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-12173.
Bibliothèque nationale de France, document numérique, NUMM-3045269, page non paginée, vue 1/12, consultable en ligne sur Gallica, Édict du roy, portant pouvoir aux communautez de rentrer dans leurs usages, avec deffenses de saisir les bestiaux. Donné à S. Germain en Laye au mois d’avril 1667. Verifié en Parlement le 20. dudit mois, 10 pages, in-4°, Paris : les imprimeurs et libraires ordinaires du Roy, 1667, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-12173.

L’ensemble des villageois forme une communauté d’habitants, dont la définition varie selon les historiens. Pour les uns, elle est attestée par la possession de droits d’usage et de propriété, dont l’origine se perd dans la nuit des temps. Pour les autres, elle est caractérisée par les limites d’un terrain sujet à diverses règles d’exploitation commune : culture, pâture, date des moissons, servitudes collectives au profit de l’ensemble du village.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8602104, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Édit du roy donné à Versailles au mois de mars 1702 portant création des syndics perpétuels, registré en Parlement le vingtième desdits mois et an, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21054 (103).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8602104, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Édit du roy donné à Versailles au mois de mars 1702 portant création des syndics perpétuels, registré en Parlement le vingtième desdits mois et an, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21054 (103).

En général, les communautés d’habitants ont à leur tête un syndic[1] unique, identique à celui de la fabrique[2]. Le chargé du syndic perpétuel peut joindre à celui-ci l’office de greffier des rôles des tailles, moyennant le paiement d’une somme variable selon la paroisse.


[1] Un règlement royal crée le 5 août 1787 le syndic municipal, pouvant différer du syndic paroissial.

[2] Tout ce qui appartient à une église (fonds et revenus affectés à son entretien, argenterie, luminaire, ornements, etc.).


Louis d'or aux insignes, Paris, 1704 (avers ou droit) représentant la tête âgée de Louis XIV à droite, laurée sans baies dans la couronne avec la perruque courte.
Louis d’or aux insignes, Paris, 1704 (avers ou droit) représentant la tête âgée de Louis XIV à droite, laurée sans baies dans la couronne avec la perruque courte.

En 1704, celui de Rocquigny vaut 181 livres, celui de Saint-Jean-aux-bois n’en coûte que 45. Un habitant fait l’acquisition de celui de La Romagne pour la somme de 80 livres :

« J’ai reçu de Pierre Le Blanc, propriétaire de l’office de sindic perpétuel de la paroisse de La Romagne élection de Reims, la somme de 80 livres pour la finance de l’office de greffier des rolles des tailles, ustanciles et autres impositions ordinaires et extraordinaires de ladite paroisse de La Romagne, créé par édit du mois d’octobre 1703, vérifié au besoin. A été réuni par le dit édit audit office de sindic perpétuel pour en jouir par lui, sa veuve, enfans, héritiers ou ayans causes, héréditairement, ensemble de 3 deniers pour livre des deniers des dites tailles et autres ordinaires et extraordinaires qui seront imposez en vertu des commissions de sa majesté et arrêts de son conseil, sur la quittance du receveur des revenus casuels et sans estre tenu de prendre aucune lettre de provisions et ratification de payer aucun droit de marc d’or ; à l’effet de quoy lesdits 3 deniers seront employez  par chacun an dans les commissions des tailles et autres pour lui estre payez de quartier en quartier par les collecteurs sur sa simple quittance, et en outre l’exemption de la collecte des tailles, de celle de l’impôt du sel et de la collecte de toutes autres impositions, de la contrainte solidaire qui pourront estre décernées contre le général et le particulier de la dite paroisse de La Romagne faute de payment des tailles et autres impositions en payant  par lui sa cotte part et portion desdits deniers, du logement effectif des gens de guerre, de la contribution des sommes qui s’imposeront pour les fourrages, pour la décharge du logement et subsistance des troupes qui séjourneront ou seront en quartier d’hyver en ladite paroisse et pour la solde et entretien de la milice, de l’exemption de tutelle, curatelle, nomination à icelle, guet et garde, corvées et autres charges publiques, du service de la milice pour lui et ses enfans, ensemble des privilèges attribuez à son dit office de syndic, par l’édit de création, le tout ainsi qu’il est plus au long porté audit édit du mois d’octobre 1703.

Fait à Paris le sixième jour de janvier 1705. Signé Bertin. 

Au rolle du 20 may 1704 article 169. »

Archives nationales, site de Paris, P 4108 [série P = chambre des comptes et comptabilité, articles P 4062 à 4253 = quittances de tailles et autres impositions, cotes P 4074 à 4134 = finances d’offices de greffiers, syndics, etc., de rôles des tailles (par généralités), 1694-1724].
Louis d'or aux insignes, Paris, 1704 (revers), représentant une croix formée de quatre lys couronnés, dans un cercle en cœur, brochant sur une main de justice et un sceptre posés en sautoir.
Louis d’or aux insignes, Paris, 1704 (revers), représentant une croix formée de quatre lys couronnés, dans un cercle en cœur, brochant sur une main de justice et un sceptre posés en sautoir.

Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8607122, page 3, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration du roy concernant les instances des communautez, 2 pages paginées 3-4, in-4°, 1687, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21047 (73).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8607122, page 3, vue 1/2, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration du roy concernant les instances des communautez, 2 pages paginées 3-4, in-4°, 1687, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21047 (73).

L’assemblée générale de la communauté des habitants est ouverte à tous les chefs de famille (qui ont une voix délibérative) et aux veuves. Celle-ci peut être appelée par les collecteurs de tailles, le curé, un groupe d’habitants, ou un simple particulier.

Lors de sa convocation, le dimanche au son de la cloche, à la sortie de la messe, elle doit obligatoirement regrouper les six principaux laboureurs et les six principaux manouvriers les plus hauts en tailles[1] pour les paroisses qui ont plus de cent feux.

Pour celles qui n’atteignent pas ce nombre, les représentants obligatoires sont au nombre de quatre pour chaque catégorie. Quelle qu’en soit la raison, ceux qui sont absents ne peuvent être admis à contester les décisions.


[1] C’est-à-dire les plus lourdement taxés.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8607297, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration portant réunion aux communautez des offices de lieutenans de maires, assesseurs, eschevins, consuls et jurats, et de concierges-gardes-meubles des Hostels de Ville, créez par édits des mois de may 1702 et janvier 1704, qui n'ont point esté levez, Paris : impr. de Vve F. Muguet et H. Muguet, 1705, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21056 (134).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8607297, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration portant réunion aux communautez des offices de lieutenans de maires, assesseurs, eschevins, consuls et jurats, et de concierges-gardes-meubles des Hostels de Ville, créez par édits des mois de may 1702 et janvier 1704, qui n’ont point esté levez, Paris : impr. de Vve F. Muguet et H. Muguet, 1705, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21056 (134).

La communauté exerce en réalité un contrôle sur chaque personne de la paroisse : elle impose par exemple les contraintes collectives, comme le respect de l’assolement et des dispositions des droits communautaires, dont l’interdiction de faire troupeau à part.

Elle choisit le berger et le garde-bois (s’il y a des bois communaux), ce qui est le cas de La Romagne. Elle sélectionne le maître d’école en accord avec le curé. Elle s’occupe aussi des adjudications des biens communaux, des dépenses concernant les réparations de ponts ou d’ouvrages publics, avec un budget des plus restreints.


Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8608749, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration portant réunion aux communautez des offices de lieutenans de maires, assesseurs, eschevins, consuls et jurats, et de concierges-gardes-meubles des Hostels de Ville, créez par édits des mois de may 1702 et janvier 1704, qui n'ont point esté levez, Paris : L.-D. Delatour : et P. Simon, 1724, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21097 (43).
Bibliothèque nationale de France, document numérique, IFN-8608749, page 1, vue 1/4, consultable en ligne sur Gallica, Déclaration portant réunion aux communautez des offices de lieutenans de maires, assesseurs, eschevins, consuls et jurats, et de concierges-gardes-meubles des Hostels de Ville, créez par édits des mois de may 1702 et janvier 1704, qui n’ont point esté levez, Paris : L.-D. Delatour : et P. Simon, 1724, 4 pages, in-4°, texte numérisé d’après l’original de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, F-21097 (43).

En 1740, sans que l’on puisse déterminer les fonctions de chacun, la municipalité de La Romagne a pour maire et échevins : Henri Mallet, Pierre Devie, François Merlin, Jean Cocu et Pierre Gagneux[1]. Après 1789, les édiles municipaux sont élus et non plus désignés. Ils exercent des fonctions et non plus des charges.


[1] Archives départementales des Ardennes, 7J 43 [série J = archives d’origine privée (entrées par voies extraordinaires : achats, dons, legs ou dépôts), sous-série 7J = collection du docteur Octave Guelliot, érudit local (1854-1943)], en-tête d’une supplique.